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Chefs : nos entretiens

De A à Z, tous les chefs que nous avons interviewés

Entretien avec Hervé Niquet, pour les « Amants magnifiques » (février 2017)

 

« Louis XIV dansait. Vous imaginez aujourd’hui François Hollande et ses ministres… ? »

Hervé Niquet est un homme sérieux, musicien talentueux, musicologue éminent, spécialiste reconnu d’un large répertoire français, connu ou plus confidentiel, du XVII au XXe siècles. C’est aussi un pince-sans-rire, qui peut du pupitre se retourner vers la salle et lancer au vol une plaisanterie (toujours élégante et fine…). Il livre aussi des chroniques désopilantes sur France-Musique (le jeudi à 8h55). Le voici à la baguette des Amants magnifiques, une grosse production de Molière/Lully qui n’avait pas été donnée en intégralité depuis 300 ans : 2h30 de spectacle, moitié pour spectacle opéra-ballet, moitié comédie parlée. Rencontre avec un homme-orchestre.

-La recréation des Amants magnifiques est un projet fou…

–Nous avons tous de grands projets. Cette comédie-ballet est un bijou, avec de multiples corps de métiers, une comédie musicale, une grosse usine. Même si nous restons en-deçà des effectifs originaux (49 artistes au lieu de 120, ndlr). Vous imaginez les charges sociales ? Ce n’est pas pour rien que le roi de France se ruinait pour la culture ! Mais c’est une œuvre géniale, il n’y a pas une note, pas une virgule à retirer ou à changer.

-Louis XIV souhaitait la danser, c’est donc un événement historique ?

–C’est l’apothéose de Lully, la dernière chorégraphie dansée par Louis XIV, un acte éminemment politique. Vous imaginez aujourd’hui François Hollande et ses ministres prenant ce risque ? Louis XIV s’est mis au-dessus de la nation, au niveau supérieur des arts ; il a pris le risque d’être critiquable, il s’est mis en péril. Un acte politique courageux.

-Vous animez par ailleurs une chronique hebdomadaire désopilante sur France-Musique ; une casquette d’humoriste ?

–Je n’en ai pas la prétention. On m’a simplement demandé de raconter l’arrière du décor ; depuis 40 ans que je fais ce métier, j’ai quelques histoires dans mes bagages. Je raconte que nos petits malheurs sont nos grands bonheurs. Vous savez, l’écriture, c’est beaucoup de travail, vous en savez quelque chose. Pour 3 minutes, il faut écrire, réécrire, corriger… J’ai fait beaucoup de radios en tant qu’interviewé ; passer de l’autre côté comme chroniqueur, c’est tout autre chose !

-Vos projets ?

–Le Concert Spirituel fête ses 30 ans. Dans quinze jours ce sera le démarrage de l’une de nos grosses créations, une Messe à 8 chœurs, d’Orazio Benevoli (XVIIe s., ndlr). L’argent qui nous est donné pour cet anniversaire, je le mets dans les concerts, car c’est le plus cadeau que je puisse faire à mes musiciens, que de les faire jouer le plus possible, et devant l’auditoire le plus large possible.

-Alice Piérot, votre 1er violon, dirige la Courroie à Entraigues. Vous-même avez des liens avec la région ?

–J’y ai fait quelques festivals, nous avons rencontré quelques succès au Festival d’Avignon, j’ai joué à l’opéra quelques concerts, comme le Devin du village. Une délicieuse maison, l’opéra d’Avignon. Et je connais bien Martin Stein, qui dirige la Mirande, le plus bel hôtel du monde. Un bout de mon cœur est à Avignon.

Propos recueillis par G.ad.

Hervé Niquet est un homme-orchestre, claveciniste, organiste, pianiste, chanteur (ténor), compositeur, chef de chœur et chef d’orchestre, et musicologue de surcroît, curieux et inventif. Son domaine, le répertoire français dont il est un spécialiste éminent, va du baroque au XXe siècle.

Pour le baroque, il a créé en 1987 le Concert Spirituel en 1987, faisant revivre le grand motet français et exhumant des œuvres françaises, anglaises et italiennes.

Pour la musique française des XIXe et XXe siècles, il a créé le Palazzetto Bru Zane à Venise. Celui-ci effectue pour l’époque moderne le même travail que le célèbre CMBV (Centre de Musique Baroque de Versailles) pour les XVII et XVIIIe siècles. L’Orap – comme toutes les formations – y a recours pour son répertoire de pièces récentes.

Hervé Niquet dirige chœurs, orchestres, festivals, CD.

Dans les productions opératiques, il collabore avec des metteurs en scène aussi divers que Georges Lavaudant, Gilles et Corinne Benizio (Shirley et Dino), Christoph Marthaler ou Romeo Castellucci.

Il s’implique beaucoup dans la transmission, tant pour les connaissances musicologiques les plus pointues, que dans les aspects les plus concrets du métier de musicien.

Hervé Niquet est Chevalier de l’Ordre National du Mérite et Officier des Arts et des Lettres.

Sébastien di Mayo en appelle à Roselyne Bachelot (8-1-2021)

La récente conférence de presse du Premier Ministre Jean Castex a encore douché les légitimes espoirs ce jeudi 7 janvier 2021, et Sébastien di Mayo nous confirme le lendemain que « les dernières annonces viennent encore renforcer notre situation de silence forcé, aucune visibilité n’étant réellement donnée pour ouvrir l’horizon de la culture ».

