Un vibrant cri d’alarme viscéral !
Théâtre du train bleu – la Respélid – Jardins de l’ancien Carmel,10h20, 1h15. Du 5 au 24 juillet, relâche les 11 et 18 juillet
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Charles Culot et Pauline Mourreau portent sur scène la parole qu’ils ont recueillie auprès d’un peu plus d’une centaine d’agriculteurs depuis des années. Entrecoupé d’extraits d’interviews projetés sur un grand écran, ils nous interpellent avec des constats déchirants mais d’une très grande lucidité : « Le monde agricole est comme le miroir du fonctionnement d’une vie en société, or ce système agricole ne fonctionne plus … » nous disent-ils. La détresse du milieu agricole nous est montrée dans sa complexité et ses contradictions : modèle intensif ou conventionnel ?, le problème des quotas, l’endettement, les activités quotidiennes sans temps mort, l’absence de repreneur, le système des primes, la PAC, les intrants chimiques …
Nos agriculteurs jouent un rôle essentiel : ils nourrissent l’humanité. Et pourtant, à cause du modèle agricole imposé, non seulement ils ne parviennent plus à vivre de leur travail, mais encore ils sont aux mains de grandes FTN dont l’intérêt du consommateur est le dernier des soucis…
Ce spectacle a pour vocation d’exposer sans filtre ce que vivent les agriculteurs et leurs malaises. Charles Culot, l’auteur et co-fondateur de la Compagnie Adoc (voir aussi Urgence, notre compte rendu), l’incarne avec ses tripes de façon tellement personnelle (son père et son frère sont agriculteurs) et engagée que sa performance en est éblouissante ! Avec Pauline Mourreau, dont le jeu est tout en émotion et délicatesse, ils sont des porte-parole précieux et empreints d’humanité pour représenter tous ces agriculteurs et agricultrices qui se trouvent derrière nos assiettes. La mise en scène (d’Alexis Garcia) est sans artifices mais évoque des moments très réels de la vie des agriculteurs (les comptes, les champs, les manifestations, les gestes extrêmes…) en alternance avec des scènes poétiques : c’est un théâtre à l’état brut qui se révèle très efficace et parlant. Une interprétation tout en délicatesse et en émotion mais aussi respect pour ces hommes et femmes.
De surcroît, si nous recevons violemment (à juste titre) la première partie de ce spectacle, la deuxième partie est systématiquement consacrée à un bord de scène avec le public en présence d’un professionnel (dans notre cas, un chercheur à l’INRAE), ainsi la tonalité était heureusement moins pessimiste. Nous avons des ressources et des solutions (exposées par les professionnels comme le public) pour mener une véritable révolution dans l’exploitation agricole mais aussi notre manière de consommer, et l’échange permet vraiment de mettre en valeur des initiatives positives et des perspectives d’espoir, sans pour autant être inaccessibles. Et c’est bien le message que retiendra une jeune fille de 14 ans, présente lors de la représentation et qui demandait au chercheur s’il était raisonnable qu’elle se lance dans ce métier si elle n’avait ni terre ni héritage.
Créé en 2011, ce spectacle (dont c’est la 12e version et l’Acte 2) est vraiment d’utilité générale : chacun devrait le voir afin de reconsidérer son rôle dans le monde actuel et (re)devenir acteur de ses choix et des idées qu’il veut défendre… à condition de le vouloir !
Quel avenir pour l’agriculture ? Comment voulons-nous nourrir nos enfants ?
Le théâtre revient à sa vocation humaine et pédagogique grâce à la compagnie Adoc, une compagnie belge d’un théâtre résolument militant, documenté et engagé dont notre monde a bien besoin ! Revenons à une agriculture agroécologique, relocalisée et rémunératrice.
Christèle. Photo Luna Bills
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