Festival Durance-Luberon. Cour d’Honneur du Château-Mairie de Peyrolles (19 août 2020)
Rigoletto, Giuseppe Verdi. Vladik Polionov, piano et mise en scène
Kristian Paul (Rigoletto) ; Amélie Robins (Gilda) ; Rémy Poulakis (Il Duca di Mantova) ; Florent Leroux Roche (Sparafucile) ; Juan Antonio Nogueira (Borsa) ; Marie Pons (Maddalena) ; Patrick Agard (Monterone) ; Mickaël Piccone (Marullo)
Dans le strict respect des consignes sanitaires, le Festival Durance-Luberon a mené à bien sa 23e édition en cet été 2020. La version piano de Rigoletto, avec, à l’affiche, des artistes que nous suivons régulièrement sur d’autres scènes opératiques de la région, a offert une belle soirée dans un lieu patrimonial à sa mesure.
Le Festival Durance Luberon en est à sa 23ème édition, et propose une affiche diversifiée de spectacles accueillis en itinérance dans des lieux absolument somptueux. C’est ainsi que la Cour d’Honneur du Château-Mairie de Peyrolles reçoit l’opéra Rigoletto de Verdi dans une version d’accompagnement au piano, le spectacle étant repris deux jours plus tard pour une seconde représentation à La Tour-d’Aigues. Il faut ici saluer la ténacité des organisateurs qui ont maintenu le festival, quand tant d’autres ont tout annulé depuis plusieurs mois (Aix-en-Provence, Orange, Montpellier, …). Les contraintes liées à la crise sanitaire du Covid-19 ne sont toutefois pas oubliées ce soir : demande à la porte d’entrée d’un contact téléphonique en cas de besoin de traçabilité, port du masque obligatoire lors des déplacements et recommandation de le conserver pendant le spectacle.
Avant le démarrage de l’opéra proprement dit, c’est le maître d’œuvre de la soirée, Vladik Polionov, chargé de l’accompagnement musical au piano et de la mise en scène, qui présente l’intrigue au public, dans un vocabulaire actualisé, adapté à notre XXIème siècle. La représentation se déroule sur un podium et les éléments scéniques sont à la fois simples et lisibles : Rigoletto enfile ses habits de bouffon pendant les mesures d’ouverture, un fauteuil confortable caractérise le palais du Duc de Mantoue, un banc suffit aux duos ultérieurs entre le Duc et Gilda, puis Gilda et son père Rigoletto. La topologie des lieux permet de belles images, Gilda qui apparaît pour la première fois à la fenêtre centrale du premier étage, c’est là aussi que viendra se reposer le Duc au dernier acte, avec l’agréable compagnie de Maddalena.
Dans le rôle-titre, Kristian Paul fait une bonne première impression, une voix robuste bien projetée et accompagnée d’un vibrato mesuré. Il sera toutefois sujet à quelques temps plus faibles par la suite, en particulier certains relâchements de l’intonation et de la stabilité, les passages agités (par exemple « Cortigiani vil razza dannata » à l’acte 2) le montrant plus à l’aise que les séquences où la voix doit s’alléger (« Miei signori, perdono » qui suit). Le ténor Rémy Poulakis en Duc de Mantoue fait entendre un timbre émis dans le masque qui ne séduit pas immédiatement, mais on apprécie son style soigné, un élégant legato sur le souffle. Il négocie en tout cas avec un certain brillant tous les aigus qui émaillent ses airs, depuis « Questa o quella » jusqu’à « La donna è mobile ».
Parmi les trois rôles principaux, Amélie Robins en Gilda est celle dont la carrière est la plus développée à ce jour ; on se souvient en particulier de sa très belle prestation à Nice au printemps 2019 dans The Rake’s progress de Stravinsky. Ce soir, la musicalité est impeccable, les aigus faciles, même si la position allongée sur le banc à la fin de son grand air « Caro nome » au premier acte ne lui facilite pas la tâche ! Elle dégage par ailleurs une émotion palpable à la conclusion de l’ouvrage, lorsqu’elle se sacrifie pour le Duc.
La basse Florent Leroux Roche (Sparafucile) fait aussi entendre une voix de belle qualité, homogène sur toute l’étendue et solidement timbrée, un grave profond correctement exprimé. Autre rôle d’importance, la Maddalena de Marie Pons est à la fois séductrice et bien chantante, une voix saine et agréable, à la puissance mesurée, où l’on entend un tout petit voile sur le registre le plus aigu.
La distribution vocale, complétée par Juan Antonio Nogueira (Borsa), Patrick Agard (Monterone), Mickaël Piccone (Marullo), est donc accompagnée par le piano de Vladik Polionov, celui-ci animant avec énergie la partition. On détecte une petite panne passagère dans le final du duo de la Vendetta – quelques mesures doivent être reprises ! – mais il faut saluer le tour de force de l’ensemble de l’équipe artistique : à l’exception des passages avec chœurs, la partition complète de Rigoletto a été jouée à Peyrolles, pour une soirée de deux heures de musique. (F.J. Photos I.F.)
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