C’était le 3 janvier que Sébastien di Mayo avait alerté la ministre de la culture Roselyne Bachelot. Celle-ci a sur son bureau de nombreux dossiers, tous évidemment urgents, et l’on présume qu’elle souhaiterait les voir aboutir tous. Ce vendredi 8 janvier à 13h, on l’entendait sur France Inter évoquer les trois pôles de l’univers de la culture : les musées, le cinéma, le spectacle vivant ; repoussant encore sine die (pouvait-elle faire autrement ?) la possible réouverture générale, elle laissait entendre de surcroît que le troisième pôle serait le dernier à rouvrir ! Nous avons pointé plusieurs fois l’inutilité et l’injustice de cette fermeture quasi pérennisée.

Sébastien di Mayo, baryton-basse, dirige deux chœurs vauclusiens, Homilius à Avignon, Robert Grimaud à L’Isle-sur-la-Sorgue. Deux chœurs amateurs, mais de haut niveau, complices artistiques réguliers de plusieurs orchestres professionnels. Deux chœurs qui font rayonner la musique a capella en France mais aussi à l’étranger ; leur répertoire, partant d’Homilius le compositeur éponyme, s’avance jusqu’aux pièces les plus contemporaines, de Gjeilo notamment avec lequel le chef a tissé des liens privilégiés.

-Sébastien di Mayo, vous êtes habituellement un homme discret. Pourquoi cet appel à la ministre ?

–Avant tout pour exprimer notre profonde frustration. Nous n’avons pas de répétitions, donc aucune participation à la vie culturelle. Nous sommes totalement absents du paysage.

-En quoi la situation des chœurs amateurs diffère-t-elle profondément de celle des artistes professionnels ?

–Nous avons tous une autre activité professionnelle qui nous occupe en journée ce qui nous oblige à répéter le soir ; nous sommes donc pénalisés par le couvre-feu. Par ailleurs, un décret a permis la réouverture des écoles de musique, des cours de chant, des Conservatoires, mais tout cela ne concerne que les mineurs, sans aucune possibilité pour les adultes. Et nous n’avons aucun lieu de répétition. Ayant travaillé trois ans pour l’ARS à Avignon, j’ai personnellement vécu de plein fouet la pandémie, et il est impensable pour moi de ne pas respecter toutes les préconisations et les gestes-barrières.

-Comment  avez-vous vécu la pandémie ?

–Pendant le premier confinement, nous étions totalement à l’arrêt. Depuis septembre, nous avions pu reprendre, espacés dans une grande salle, et masqués même si cela n’était pas encore obligatoire ; nous avons même commandé à Nantes des masques spéciaux, qui atténuent moins le son ou du moins de façon plus homogène, et qui ne se collent pas sur la bouche. Il est donc tout à fait possible de chanter masqués, en répétition comme en concert.

-Dans de telles circonstances, que projetez-vous ?

–Tant qu’on a pu répéter, on s’est préparés ; comme l’Orchestre National Avignon-Provence et l’Opéra Grand Avignon l’ont fait avec succès, on envisagerait une répétition dans les conditions de concert, en tenue, avec captation vidéo à publier sur notre page Facebook. Nous souhaiterions avoir une visibilité, participer à la vie culturelle, comme nous le faisons habituellement toute l’année.

-Pouvez-vous déjà envisager un calendrier ?

–Nous pensons à deux concerts d’ici la fin de la saison, sans doute en mars et en juin. Le premier, dans le temps de la Passion et comme notre répertoire tourne surtout autour de la musique sacrée, s’inspirerait du concert que nous devons donner à ce moment-là ; dans le cadre de la saison de Musique Sacrée/Orgue en Avignon, avec Luc Antonini à l’orgue pour le continuo, et les Solistes d’Avignon (un quatuor à cordes issu de l’Orchestre National Avignon-Provence, formation avec laquelle Homilius se produit régulièrement, NDLR), nous devons donner le très beau Stabat Mater de Caldara pour cordes et orgue ; nous envisagerions aussi Zelenka, et en entrée une pièce de Thomas Morley, « Je suis la Résurrection et la Vie », une œuvre pleine d’espoir avant de plonger dans le drame de la Passion. En juin ce serait un programme plus contemporain, avec notamment Arvo Pärt (compositeur estonien né en 1935, NDLR), ou Ola Gjeilo (prononc. « iélo », compositeur norvégien né en 1978, NDLR). Nous avons déjà les outils techniques : un site, sur lequel on trouve déjà des extraits de nos concerts, et une page Facebook ; certaines de nos pièces sont accessibles sur YouTube, et nous avons aussi un technicien prêt à réaliser la captation. Nous voudrions simplement que soient accordées aux chœurs amateurs comme nous, les conditions permettant de préparer et d’enregistrer des prestations de qualité.

Propos recueillis par G.ad. Photos Eric Niogret (1 & 2), Sébastien di Mayo (3).

La lettre de Sébastien di Mayo à la Ministre Roselyne Bachelot (3 janvier 2021)

Madame la Ministre de la Culture,

Notre pays traverse une crise sanitaire sans précédent, qui a des répercussions sur notre société, mais dont toutes les conséquences n’ont pas encore été mesurées ni même « imaginées ».

Le monde de la culture souffre de cette crise, du quasi-silence imposé, de l’absence de contact avec le public sans qui le spectacle vivant n’existe pas. Et dans ce monde de la culture, les ensembles musicaux amateurs se sentent encore plus réduits au silence : c’est l’objet de ma sollicitation, en tant que chef de chœur.

