Un Così fan tutte vintage et débridé à l’opéra de Toulon
Cosi fan tutte, opéra de Wolfgang Amadeus Mozart, à l’Opéra de Toulon, vendredi 27 janvier 2023
Karel Deseure (Direction musicale) ; Christophe Gayral (Mise en scène) ; Mathieu Lorry-Dupuy (Décors) ; Frédéric Llinares (Costumes) ; Marie-Christine Soma (Lumières) ; Romain Portolan (Réalisation des lumières)
Barbara Kits (Fiordiligi) ; Marion Lebègue (Dorabella) ; Pauline Courtin (Despina) ; Vincenzo Nizzardo (Guglielmo) ; Dave Monaco (Ferrando) ; David Bižić (Don Alfonso)
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Toulon
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L’Opéra de Toulon reprend la mise en scène de Christophe Gayral, créée à l’Opéra de Saint-Etienne, et qui maintient un jeu des acteurs dense et naturel tout au long de l’opus mozartien. Le décor unique de Mathieu Lorry-Dupuy est l’intérieur d’une riche villa, dont la vue imprenable donne sur la baie de Naples du livret de Lorenzo da Ponte. Le vaste salon très design années 1970, est composé de deux étages, un escalier en colimaçon desservant une coursive à l’étage et les portes des chambres.
Les costumes de Frédéric Llinares évoquent bien ces années-là, surtout lorsque Guglielmo et Ferrando se déguisent en hippies pour tromper leurs amantes, avec bandeaux sur cheveux longs et vestes en peau à franges. Despina fume des joints très régulièrement et l’amour libre paraît être la règle, illustré par les trois hommes torse nu au cours d’un air de Despina, ou encore les trois jeunes femmes aux seins nus aux côtés de Don Alfonso. L’ambiance baba-cool culmine dans la scène finale du second acte pour la cérémonie de mariage : encens qui fume sur fond d’éléments de décors indiens, pancartes « Acid 10 francs » ou « Let it be », costumes Beatles époque Sgt. Pepper’s pour les deux jeunes futurs maris, le notaire (Despina déguisée) en gourou bouddhiste et les pétards qui tournent allègrement.
La distribution vocale est assez homogène, avec en tête la soprano Barbara Kits en Fiordiligi qui domine le plateau féminin, aux aigus faciles et épanouis, belle qualité de timbre et qui passe avec brio et justesse de ton les intervalles meurtriers écrits par Mozart (par exemple dans son dernier air « Per pietà »). La mezzo Marion Lebègue (Dorabella) gagne en séduction vocale dans la partie la plus aiguë de son registre, tandis que Despina est un rôle qui correspond bien aux caractéristiques de Pauline Courtin, voix plutôt pointue et actrice particulièrement généreuse.
Deux très bons titulaires côté masculin, d’abord David Bižić qui n’a pas exactement tous les graves naturels de Don Alfonso, mais s’impose par sa puissance et la qualité noble du timbre. Le ténor Dave Monaco est bien moins sonore mais compose un délicat, agile et musical Ferrando, au phrasé très élégant qui peut rappeler, notes émises dans le masque comprises, son aîné Juan Diego Florez. Vincenzo Nizzardo en Guglielmo est un baryton solide mais sans distinction particulière, qui fait entendre par instants quelques notes un peu fixes.
Les chœurs, qui participent peu dans cet ouvrage, s’expriment d’abord en coulisses, avant leur venue sur le plateau pour la cérémonie de mariage conclusive, arborant maquillages et costumes très colorés. Placé à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de Toulon, le chef Karel Deseure assure une direction qu’on qualifierait de mozartienne, insufflant énergie et relief à la partition. On détecte cependant plusieurs petits décalages, sur les départs en particulier, entre la musique en fosse et le chant des protagonistes sur scène.
I.F. Photos Frédéric Stephan
Un « Così fan tutte » vintage et débridé à l’opéra de Toulon
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