Splendide Requiem de Verdi à l’Opéra de Marseille
Opéra de Marseille, dimanche 19 janvier 2025
Giuseppe Verdi, Messa da requiem
Michele Spotti, direction musicale
Angélique Boudeville, soprano ; Anna Goryachova, mezzo soprano ; Iván Ayón-Rivas, ténor ; Simon Lim, basse
Chœur et Orchestre Philharmonique de l’Opéra de Marseille
Florent Mayet, Chef de Chœur
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Le directeur de l’Opéra de Marseille Maurice Xiberras a décidemment eu le nez creux lorsqu’il a nommé, avec prise d’effet en début de saison dernière, le jeune Michele Spotti (né en 1993) directeur musical de l’Opéra et de l’Orchestre philharmonique de Marseille. Après sa première Norma en début de cette saison sur la scène phocéenne, c’est à nouveau une première pour le chef italien qui dirige, pour la première fois donc, ce monument du répertoire que constitue le Requiem de Verdi.
Et nous sommes, une fois encore, impressionnés par la maîtrise et l’intuition musicale de Michele Spotti, qui obtient un résultat bluffant de la part des forces musicales et chorales. Aux premières mesures d’une très grande douceur aux cordes, accompagnées du chœur pianissimo, succède le tonnerre du « Dies irae », avec deux paires de trompettes réparties en hauteur dans les loges d’avant-scène, comme pour la « Marche triomphale » dans Aida. Même au cours de ces moments de climax, les choristes placés en fond de plateau ne saturent pas en décibels, ménageant un agréable équilibre avec l’orchestre sur le plateau. Cette splendide qualité musicale ne se dément pas tout du long, avec des coups de chapeau à tirer aux différents solistes aux bois, ainsi qu’au somptueux tapis de cordes. L’intonation pourrait sans doute être plus parfaite à l’attaque des violoncelles pour l’Offertoire – entame toujours très difficile après une très brève pause entre les deux parties de l’ouvrage – mais l’ensemble se met très rapidement dans le bon ton. On apprécie aussi plus tard les pizzicati bien marqués par les contrebasses pendant le lugubre trio « Lux æterna » entre mezzo, ténor et basse.
Le plateau de solistes est équilibré et très satisfaisant, à commencer par Angélique Boudeville – lauréate Voix nouvelles en 2018, nommée aux Victoires de la musique en 2020, entendue à Gordes pour Sénanque avec Karine Deshayes en 2019, aux Chorégies en 2022, dans la Bohème à Marseille en 2020, aux Saisons de la Voix en 2020 – soprano dotée d’une musicalité précise et d’une puissance naturelle qui la fait passer au-dessus de ses collègues, sans avoir l’air de forcer. La première note d’attaque de « l’Agnus Dei » sonne un peu fébrile, mais son « Libera me » final impressionne, aux aigus particulièrement vaillants. Très précise de ton également, la mezzo-soprano Anna Goryachova ne dispose pas de la même ampleur, en particulier dans la moitié inférieure du registre, parfois couverte par l’orchestre. Le style est cependant bien en phase avec le Requiem, qui met une dose de drame au texte énoncé.
Le ténor Iván Ayón-Rivas s’épanouit dans un timbre émis dans le masque, mais sans nasalités désagréables. Son « Ingemisco », parmi les plus beaux « airs d’opéra » du répertoire verdien, est une belle séquence, aux aigus projetés avec solidité. La basse Simon Lim complète, qui dispose de graves profonds. Certaines notes prises par-dessous renforcent l’aspect sépulcral des passages correspondants.
Autre protagoniste, et non des moindres, le Chœur de l’Opéra de Marseille préparé par Florent Mayet fait un sans-faute dans cet opus pourtant hérissé de difficultés. Par exemple le « Sanctus » en double chœur, ou encore l’ensemble des passages a cappella sont techniquement bien au point.
Après les derniers mots « Libera me » du chœur sur la même note, puis un silence respectueux de plusieurs secondes, la salle éclate dans un tonnerre d’applaudissements. Le concert a heureusement été enregistré et sera diffusé sur Radio Classique le dimanche 9 février à 20h00.
F.J. & I.F. Photos Christian Dresse
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