Avant d’aller plus loin dans ce courrier, je tiens à vous préciser que si je suis rémunéré pour mes fonctions de chef de chœur, je réalise avant tout des missions au service de nos concitoyens en tant que fonctionnaire. J’ai notamment exercé des fonctions au sein de l’ARS PACA au cours de l’année 2020 qui m’ont conduit à être au plus proche de la première phase de l’épidémie en étant en lien quotidien avec les EHPAD du Vaucluse. J’ai donc une pleine conscience de la crise que nous traversons, de la nécessité de mettre en œuvre des conditions d’exercice qui permettent de ralentir la progression du virus, de favoriser l’accès au vaccin et de protéger celles et ceux que nous croisons.

Croyez bien, Madame la Ministre, que mon but n’est pas de remettre en question la mise en place de mesures de protection indispensables.

Je dirige donc deux ensembles vauclusiens, le Chœur Homilius et le Chœur Robert Grimaud, qui sont deux associations Loi 1901, dont les objectifs sont de donner des concerts tout au long de l’année, en Vaucluse mais aussi au-delà de nos frontières. Les répertoires de ces deux chœurs sont essentiellement centrés sur la musique sacrée, a capella ou avec orchestre, avec dans l’idée de faire découvrir des compositeurs peu ou pas chantés. Au-delà du travail de préparation, du travail individuel et du travail collectif, c’est bien le plaisir de chanter ensemble qui motive les choristes (et leur chef !), et de partager cette musique avec le public.

Au mois de septembre 2020, après quelques mois de silence, nous avons repris nos répétitions, avec masques bien sûr, et avec distance, dans des lieux suffisamment grands pour être éloignés les uns des autres, et à l’acoustique permettant ce travail. Malgré les masques, qui finalement n’empêchent pas de chanter, malgré la distance, le plaisir de chanter était là ! A nouveau découvrir ces pages de musique, à nouveau faire sonner des harmoniques, entendre les dissonances avec délectation et se retrouver sur un accord parfait ! Le bonheur de faire vivre, en live, la musique.

Le plaisir a été de courte durée, nous avons arrêté nos répétitions avec le second confinement, et depuis, plus rien. Impossible de travailler ensemble via les applications web, la latence est trop importante. Impossible de nous réunir en soirée (les chœurs amateurs sont faits de choristes qui ont une activité professionnelle en journée), et finalement impossible de trouver un lieu permettant l’accueil du chœur.

Aujourd’hui est repoussée la date d’ouverture des lieux de culture, et nous attendons avec impatience le 20 janvier pour pouvoir reprendre… mais est-ce que cela sera possible ?

Madame la Ministre, vivre sans culture est impossible, je sais que vous en êtes convaincue. Les professionnels, qu’ils soient comédiens, musiciens, chanteurs… ont pu reprendre et travailler : cela est essentiel, pour eux et pour maintenir une vie culturelle. Les maisons d’opéras ont diffusé leurs spectacles en direct sur le net, c’est le cas de l’Opéra d’Avignon et de l’Orchestre National Avignon Provence que vous avez récemment honoré de votre visite.

Nous, chefs de chœurs amateurs, choristes, souhaitons faire de même : pouvoir nous retrouver et travailler ensemble, et donner des concerts en version live sans public, ou avec des conditions sanitaires drastiques s’il le faut.

Madame la Ministre, nous attendons de vous une parole, un geste vers les chœurs amateurs : permettez que nous puissions nous retrouver en soirée pour chanter, avec bien évidemment l’engagement de la mise en place de protocoles sanitaires stricts et soumis à l’adhésion de chaque choriste. Permettez que nous puissions, nous aussi, participer à la vie culturelle de notre pays : les soignants font leur maximum pour soigner notre corps, mais les acteurs de culture dont nous faisons partie, pouvons aider à apaiser l’esprit, à lui donner un horizon lumineux, à accompagner chacune et chacun dans ces mois difficiles qui nous attendent, encore.

Vous êtes au cœur même de la gestion de cette crise, vous avez déjà donné notamment aux intermittents du spectacle des assurances quant à leur activité, votre engagement pour la culture n’est plus à démontrer, mais nous avons besoin de vous entendre, à nos côtés.

Vous remerciant pour votre lecture attentive, et restant bien sûr à votre disposition et celle de vos collaborateurs pour échanger sur les modalités d’exercice de nos répétitions et concerts, je vous prie de recevoir, Madame la Ministre de la Culture, mes hommages respectueux.

Signé : Sébastien di Mayo

Photo G.ad., 2 octobre 2020 à Avignon

 

Entretien avec Françoise Lasserre, cheffe d’orchestre, pour « Il mondo alla roversa », à Avignon (février 2019)

« Que les filles s’emparent du ballon ! »

x.1.Francoise Lasserre - photo Olivier Hoffschir. 316 ko

Aux commandes de Il mondo alla roversa (Le monde à l’envers) et de l’ensemble instrumental Akadêmia qu’elle a fondé en 1986, une cheffe, Françoise Lasserre. Dans cet opéra de Goldoni-Galuppi créé en 1750 – une joyeuse fantaisie -, les femmes s’emparent gaillardement du pouvoir, dans la ligne d’Aristophane ou Marivaux… Et avec cette musique que la cheffe savoure comme « vivante, rythmée, fondée sur la danse, qui plaît beaucoup, notamment aux jeunes », le metteur en scène Vincent Tavernier a joué pleinement la carte de l’opéra-bouffe, héritier de la truculente commedia dell’arte. Rencontre avec la cheffe de l’Ensemble, Françoise Lasserre. Il Mondo alla roversa sera donné à l’Opéra Confluence d’Avignon samedi 2 février à 20h30, et dimanche 3 février à 14h30.

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–Il mondo alla roversa, Le monde à l’envers : avec les femmes qui prennent le pouvoir, on est tout près d’Aristophane, que ce soit dans Lysistrata ou l’Assemblée des femmes : y a-t-il eu une influence directe ?

