S’il suffit de la foi pour déplacer les montagnes, et d’une conviction chevillée au corps pour maintenir une programmation en ces temps incertains, alors Raymond Duffaut, président des Saisons de la Voix de Gordes, est l’homme idoine.
A travers annulations, reports, depuis un an il garde l’espoir envers et contre tout… Il a ainsi fait imprimer il y a quelques semaines sa plaquette 2021. Et en ce 15 avril 2021 il a toujours la voix vibrante d’enthousiasme.
-Raymond Duffaut, présentez-nous les grandes dates de votre programmation 2021 ; tout d’abord, que devient votre double concert de printemps ?
-C’est un très beau programme, que dire d’autre ? Nous devions accueillir, en concert de printemps, celui qui nous avions déjà dû reporter l’année dernière, « Une jeunesse à Paris », dédoublé entre Apt (jeudi 13 mai, 19h) et Eygalières (vendredi 14 mai, 19h), toujours en partenariat avec les Musicales du Luberon de Patrick Canac, autour de la soprano Marie Perbost. Néanmoins les incertitudes liées à la pandémie nous ont amenés à libérer la jeune artiste avant même de connaître les dernières directives officielles, pour lui permettre de répondre à une proposition d’enregistrement aux mêmes dates. Le nouveau report de ce double concert est fixé à la fin de la saison prochaine, aux 18 et 19 juin 2022.
-On enchaînera assez vite avec des masterclass, et le concert de printemps ?
–Dès les premiers jours de juin (du vendredi 4 au dimanche 6 juin), les journées de masterclass se dérouleront quoi qu’il arrive, avec ou sans public, même si le huis clos est toujours regrettable. Sous la direction artistique de Susan Manoff bien connue, on retrouvera les lauréats du Concours international qui s’était tenu en septembre dernier. Ces journées sont traditionnellement prolongées par un concert, qui aura lieu le dimanche 6 juin à 18h, ou qui sera reporté début juillet si les masterclass ont dû se tenir à huis clos. Comme d’habitude, le programme en sera déterminé en fonction du travail qui aura été mené pendant les masterclass.
-Vous vous inscrivez aussi dans le calendrier de la fête de la musique ?
-Nous avons reporté à cette année le concert prévu dans le même cadre en 2020. « Le soleil de Naples » est conçu comme un concert populaire, une soirée ensoleillée et festive, avec trois ténors italiens. Et à un tarif préférentiel unique de 10€, et la gratuité pour les moins de 18 ans.
-Et pour l’été, vous nous préparez toujours des moments forts.
-Nous aurons en effet, le 18 juillet – ou le lendemain en cas de mauvais temps -, trois des plus belles voix de la nouvelle génération, qui interprèteront les plus beaux airs et duos des Pêcheurs de perles et de Carmen. Jérôme Boutillier est un très bon baryton, de la génération d’après Florian Sempey et aussi prometteur. Julien Dran, nous le suivons depuis des années et sa carrière n’a fait que s’épanouir. Quant à Vannina Santoni, nous avons grand plaisir à la voir revenir ; elle avait participé à la toute première édition de Pop the Opera des Chorégies (Raymond Duffaut a été directeur des Chorégies d’Orange de 1981 à 2017, NDLR), une initiative qui ne portait pas encore ce nom, mais un projet pédagogique qui avait réuni 500 à 600 collégiens autour d’une œuvre lyrique ; un travail qui permettait à tous les élèves, même les plus timides, de prendre de l’assurance et de s’ouvrir d’une autre façon ; un travail dont ils gardaient un souvenir fort et durable. C’est dans ce type de projet, avec l’Orchestre d’Avignon, que nous avions reçu des jeunes artistes comme Albane Carrère ou Vannina Santoni, qui étaient à l’époque totalement inconnues. Je me souviens d’ailleurs que ce concert au théâtre antique s’était déroulé dans un froid glacial.
-Aux Saisons de la Voix, dont vous avez accepté de prendre la présidence en 2017, vous avez inauguré, en 2019 je crois, un second concert estival.
