Vendredi 27 décembre 2024, 20h ; dimanche 29 décembre 2024, 14h30 ; mardi 31 décembre 2024, 20h, Opéra Grand Avignon. Durée 2h45
La Fille de madame Angot. Opéra-comique en trois actes de Charles Lecoq. Livret de Clairville, Paul Siraudin et Victor Koning. Créé le 4 décembre 1872 au Théâtre des Fantaisies Parisiennes de Bruxelles. Editions musicales du Palazzetto Bru Zane
Production Théâtre national de l’Opéra-Comique. Coproduction Opéra National de Lyon,
Opéra Nice Côte d’Azur, Opéra Grand Avignon et Palazzetto Bru Zane. Avec l’aimable autorisation de l’INA
Direction musicale, Chloé Dufresne. Chef de chœur, Alan Woodbridge. Mise en scène, Richard Brunel. Dramaturgie, Catherine Ailloud-Nicolas. Décors et costumes, Bruno de Lavenère. Lumières, Laurent Castaingt. Chorégraphie, Maxime Thomas. Assistant musical, Sammy El Ghadab. Assistanat à la mise en scène, Lise Labro et Daniel Lawless. Etudes musicales, Franck Villard
Mademoiselle Lange, Valentine Lemercier. Clairette Angot, Hélène Guilmette. Pomponnet, Enguerrand de Hys. Ange Pitou, Philippe Nicolas Martin. Larivaudière, Matthieu Lécroart. Amarante / Hersilie, Floriane Derthe. Louchard, Antoine Foulon. Cadet / Un incroyable / Un Officier, Jean-François Baron. Trénitz, Geoffrey Carey. Buteux, Rémi Beer-Demander
Choeur de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre national Avignon-Provence
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et toute la saison de l’Opéra Grand Avignon
Madame Angot est un personnage de fiction, de théâtre puis d’opéra-comique. Ce type de la Poissarde enrichie apparaît au milieu du XVIIIe siècle, et pendant un siècle fera les beaux jours des scènes de théâtre, jusqu’à devenir héroïne de scène lyrique grâce à Charles Lecocq en 1872.
L’action se passe pendant le Directoire (1795-1799), soit quelque 80 ans en amont. Juste après la fin de la Terreur, s’était installé un régime républicain, avec notamment le partage du pouvoir entre 5 « directeurs » pendant 4 ans. Ce fut une période de liberté, de foisonnement culturel et artistique, représenté par les Incroyables et les Merveilleuses. Une période propre à titiller l’imagination d’un compositeur et de trois librettistes
La principale originalité de leur « opéra comique » est de mêler personnages réels et personnages de fiction.
Parmi les premiers, Louis-Ange Pitou (1767-1848), journaliste et chansonnier royaliste, qui fut déporté à Cayenne pour quelques mois en 1797 ; il aurait aussi écrit en 1795 une chanson contre-révolutionnaire, Les Collets noirs, à la gloire de deux rois défunts, Louis XVI et Louis XVII.
Mlle Lange (1772-1825) également, fut une actrice et une « Merveilleuse » ; fille de comédiens ambulants, elle entrera à la Comédie-Française et eut une vie particulièrement remplie. Est également évoqué Paul Barras, un noble qui supprima sa particule en passant sous la bannière de la Révolution ; Mle Lange est l’une de ses nombreuses conquêtes, ce qui donne lieu au refrain bien connu :« Barras est roi, Lange est sa reine ; / Ah vraiment, c’était pas la peine,C’était pas la peine assurément / De changer de gouvernement ! »
Un refrain qui, on en conviendra volontiers, prend un air piquant en cette fin décembre 2024 !
L’œuvre est régulièrement jouée, moins que les Offenbach néanmoins, et sa partition, solide et parfois acrobatique, mérite bien d’être servie, et bien servie ; elle le fut récemment à l’Odéon de Marseille en 2018 ; elle le fut en 2021 au TCE pour un DVD sous l’égide du Palazetto Bru Zane, avec Véronique Gens (Mlle Lange) et Anne-Catherine Gillet (Clairette Angot) ; et l’an dernier à l’Opéra-Comique dans une mise en scène de Richard Brunel, directeur général et artistique de l’Opéra national de Lyon, et sous la direction d’Hervé Niquet.
C’est cette dernière production, reprise en ouverture de saison à l’Opéra de Nice, qui vient à Avignon pour le « bout de l’an », dirigée par la talentueuse Chloé Dufresne, lauréate de nombre de concours prestigieux, nommée aux Victoires 2023. L’action y est transposée du Directoire à mai 1968, deux périodes également effervescentes.
Le plateau réunit des artistes bien connus. La mezzo-soprano Valentine Lemercier endosse le rôle-titre, dans lequel elle a fait ses débuts, justement à Nice il y a quelques semaines ; passée par feu Cnipal de Marseille, elle a été souvent distribuée dans la région : Carmen, puis Rosine (Le Barbier de Séville), Un Barbier en 2018, La Périchole en 2022 à l’Opéra Grand Avignon ; plusieurs fois aux Chorégies d’Orange (Madama Butterfly en 2016, Mefistofele en 2018, Musiques en Fête en 2019) ; Alisa (Lucia di Lammermoor) et Myrtale (Thaïs) à l’Opéra de Monte-Carlo ; en 2023-2024, Kate Pinkerton (Madama Butterfly) à l’Opéra de Nice, où, cette saison, elle est également la Deuxième Dame dans La Flûte enchantée.Timbre chaud et rond, avec un abattage indéniable, elle habite le rôle avec jubilation.