-Je ne saurais vous le dire. Il est évident que c’est le même sujet, avec les rôles qui s’inversent, mais je ne sais pas si Goldoni avait lu Aristophane. C’est en fait plus général. La pièce montre que le pouvoir détruit, qu’on soit homme ou femme. On retrouve la même idée chez Marivaux, dans L’Ile aux esclaves.

-La pièce met en scène trois femmes. Est-ce que chacune représente un type de caractère ou de comportement face au pouvoir ?

-Pas exactement, mais il est vrai que chacune est bien typée. L’une est équilibrée, elle veut ménager la chèvre et le chou. La deuxième use de son charme pour arriver à ses fins, ce qui est souvent considéré comme une attitude plutôt féminine. La troisième se comporte comme une furie, elle est dans l’excès, elle voudrait asseoir son pouvoir sur l’ensemble des hommes.

-Le hasard a voulu que, ces jours-ci, commence à la télévision une série policière Philharmonia, qui montre une jeune femme chef d’orchestre se heurtant au milieu machiste de l’orchestre d’Ile-de-France. Qu’en pensez-vous ?

-C’est grotesque et ridicule. Je n’en ai vu que dix minutes, il m’est donc difficile de porter un jugement. Mais le rapport avec les musiciens n’est pas du tout ce qui est présenté ici ; tout se passe d’abord dans le respect des gens. Un chef ne peut pas nommer ainsi sa petite protégée au poste de premier violon, sans concours, sans audition…

-Les femmes sont minoritaires au pupitre : Emmanuelle Haïm, Laurence Equilbey, Nathalie Stutzmann, et quelques autres… Pouvez-vous confirmer que la situation est plus difficile pour une femme ?

-C’est en fait un problème très général de l’opinion vis-à-vis des femmes. Tout se joue dans l’éducation, il faut changer le regard dès les premières années. Avec notre ensemble Akadémia (qui fête cette année ses 32 ans, NDLR), nous avons un bureau dans un quartier multiculturel, en zone d’éducation prioritaire. Nous montons un projet autour de la question : qu’est-ce qui est interdit aux filles ? L’opéra de Galuppi nous aide en ce domaine. On remet la balle au centre ; vous savez, comme au foot : que les filles s’emparent du ballon !

-La musique « ancienne » vit-elle une situation différente ?

-La situation est en effet un peu particulière. Nous travaillons avec des ensembles, où nous avons le choix des musiciens ; ou plutôt, c’est eux qui nous choisissent, ils sont des intermittents, ils n’ont pas le même statut, nous n’avons donc jamais de problème. Mais je sais que certaines de mes collègues n’ont pas cette chance, parce qu’elles ne sont pas nécessairement préparées à se confronter au pouvoir exercé par un groupe par rapport à une seule personne.

-Vous évoquez là surtout le cas des orchestres symphoniques ?

-Oui. Néanmoins, si la qualité est là, on peut s’imposer.

-Considérez-vous qu’il y ait une évolution favorable, et comment se situe la France en ce domaine ?

-Il y a une évolution, sensible un peu partout en Europe. De plus en plus de filles sortent des concours de chefs d’orchestre, et la France n’est pas trop mal placée. Je suis relativement optimiste. C’est pourquoi il faut travailler dans les écoles, et de tous les milieux.

-Vous êtes une spécialiste de la musique ancienne et musique baroque. Comment pouvez-vous définir cette musique, même si l’une et l’autre ne sont pas équivalentes… ?

-En fait, pour moi le terme de « musique ancienne » est un terme générique, qui englobe aussi la musique baroque, en fait toute la musique avant Mozart. C’est une musique d’une étonnante vitalité ; une musique instrumentale, basée sur la danse, sur le rythme, et sur l’adéquation entre le texte et la musique, qu’on soit dans l’opéra ou dans le répertoire religieux. Le public est très facilement séduit par cette musique, qui plaît particulièrement aux jeunes. J’ai le souvenir du Festival d’Utrecht, qui réunit beaucoup de jeunes, tous très enthousiastes ; et quand on les croise dans la rue, ils viennent nous parler, échanger, et nous dire combien ils l’apprécient. La musique ancienne touche plus facilement les jeunes que la musique romantique, par exemple, plus figée, plus codifiée.

-S’agissant de la pièce de Galuppi, comment l’abordez-vous ?

-Ce n’est pas totalement une création, puisqu’elle a déjà été donnée, mais à l’étranger. C’est la première fois en France. Elle est à cheval entre la commedia dell’arte, truculente, et les opéras de Mozart, avec des personnages multifacettes. Il y a six personnages principaux, divisés en deux groupes, une partie pré-mozartienne, l’autre plus « bouffe ». On est en 1750, on sent une nette évolution du genre, notamment à Venise où est créée la pièce : on va aller de la commedia dell’arte vers l’opéra-bouffe.

-Vous-même, avec le metteur en scène, comment l’appréhendez-vous ?

-C’est surtout Vincent (Tavernier) qui en a dessiné les contours. Il a accentué le côté bouffe, avec des caractères issus de la commedia dell’arte. Il joue sur les effets dynamiques des airs, sur les aspects bizarres et surprenants de la musique. Il y a beaucoup de contrastes dans la musique ; l’harmonie est plus facile que chez un Vivaldi, et c’est très dynamique. Il faut dire au public : venez rire, venez vous amuser ! Il y a beaucoup d’airs da capo, comme dans le baroque, et quelques ensembles cocasses.