-Cette année ce sera une première collaboration avec le Festival de Quatuors à Cordes du Luberon, que vous connaissez. Le 16 août – ou report éventuel le lendemain -, le Quatuor Zaïde, d’ailleurs directeur artistique du Festival de Quatuors, présentera une création, « No(s) dames » ; cette soirée s’inscrit dans le projet d’un vrai spectacle, en co-réalisation, et destiné à tourner ; la tournée prévue au Havre et Limoges en décembre 2020 a évidemment été annulée, de même qu’à Toulon en avril 2021. C’est donc à Gordes que se fera la création. Le spectacle est organisé autour de divas, dans une vision inattendue, déjantée, déstructurée, avec Théophile Alexandre, contre-ténor et danseur, et personnage principal. Nous comptons aussi sur le talent de Pierre-Emmanuel Rousseau, metteur en scène, qui ne proposera pas de décors pour Gordes, mais qui jouera de vidéos sur le mur de rocher, et qui envisage aussi des costumes de toute beauté.
-Les femmes dans l’opéra, voilà un sujet très classique, et de plus en plus…
-Justement, le sujet sera évoqué avant le concert, en début de soirée, au cours d’une table ronde sur « l’Opéra sans la défaite des femmes », avec deux artistes du Quatuor Zaïde, avec le producteur du spectacle, et en modératrice Arielle Buteaux, qui a beaucoup travaillé sur France-Musique.
-Et quand viendra l’automne on retrouvera le concours de la mélodie.
–Les 4 et 5 septembre ce sera la 13e édition du Concours international de la mélodie de Gordes, créé par Monic Cecconi-Botella, qui est toujours présente dans toutes ces manifestations de l’association des Saisons de la Voix dont elle a été la première pierre. Le Concours annuel est toujours placé sous la présidence de voix prestigieuses : après Karine Deshayes puis Sophie Koch, et avant Béatrice Uria-Monzon, pressentie en 2020 mais programmée pour 2022 parce qu’indisponible cette année, c’est Véronique Gens, une très grande mélodiste, qui présidera cette édition 2021. A côté des solistes chant, nous avons ouvert également depuis quelques années le concours aux duos piano-chant. Les prix attribués aux lauréats sont de plus en plus larges : un concert offert par l’Opéra d’Avignon, par Montpellier, par les Saisons, par les Musicales du Luberon, par les Concerts au coucher du soleil à Oppède… mais aussi une émission sur France-Musique, des échos sur Radio-classique ; sans oublier les prix offerts par la Ville de Gordes, le Département, peut-être la Région.
-Le concert d’automne ensuite ne se fera pas attendre…
–Le dimanche 26 septembre, nous recevrons Maud Bessard-Morandas, accompagnée de la pianiste Ayaka Niwano, dans un programme « Femmes de caractère ». Nous avions invité la jeune chanteuse, multi-lauréate du Concours 2020, pour le concert du Bout-de-l’An puis pour la Saint-Valentin, avec à chaque fois des programmes adaptés à la circonstance ; mais la situation sanitaire nous a contraints à reporter puis annuler. Nous comptons bien sur ce concert d’automne…
-Et pour terminer l’année ?
–Nous aurons le concert du Bout-de-l’An, organisé avec les lauréats du concours de la mélodie de Gordes 2021. L’année dernière, nous avions enregistré le chiffre record de 80 candidatures, venues de divers pays ; nous en attendons au moins autant ; on peut s’inscrire jusqu’en juin.
-Ne craignez-vous pas que la situation n’ait émoussé les enthousiasmes, et que les candidats soient peu nombreux ?
–Pas du tout. Les artistes ont besoin, ont envie de se produire. Et divers concours ont dû être annulés, ce qui est terrible pour ces jeunes qui ne peuvent se faire connaître. Nous mettons donc toutes nos espérances dans ce concours 2021.
Propos recueillis par G.ad. le 15 avril 2021. Photos G.ad.
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