Hélène Guilmette, soprano québécoise, est la pétillante Mle Lange, maîtresse de Barras mais vite conquise par Pidou… l’amoureux de Clairette Angot ; on l’a déjà entendue dans la région, à Nice dans le rôle de Sœur Constance (Dialogues des Carmélites), et elle donne aussi récitals, oratorios… Sa voix fruitée mène les situations et les sentiments.
Le ténor toulousain Enguerrand de Hys est Pomponnet ; passé par l’Académie Mozart du Festival d’Aix-en-Provence, il est Révélation Classique Adami 2014 ; il a incarné entre autres Tybalt (Roméo et Juliette) à l’Opéra de Nice, et de nombreux rôles en France et à l’étranger. Le timbre est parfois couvert par la vigueur de l’Orchestre et des choeurs, le rôle ne démérite pas.
Philippe Nicolas Martin est le volage Ange Pitou ; ex-Cnipalien, il est très sollicité, en France et sur des scènes étrangères prestigieuses ; il a été notamment Belcore (L’Elisir d’Amore) à Nice et Avignon, Marcello (La Bohème) à Avignon, L’Horloge et Le Chat (L’Enfant et les Sortilèges) à Aix-en-Provence, 2ème Nazaréen (Salomé) au Festival d’Aix-en-Provence ; cette saison, outre Ange Pitou, il est le Garde Forestier & Le Chasseur (Rusalka) à l’Opéra de Marseille. Mathieu Lécroart (Larivaudière), qui fut Révélation Classique de l’ADAMI, fut récemment le Roi V’lan (Le Voyage dans la lune) à Nice et Avignon, et sera D’Estillac (La Veuve joyeuse) à Marseille ; il a déjà été Larivaudière au Théâtre des Champs-Elysées, un rôle qui semble taillé pour lui. Floriane Derthe (Amarante / Hersilie) est diplômée en 2021 de la Haute Ecole de Musique de Lausanne ; avec le pianiste Hugo Mathieu (le duo Hekla), elle a été lauréate du Concours international des Saisons de la voix de Gordes en 2020. Le baryton Antoine Foulon, quant à lui, reprend le rôle de Louchard qu’il avait tenu à l’Opéra-Comique, et dans lequel Avignon l’applaudit. Jean-François Baron (Cadet/ Un incroyable/ Un officier) est le localier de l’étape ; formé à Marseille, il y a chanté dans de nombreuses opérettes à l’Odéon en artiste des chœurs ; membre du chœur permanent d’Avignon (2008-2022), il est de plus en plus souvent distribué en soliste : André (Les Saltimbanques), d’Estillac (La Veuve Joyeuse), le Commissaire de police (Le Chevalier à la Rose en 2022), Monsieur Mathieu (La Sérénade), ou Andreï Chtchelkalov (Boris Godounov, juin 2024) ; il chante également en solo pour Musique Sacrée & Orgue en Avignon, et cette triple casquette confirme son talent.
G.ad. Photo Dominique Jaussein, Opéra de Nice
Résumé de l’œuvre
Acte I
Les gens de la Halle s’apprêtent à célébrer les noces de l’orpheline qu’ils ont recueillie, Clairette, avec le perruquier Pomponnet. Mais Clairette a hérité du caractère bien trempé de sa mère, la fameuse poissarde « Madame » Angot. Elle s’est éprise d’un chansonnier contre-révolutionnaire, Ange Pitou, étroitement surveillé par la police. Le financier Larivaudière vient soudoyer Pitou : sa prochaine chanson ne doit surtout pas révéler la liaison qu’il entretient avec Mademoiselle Lange, actrice et favorite de l’homme fort du Directoire, Barras. Pitou accepte l’argent car il lui permettrait d’épouser Clairette, mais les gens de la Halle tiennent au perruquier. Clairette choisit donc d’interpréter la chanson en public : la prison lui permettra d’échapper au mariage.
Acte II
Dans son salon, Mlle Lange se fait conter l’arrestation par son amant Larivaudière, puis par son perruquier Pomponnet. Elle a demandé à Barras de faire passer la jeune fiancée chez elle, et a aussi fixé un rendez-vous secret à Pitou pour connaître ses intentions. En Clairette, Lange reconnaît sa camarade de pensionnat : elles tombent dans les bras l’une de l’autre. Quant à Pitou, il séduit rapidement l’actrice. Lorsque Larivaudière revient, méfiant, avec un agent de police, Lange prétend que Clairette et Pitou s’aiment et que l’auteur de la chanson est Pomponnet : il est aussitôt arrêté. Une conspiration contre la république devait se retrouver chez Lange : le bâtiment étant cerné, elle improvise un bal de noces qui déjoue les soupçons. Mais elle comprend que Pitou et Clairette s’aiment…
Acte III
Clairette n’a plus confiance en Pitou. Elle piège Pitou et Lange en les conviant à un faux rendez-vous galant dans une guinguette, auquel elle fait aussi venir Larivaudière pour tout lui révéler. Pomponnet évadé s’y retrouve par hasard. Après une grosse dispute, Clairette se réconcilie avec son amie, puis reconnaît le mérite de Pomponnet et lui accorde sa main. Pitou, lui, ne perd pas espoir…
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