-Maintenant une question plus personnelle, si vous permettez. Vous avez fait des études de mathématiques ; si vous n’aviez pas été ce que vous êtes, auriez-vous aimé être ou faire autre chose ?

-Oui, avoir d’autres capacités. Plus jeune j’étais très attirée par la recherche en mathématiques pures. Mais j’aime aussi la nature, j’aurais pu être proche de la terre. Et puis un rêve de petite fille, être archéologue : trouver la vie du passé avec les moyens modernes.

-Beaucoup de grands musiciens sont aussi très proches des mathématiques.

-C’était les quatre disciplines maîtresses dans les études antiques.

-Oui le quadrivium des sciences dites mathématiques : arithmétique, astronomie, géométrie, musique….

–Qui peuvent nous ramener à Galuppi ». (Propos recueillis par G.ad. Photo Olivier Hoppschir)

 

Bio-express

x2.F. Lasserre. 8 ko

Françoise Lasserre a une formation multiple : mathématiques, puis traverso, analyse, écriture et direction d’orchestre.

En 1986, elle crée l’ensemble vocal et instrumental Akadêmia (en référence à Platon), pour des projets singuliers et coopératifs autour de musiques des XVII et XVIIIe siècles « pré-mozartiennes » mais aussi des répertoires les plus larges. Elle engage toute son énergie notamment dans la médiation culturelle auprès de publics divers.

Ses concerts et CD (plus de 15) sont unanimement salués et couronnés.

Françoise Lasserre travaille dans un esprit « humaniste », attentive aux individus et à leur approche personnelle de la musique, jetant des ponts entre baroque et contemporain, en Europe, Russie et Etats-Unis. Elle a même monté un « Orphée » baroque et multiculturel en Inde. Et promeut et accompagne jeunes musiciens et jeunes chefs.

 

 

Entretien avec Samuel Coquard, chef de chœur (2018)

x.Coquard Samuel. 189 ko

Samuel Coquard (sa biographie ici) chef de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône depuis 2002, dirigera dimanche 4 novembre 2018 à Avignon, puis dimanche 11 novembre à Aix-en-Provence, le Requiem de Gabriel Fauré, au cœur d’un programme Fauré/Poulenc/Messiaen. Rencontre avec un chef de chœur exigeant…

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-Samuel Coquard, pouvez-vous nous parler d’abord de l’organisation du concert qui sera donné dimanche à Avignon ?

-Il s’agit d’une co-réalisation entre trois entités, l’Opéra Grand Avignon, la Maîtrise des Bouches-du-Rhône et Musique Sacrée/Orgue en Avignon,  cette dernière association dans le cadre des 26es Automnales de l’orgue. Toutes nos forces vives seront mobilisées.

-De fait, la Maîtrise des Bouches-du-Rhône comprend plusieurs pôles, 3 formations différentes.

-Oui, nous avons le Chœur d’enfants, le Jeune chœur, et le chœur professionnel d’adultes Asmara, qui avait donné la Messe de Rossini cet été aux Musicales du Luberon. Ici, ce sera uniquement le chœur d’hommes, les voix féminines étant interprétées par les enfants.

-Un effectif total de… ?

-25 pour le Chœur enfants, 14 pour le Jeune chœur, 6 hommes Asmara, auxquels on rajoute 2 solistes, ce qui fait 47 chanteurs sur scène.

-Vous donnerez donc la 1e version du Requiem de Fauré ?

-Cette version qui a en effet été créée pour le chœur d’enfants de la Madeleine. L’ensemble est accompagné de Luc Antonini àl’orgue et Anne-Cécile Brielles au violon pour le Sanctus.

-Poulenc et Messiaen figurent aussi au programme. Comment avez-vous conçu ce concert ? Un fil rouge thématique, ou des univers complémentaires ?

-Ce sont d’abord trois compositeurs français de la fin du XIXe siècle-début du XXe. Tous les trois relèvent de la grande esthétique française, à la fois très différente chez chacun mais aussi très proche, pure, archaïsante. Voyez par exemple la ligne mélodique chez Fauré, au style très reconnaissable ; elle n’est peut-être perceptible avec autant de clarté chez les autres, mais elle s’y trouve aussi. Chez tous les trois également on trouve un rapport à la foi, plus ou moins tardive, plus ou moins intense. Ce sont trois œuvres sacrées marquantes.

-Les deux versions du Requiem de Fauré sont-elles bien différentes ?

-Ce sont des univers différents. Chez Messiaen également, ce sera la première fois que le O Sacrum Convivium sera interprété par un chœur d’enfants. Le plus souvent, ce sont des chœurs d’adultes mixtes. Je l’ai entendu une seule fois par des enfants, par des Anglais. C’est une œuvre a capella, un petit joyau très court, de 5 minutes, un vrai bijou.

-Votre Maîtrise est une pépinière de talents. Avez-vous quelques « anciens » qui maintenant mènent une belle carrière ?

-Théo Imart est maintenant chez William Christie. En août 2019, il chantera la Finta Giardiniera.

-Nous l’avions entendu l’an dernier au concours #cjeopera d’Avignon.

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-Eh oui, Avignon l’a boudé, William Christie l’a pris. Ce jeune est tout de même le seul chanteur français à avoir intégré le Jardin des voix ! Dans les concours, je suis toujours étonné d’entendre des jeunes chanter un répertoire qui n’est pas fait pour eux. Mais que voulez-vous, c’est le standard des voix que les gens aiment…

-Pensez-vous à d’autres « anciens » ?

–Marie Pons, par exemple, a créé un trio, un trio de femmes, Irini. Elles se spécialisent dans les chants médiévaux et de la Renaissance. C’est un trio qui tourne déjà bien sur le territoire.

