Happy birthday Monsieur William Christie !
Samedi 15 février 2025, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence
William Christie, direction musicale. Ana Vieira Leite, soprano. Juliette Mey, mezzo-soprano. Rebecca Leggett, mezzo-soprano. Bastien Rimondi, ténor. Richard Pittsinger, ténor. Matthieu Walendzik, baryton
Choeur et orchestre des Arts Florissants
Extraits d’opéras : Marc-Antoine Charpentier, Médée. Jean-Baptiste Lully, Atys. Jean-Philippe Rameau : Pygmalion, Les Fêtes d’Hébé, Platée, Hippolyte et Aricie, Les Indes galantes
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Le chef franco-américain William Christie est né le 19 décembre 1944 à Buffalo, dans l’Etat de New-York aux Etats-Unis. Il s’installait en France en 1971, fondait l’ensemble de musique baroque Les Arts Florissants en 1979, montait Atys de Lully à l’Opéra-Comique en 1987 et obtenait la nationalité française en 1995. Toutes ces dates font partie désormais de l’histoire de la musique et l’on ne dira jamais assez la chance que nous avons eue en France d’avoir Monsieur Christie, qui a tant fait pour le répertoire baroque, a suscité tant de vocations et fait naître tant d’autres formations, entre autres Les Musiciens du Louvre, Les Talens lyriques, Le Concert Spirituel…
William Christie – « Bill » pour les intimes – est donc né le 19 décembre 1944 et l’Opéra Comique organisait le 19 décembre dernier à Paris un concert pour marquer son 80ème anniversaire. Ce programme voyage depuis lors à l’occasion d’une tournée mondiale, qui fait étape ce 15 février au Grand Théâtre de Provence. Le concert fait enchaîner des extraits d’opéras de trois compositeurs très emblématiques du répertoire baroque et chers au chef d’orchestre et claveciniste : Marc-Antoine Charpentier, Jean-Baptiste Lully et Jean-Philippe Rameau.
On commence donc avec Marc-Antoine Charpentier, compositeur particulièrement aimé de William Christie, d’ailleurs, et peut-être avant tout, le compositeur de l’opéra Les Arts florissants. On se souvient à ce sujet de la production de David et Jonathas programmée en 2012 au Festival d’Aix-en-Provence. Lors d’une interview que nous avions faite du directeur de la manifestation Bernard Foccroulle, celui-ci nous indiquait son souhait d’inviter le chef franco-américain. William Christie avait accepté à la condition exclusive de diriger Charpentier, le choix s’étant alors porté sur David et Jonathas.
C’est Médée ce soir qui est à l’affiche, chantée par la mezzo Rebecca Leggett d’une voix séduisante et plutôt ronde, en particulier pour interpréter son air le plus connu « Quel prix de mon amour ». Même en petite formation de 14 musiciens, y compris William Christie au clavecin, parfois à l’orgue, et Thomas Dunford au luth, Les Arts Florissants sont bien la Rolls Royce des ensembles baroques, au son naturel et affirmé, n’hésitant pas à mettre un mordant particulier pour marquer un contour davantage dramatique à un passage… l’histoire de Médée n’en manque pas !
On passe ensuite à Lully et son fameux Atys, dont les représentations de 1987 à l’Opéra-Comique ont véritablement marqué l’histoire de la Renaissance du répertoire baroque, avec Jean-Marie Villégier pour la partie visuelle et William Christie pour la musique. Ceci à tel point qu’un riche mécène fut à l’origine de la reprise de cet Atys, en 2011 toujours à l’Opéra Comique, impliquant une fabrication de nouveaux décors, à l’identique de ceux de 1987.
Ce soir de février 2025, les deux ténors Bastien Rimondi et Richard Pittsinger, ainsi que le baryton Matthieu Walendzik nous apportent un calme serein dans « Dormons tous », la « Musique du sommeil d’Atys ». Les face-à-face du quatrième acte entre Sangaride et Atys sont aussi de beaux moments, elle Ana Vieira Leite, soprano musicale et lui Bastien Rimondi, ténor élégiaque.
Mais c’est Jean-Philippe Rameau qui se taille la part du lion, entre parties orchestrales et chantées, un Rameau qui balance régulièrement entre plénitude musicale des passages lents et une vivacité, parfois espiègle, des sections plus agitées. Dans l’extrait de Pygmalion « Règne, Amour », Bastien Rimondi fait preuve d’une grande souplesse pour passer les traits d’agilité particulièrement véloces. Dans Les Fêtes d’Hébé, Juliette Mey fait entendre une très jolie voix, d’une extrême douceur pour les séquences enchanteresses.
On change d’ambiance avec l’air de La Folie « Formons les plus brillants concerts », extrait de Platée. Sans nous faire oublier nos souvenirs les plus fous de Mireille Delunsch ou plus récemment Julie Fuchs entendues dans la formidable production de Laurent Pelly au Palais Garnier à Paris, Ana Vieira Leite y montre un bel abattage en chantant en même temps qu’elle joue.
En Thésée dans Hippolyte et Aricie, Matthieu Walendzik projette bien dans sa tessiture de baryton et a logiquement un peu plus de mal à faire entendre les notes les plus graves. Il fait ensuite face à la Zima d’Ana Vieira Leite dans Les Indes galantes, en concluant par le rondeau « Forêts paisibles », jubilatoire comme toujours, même sans tambour ce soir.
« Tendres amours » des mêmes Indes galantes est donné en bis, avant une surprise d’anniversaire : la soprano britannique Sophie Daneman rejoint les artistes sur le plateau. Elle dit au public que sa participation à la production de Castor et Pollux en 1991 au Festival d’Aix-en-Provence, direction de William Christie et mise en scène de Pier Luigi Pizzi, avait complètement changé sa vie d’artiste. Elle chante l’air « Angels, ever bright and fair » de l’oratorio Theodora de Händel, un moment en suspension où les derniers mots « Take, oh take me to your care » résonnent avec grande émotion. Une émotion partagée par William Christie qui prend la parole : « La musique est parmi la plus belle des amitiés »… A très vite Monsieur Christie !
I.F. & F.J. Photos I.F.
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