La Dame de Pique, opéra de Piotr Ilitch Tchaïkovski. Opéra de Toulon (03-05-2022)
Direction musicale, Jurjen Hempel. Mise en scène, Olivier Py. Réalisation de la mise en scène & chorégraphie, Daniel Izzo. Décors & costumes, Pierre-André Weitz. Lumières, Bertrand Killy
Marie-Ange Todorovitch (La Comtesse), Karine Babajanyan (Lisa), Fleur Barron (Pauline/ Milovsor), Nona Javakhidze (La gouvernante /Macha), Anne-Marie Calloni (Prilepa), Aaron Cawley (Hermann), Alik Abdukayumov (Le Comte Tomski/ Plutus/ Zlatogor), Serban Vasile (Le Prince Yeleski), Artavazd Sargsyan (Tchekalinski), Nika Guliashvili (Sourine), Christophe Poncet de Solages (Le Maître de cérémonies/ Tchaplitski), Guy Bonfiglio (Narumov)
Danseurs : Jackson Carroll, Fabio Prieto Bonilla, Gleb Lyamenkov
Orchestre de l’Opéra de Toulon
Orchestre National Avignon Provence
Chœurs de l’Opéra de Toulon et de l’Opéra Grand Avignon
La Région Sud était à l’initiative du nouveau spectacle imaginé par Olivier Py, monté en coproduction avec les opéras de Toulon, Marseille et Avignon. Et c’est la scène niçoise qui dévoilait la première cette réalisation début mars 2020… soit quelques jours avant le premier confinement lié à la crise du Covid-19. Dès lors, le bel ordonnancement prévu (dans l’ordre Toulon, Marseille et Avignon à la suite de Nice) était totalement chamboulé, Marseille ouvrant sa saison 2020-2021 avec ce titre, mais en représentation de concert pour un piano et huit musiciens, distanciation sociale oblige…
C’est donc un grand plaisir de retrouver à la fois la « vie d’avant » et ce spectacle dans son entièreté à l’Opéra de Toulon, trois semaines avant les deux représentations programmées à l’Opéra Grand Avignon. Comme dans de très nombreuses productions de Py, les décors et costumes de son habituel collaborateur Pierre-André Weitz en imposent, ce soir une grande façade composée d’alignements de portes-fenêtres aux vitres cassées, sur trois niveaux. Une petite scène est disponible à mi-hauteur du plateau, où se déroulent actions et petites saynètes, souvent animées par un danseur omniprésent. C’est aussi là que la Comtesse va se coucher après son grand air, tandis qu’Hermann reste caché sous le lit avant de tenter de découvrir le secret des trois cartes. Le décor est sombre et noir comme la nouvelle d’Alexandre Pouchkine, les choristes réunis des Opéras de Toulon et Avignon se répartissant pour leurs interventions dans les étages, ou bien venant se placer au rez-de-chaussée sur le plateau.
La distribution vocale amène de belles satisfactions, à commencer par Aaron Cawley dans le redoutable rôle d’Hermann, le ténor faisant valoir quelques aigus éclatants, occasionnellement à la limite de les forcer et compromettre l’intonation de séquences plus douces qui suivent. Déjà présent à Nice, le baryton Serban Vasile interprète le Prince Yeletski avec un somptueux grain vocal et un souffle long. Le ténor Artavazd Sargsyan (Tchekalinski) et les voix graves, profondes et de couleur slave d’Alik Abdukayumov (Tomski, Zlatogor) et Nika Guliashvili (Sourine) sont également magnifiques.
Côté féminin, le rôle principal de Lisa défendu par Karine Babajanyan ne mène malheureusement pas au même bonheur : si la musicalité reste appréciable, le timbre n’est que peu séduisant, et certains aigus passent à l’arraché. La voix de la mezzo Fleur Barron (Pauline/Milovsor), instrument riche et profond, est en revanche d’une beauté renversante. Enchaînant avec ses prestations niçoises et marseillaises, Marie-Ange Todorovitch confirme que le rôle de la Comtesse lui va idéalement. Nona Javakhidze (Gouvernante) et Anne Calloni (Prilepa, Macha) complètent agréablement l’affiche.
Un grand merci enfin au chef Jurjen Hempel qui parvient à magnifier cette géniale partition et maintenir la coordination de l’ensemble. Ceci malgré le gigantisme des décors, avec des choristes parfois très éloignés, et quelques musiciens par ailleurs relégués dans les loges d’avant-scène (harpe, piano, percussions).
I.F. Photo Frédéric Stéphan
Laisser un commentaire