-D’autres encore ?

-(Rire) Vous savez, je ne suis là que depuis 2002, je n’ai pas eu le temps de faire beaucoup de petits… Du moins sommes-nous présents sur les plus grandes scènes. Ce qui me laisse perplexe quand je vois que le manque de financement risque de compromettre la pérennité de ce travail.  La discipline et la rigueur que l’on nous reconnaît sont la traduction d’une grande écoute et d’une vraie attitude professionnelle, même et surtout de la part d’un chœur d’enfants réputés comme excellent.

-C’est le cas de nombreuses structures artistiques et culturelles…

-Sans doute. Je ne suis plus un jeune débutant (42 ans, NDLR), et cela m’attriste, surtout s’agissant de jeunes, car nous faisons avec eux un énorme travail de formation.

-Quant au concert qui s’annonce – aux deux concerts, puisque vous le donnerez également à Aix la semaine suivante -, que voudriez-vous souligner ?

-La présence d’un jeune baryton de talent, qui a le timbre juste pour la musique française ; il a été l’élève de Mireille Alcantara, comme Karine Deshayes d’ailleurs. Et Luc Antonini, lui, a été mon professeur d’orgue à Montpellier. Nous donnons souvent des concerts ensemble dans la région. Ce devrait être une belle soirée. (Propos recueillis le 29 octobre 2018 par G.ad. Photo G.ad., juin 2018).

Jorge Lavelli, metteur en scène

Pour L’Ombre de Venceslao : conception, mise en scène et lumières

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Né à Buenos-Aires, Jorge Lavelli est naturalisé français en 1977. Metteur en scène de théâtre et d’opéra, ses premières réalisations explorent le répertoire contemporain, tant en France qu’à l’étranger : Europe, Russie, Etats-Unis et Amérique latine.

Il introduit en France le théâtre de Witold Gombrowicz et révèle les nouvelles pièces d’Arrabal, Copi, Obaldia, Handke, Fuentes, Pinter, Rezvani ou encore Athayde. Il monte Panizza, O’Neill, Bulatovic, Boulgakov, sans délaisser les classiques tels que Sénèque, Calderón, Corneille, Goethe, Tchekhov, Claudel, Lorca, et Shakespeare. Il fait également découvrir en France Juan Mayorga, jeune et talentueux dramaturge espagnol, en créant trois de ses pièces au Théâtre de la Tempête : Chemin du ciel en 2007, Le garçon du dernier rang en 2009, puis en tournée en 2010 et Lettres d’amour à Staline en 2011. En 2013, il crée Le prix des boîtes de Frédéric Pommier et en 2015, On ne l’attendait pas ! de Stig Larsson au Festival d’Avignon. Directeur fondateur du Théâtre National de la Colline (1987 à 1996), il choisit de se consacrer exclusivement à la découverte et à la création d’auteurs du XX° siècle. Il inaugure les deux salles de la Colline avec Le public de Lorca et La visite inopportune de Copi.

Au Festival d’Avignon,entre 1967 et 1993, il présenta notamment à La Cour d’honneur, le Cloître des Carmes, l’Opéra Grand Avignon et le lycée Saint-Joseph une dizaine de spectacles. Il crée en 1969 une première forme de « théâtre musical » avec Orden de Pierre Bourgeade et Girolamo Arrigo, initiant ainsi un autre pan de son travail dédié à l’opéra.

Dans ce domaine, et sur les plus grandes scènes internationales, dont l’Opéra National de Paris, la Scala de Milan, le Théâtre de La Fenice à Venise, le Metropolitan Opera  de New-York, le Théâtre Colón de Buenos-Aires, le Théâtre du Liceù de Barcelone, les Grands Théâtres de Genève, Zurich et Hambourg et le  Staatsoper de Vienne, il met en scène les compositeurs de notre temps : Von Einem, Prokofiev, Nono, Sutermeister, Krauze, Ohana, Debussy, Ravel, Bizet, Stravinsky, Bartók, Richard Strauss, Janácek, Lehár, Arrigo ou encore Liebermann… sans pour autant ignorer les classiques. Il a mis en scène en 2014, Idomeneo de Mozart au Théâtre Colón de Buenos-Aires.

Parmi ses projets, notons en mai 2017 Jenufa à l’Opéra National de Santiago du Chili et en septembre/octobre, la mise en scène de Die lustige Witwe à l’Opéra National de Paris.

L’Opéra Grand Avignon l’a accueilli en 2005 pour Cecilia (Charles Chaynes). Ici l’Ombre de Venceslao (10 mars 2017).

COPI  ET JORGE LAVELLI

1966 – création de Sainte-Geneviève dans sa baignoire au Théâtre du Bilboquet, à Paris.

1967 – création de La journée d’une rêveuse au Théâtre de Lutèce, à Paris.

1973 – création au Théâtre de la Cité Internationale, pour l’inauguration de la Salle de la Resserre de L’homosexuel ou la difficulté de s’exprimer (Copi en étant l’un des interprètes).

1974 – création des Quatre jumelles, dans les sous-sols du Palace, à l’occasion du Festival d’Automne.

1985 – création de La nuit de Madame Lucienne, au Festival d’Avignon, puis au Festival El Grec de Barcelone, à la Biennale de Venise et au Festival de Lille.

1986 – reprise de La nuit de Madame Lucienne, au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers.

1988 – création de La visite inopportune, dernière pièce de Copi, pour l’inauguration de la petite salle du Théâtre National de la Colline.

