Lundi 14 juillet 2025, Festival d’Aix-en-Provence au Théâtre du Jeu de Paume
The Nine Jewelled Deer, de Sivan Eldar et Ganavya Doraiswamy
Direction musicale, Sivan Eldar. Mise en scène, Peter Sellars. Artiste plasticienne, Julie Mehretu. Costumes, Camille Assaf. Lumière, James F. Ingalls. Assistant à la direction musicale, Kunal Lahiry. Assistante et assistant à la mise en scène, Elizabeth Ayer, Antonio Cuenca Ruiz. Diffusion sonore IRCAM, Luca Bagnoli
Voix, Ganavya Doraiswamy. Voix, Aruna Sairam. Violon et Alto, Nurit Stark. Violoncelle, Sonia Wieder-Atherton. Clarinette, Dana Barak. Saxophone, Hayden Chisholm. Percussion, Rajna Swaminathan. Électronique-IRCAM, Augustin Muller
The Nine Jewelled Deer (La Biche aux Neuf Bijoux) au Festival d’Aix-en-Provence : vraiment pas du… Labiche !
The Nine Jewelled Deer est placé, sur l’affiche officielle du Festival d’Aix-en-Provence édition 2025, dans la catégorie « opéra », entre La Calisto de Cavalli et The story of Billy Budd de Britten. Et pourtant, on est tout de même très loin d’un ouvrage lyrique au bilan de cette création mondiale de de Sivan Eldar (1985) et Ganavya Doraiswamy (1991), mélange, ou plutôt alternance, de musique indienne traditionnelle et de composition actuelle à composante électronique. Le spectacle de presque deux heures, qu’on trouve par moments assez interminables, serait davantage à classer au rayon « avant-garde » ou « en marge », comme il est d’ordinaire d’usage, ne serait-ce qu’en forme d’avertissement au public.
L’intention est pourtant excellente, qui part d’un Jātaka, c’est-à-dire un conte, parmi les 500 écrits au Vème siècle, qui narrent les vies et diverses incarnations de Bouddha. Celui de La Biche aux Neuf Bijoux nous raconte l’histoire d’un homme sauvé de la noyade par une biche. Celle-ci lui demande alors de ne pas révéler son existence, mais l’homme brise sa promesse et conduit le roi, sur demande de la reine, afin de piéger l’animal. Touché par la générosité de l’animal, le roi gracie la biche et l’amène dans son palais. Telle que la présente le metteur en scène dans son avant-propos, la noyade est l’image de notre monde qui sombre dans les flots de la cruauté et l’avidité, alors que cet heureux dénouement est une forme « d’endroit calme où se reposer et se ressourcer ».
Ce message de paix se dilue toutefois au cours de la représentation où alternent les deux chanteuses Ganavya Doraiswamy et Aruna Sairam. On commence avec l’énumération des neuf pierres précieuses (Diamant, Saphir, Rubis, Emeraude, …) et autant de changements correspondants de couleurs de lumières, tandis que le public est invité à chanter les nombreuses reprises du court refrain. Un long dialogue entre une chanteuse et le saxophone prend ensuite le relais, l’adjectif « long » pouvant s’appliquer à la majorité des séquences qui suivent, duo entre chanteuse et violoncelle, ou bien violon, solo de violoncelle, ou encore de tambour. On apprécie pleinement certains passages chantés, en particulier la voix d’Aruna Sairam aux longues modulations et grands intervalles. Mais les longueurs, du moins ressenties pour ce qui nous concerne, ainsi que le manque de progression dans une intrigue qui est tout juste suggérée, nous font malheureusement décrocher assez rapidement.
Le travail de mise en scène nous semble aussi significativement limité, par exemple très peu de jeu d’acteurs lorsqu’une chanteuse intervient pendant dix minutes face à un musicien, ou bien qu’un groupe d’instrumentistes joue, assis à terre. Les panneaux transparents de Julie Mehretu décorent légèrement un plateau qui relève, le plus généralement, d’un grand dépouillement. Hormis les chansons traditionnelles indiennes, la musique composée ne bouleverse pas nos oreilles, entre très mince filet de notes au violon ou violoncelle et saxophone violent comme un concert de klaxon. Une musique qu’on pourrait qualifier d’expérimentale, et sans doute destinée à des amateurs plus éclairés que nous sommes. Mais il faut tout de même saluer sans retenue le formidable travail et l’engagement constant de l’ensemble des musiciens, qui accompagnent les deux chanteuses émérites.
I.F. & F.J. © Ruth Walz
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