1989 – création en catalan d’Une visite inopportune au Théâtre Poliorama, Compagnie Flotats à Barcelone, reprise au Festival El Grec de Barcelone.

1999 – création de L’Ombre de Venceslao, au Théâtre de la Tempête, à Paris.

2001 – reprise de L’Ombre de Venceslao au Théâtre du Rond-Point, à Paris

(Photos G.ad., mars 2017)

 

Martin Matalon, compositeur

x.DSC03612. Matalon.

Né à Buenos-Aires en 1958, Martin Matalon étudie à la Juilliard School de New-York, où il obtient son Master de composition. En 1989, il fonde Music Mobile, ensemble basé à New-York et consacré au répertoire contemporain, dont il devient le directeur jusqu’en 1996.

Il reçoit le prix de la Guggenheim Foundation de New- York, le Prix F. Schmitt de l’Institut de France – Académie des Beaux-Arts, le Prix de la Ville de Barcelone, le Charles Ives Scholarship de l’American Academy and Institute of Arts and Letters ou encore le Grand Prix Lycéen des Compositeurs de Musique Nouvelle en Liberté.

En 1993, alors qu’il s’installe définitivement à Paris, l’IRCAM lui commande une nouvelle partition pour la version restaurée du film de Fritz Lang, Metropolis. Après ce travail considérable, Martin Matalon se plonge dans l’univers de Luis Buñuel en écrivant consécutivement trois nouvelles partitions pour les trois films surréalistes du cinéaste espagnol : Un Chien andalou (1927), L’Age d’or (1931) et Las Hurdes, terre sans pain (1932).

Son catalogue comprend un nombre important d’œuvres de musique de chambre et d’orchestre et couvre un large spectre de genres différents : théâtre musical, musique mixte, contes musicaux, musique vocale, installations, musique et texte, Hörspiel, œuvres chorégraphiques et ciné-concerts.

En 1997, la série des Trames (œuvres à la lisière de l’écriture soliste du concerto et de la musique de chambre) et le cycle des Traces (œuvres destinées à des instruments solistes avec électronique en temps réel) constituent pour le compositeur une sorte de journal intime et forment un pan important de son catalogue.

Professeur de composition au Conservatoire à Rayonnement Régional d’Aubervilliers-La Courneuve depuis 2010, il crée l’Atelier, ensemble consacré à la musique des XXe et XXIe siècles et mène parallèlement une activité de chef d’orchestre avec l’Ensemble Modern, MusikFabrik, Barcelona 216, l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, l’Orchestre Régional Avignon-Provence, l’Ensemble Court- Circuit, les Percussions de Strasbourg et l’Ensemble Inter-contemporain.

Il est en résidence à l’Arsenal de Metz avec l’Orchestre National de Lorraine de 2003 à 2004, à La Muse en Circuit de 2005 à 2010, au Festival de Stavanger en 2011, au Conservatoire à Rayonnement Régional d’Aubervilliers-La Courneuve en 2012 et au Festival des Arcs en 2014.

L’Opéra Grand Avignon l’a accueilli en 1998 dans le cadre d’un concert de l’Orchestre Régional Avignon-Provence.

L’Ombre de Venceslao, à Avignon (10-03-2017), à Marseille (7-11-2017). (Photo G.ad.)

 

 

 

Michel Piquemal, chef de chœur, chef d’orchestre (octobre 2017)

Michel Piquemal : « pour l’instant je suis le seul… » (octobre 2017)

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Michel Piquemal est baryton, chef de chœur, chef d’orchestre. Il se réjouit de venir, une fois de plus, diriger ce week-end (13 et 15 octobre 2017, de part et d’autre d’un concert le 14 à Mougins, Alpes-Maritimes, sur un tout autre programme), à la fois l’Orchestre Régional Avignon-Provence, et le choeur que lui-même a créé en 1989, le Chœur Régional Provence-Côte-d’Aur, d’excellente réputation et au répertoire très large.

Logo CLENPR 21-06-17

-Michel Piquemal, vous allez diriger ce week-end le Requiem de Fauré. Quelles en sont les caractéristiques, par rapport aux Requiem de Mozart ou de Verdi  par exemple ?

-C’est une œuvre pleine de douceur. On n’est pas dans le tragique, mais dans une certaine sérénité. En espérant qu’il y a quelque chose après cette vie. Pourtant Gabriel Fauré n’est pas lui-même très croyant, mais il a commencé à composer son Requiem après la mort de ses parents. Dans la première version, il n’y avait que quelques instruments : un violon solo, un violoncelle, et bien sûr une harpe, et des trombones pour le moment violent du « Dies irae ».

-C’était la version de 1893 ?

-Oui, ensuite son éditeur lui a demandé une orchestration plus conséquente ; ce n’était pas la mode des petits effectifs. La 1e version ne comportait pas de violon sauf le solo dans le « Sanctus », et pas de flûte, pas de hautbois, de clarinette, de basson… Or on sortait alors de Wagner, on aimait les grands effectifs. C’était une version toute en légèreté. Fauré n’aimait pas orchestrer, il s’est pourtant plié à la demande de son éditeur parce qu’il aimait particulièrement cette œuvre.

-C’est donc cette deuxième version que vous allez diriger ?

-Oui, c’est cette grande version que l’on joue généralement, depuis qu’elle est tombée dans le domaine public.

-Le concert comporte aussi une œuvre de Caillebotte.

-En parallèle, j’ai voulu proposer aussi une œuvre de Martial Caillebotte, le frère cadet du peintre Gustave. Ce sera une vraie découverte. La famille Caillebotte était des gens aisés, riches, qui n’avaient pas besoin de vendre, sa musique pour l’un, sa peinture pour l’autre. Martial était surtout connu comme photographe ; pourtant il avait eu des prix de conservatoire, et il était en piano avec Debussy. Il a composé toute sa vie, mais sans avoir l’intention de faire jouer sa musique, tout à fait comme son frère faisait des tableaux sans souhaiter les vendre. Grâce à ses descendants j’ai eu accès à ses œuvres, et j’ai même enregistré deux CD. La messe « Ecce bonum », que nous allons interpréter, vante les vertus de la fratrie ; elle a été composée en hommage à la fratrie, comme le montre la partie des trois solistes, deux ténors et un baryton. Le frère aîné des Caillebotte était curé de Notre-Dame de Lorette, c’est même lui qui avait fait construire l’église. C’était une famille intéressante, avec quantité de passions. Les trois frères partageaient aussi la passion de la voile ; imaginez : même Tabarly s’est servi de leurs plans pour faire le Pen Duick IV !

-Vous parlez de trois solistes masculins, or vous n’en avez qu’un dans le programme…

-Les autres parties seront tenues par des choristes.

-Vous dites que les descendants vous ont donné accès aux œuvres de Martial Caillebotte. En avez-vous donc l’exclusivité ?

-Pour l’instant je suis le seul à m’y intéresser, mais mon désir est que d’autres aussi le découvrent et le jouent. C’est vraiment une porte intéressante pour les années 1880 environ, Martial étant mort en 1909. C’est un psaume pour grand orchestre, grand chœur et grands solistes.

-A-t-il composé dans d’autres domaines, chambre, symphonique ?

-Des œuvres orchestrales, et un poème symphonique appelé « Une journée » ; c’est d’ailleurs mon 2e CD, le récit des moments successifs de la journée. Mais également une œuvre lyrique, un opéra, Roncevaux, qui n’a jamais été joué.

-Le concert s’ouvrira par le « Cantique de Jean Racine », de Gabriel Fauré également.

-C’est une œuvre de jeunesse, à l’époque où Fauré était encore élève, il avait 19 ans. Ce fut un succès immédiat. Lui-même était organiste à l’église de la Madeleine, il composait beaucoup de motets. Son premier essai a été un de ses grands succès.

-Vous allez à cette occasion diriger l’Orchestre Régional Avignon-Provence…

-… que je connais bien. J’ai toujours beaucoup de plaisir à travailler avec cet orchestre. Nous avons même fait un disque ensemble il y a quelques années ; et cet été nous avons tourné ensemble avec Gounod.

-Je présume que votre chœur sera au complet, comprenant aussi le chœur Côte-d’Azur de Nicole Blanchi ?

-Oui, le chœur Régional comprend deux phalanges, l’une dans la région de Cannes-Nice, dirigée par Nicole Blanchi, et l’autre, le Vocal-Provence à Aix-en-Provence, avec Bruno Rastier comme chef de chœur.

-Direction de chœur et direction d’orchestre, est-ce bien différent ?

-C’est la même chose. C’est comme diriger un violon et un trombone : bien sûr, il faut des connaissances sur le son ; et l’attaque d’un violon est plus précise que pour la colonne d’air. Mais la gestuelle est la même.

-Quels sont vos projets avec le Chœur Régional ?

-Ils sont liés au soutien de la Région ; nous souhaitons qu’il se maintienne, pour nous permettre de continuer notre travail. www.orchestre-avignon.com et http://www.choeurpaca.fr/ (Propos recueillis par G.ad.)

 

Entretien avec Frédéric Bélier-Garcia, metteur en scène, pour « Macbeth » (mars 2017)

 

« C’est l’humanité de l’interprète qui imprègne le rôle »

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Théâtre, opéra, cinéma, Frédéric Bélier-Garcia s’attaque à tous les univers. Ses mises en scène sont toujours « au service » des œuvres… Le voici plongé dans le Macbeth de Verdi, créé à Marseille au printemps 2016, et repris à Avignon les 2 et 4 avril 2017, dirigé par Alain Guingal (voir aussi notre entretien avec le chef). Rencontre avec un homme généreux, ouvert, humain, et modeste, réservé.

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-Verdi et Hugo considéraient Macbeth de Shakespeare comme une histoire énorme. Cette histoire est-elle vraiment exceptionnelle ?

-(sourire) Je n’ai pas le goût des palmarès. Mais l’opéra de Verdi et la pièce de Shakespeare sont les œuvres les plus puissantes et ténébreuses. C’est le fond noir de l’âme humaine, et sondé le plus profondément. Au-delà, Verdi a saisi de la pièce la quintessence, avec également des côtés hilarants. La contraction qu’il en fait rend d’ailleurs l’opéra supérieur à la pièce, à mon avis. De même en faisant du couple le noyau de la pièce, alors que chez Shakespeare il y a plusieurs histoires périphériques. Lui a vraiment saisi l’essence du problème.

-Un commentateur parle de « noirceur éblouissante ». A travers cet oxymore, peut-on dire que la lumière jaillit de cette noirceur ?

-Il essaie d’éclairer les ténèbres de l’âme humaine ; dans ce cas, on voit plus loin, mais ça reste tout de même des ténèbres, on reste dans l’obscurité des choses. Ce qui est très beau, c’est que l’opéra (ou la pièce) évoque le plus intime, étrangement il met en jeu des sentiments très enfantins, des peurs d’enfant. Les personnages tremblent, grelottent. Ce sont des sentiments archaïques et enfantins, comme les enfants qui dans une pièce obscure guettent les ombres. Par ces sentiments qu’on pourrait appeler primaires, c’est un opéra fantastique, avec des sorcières, des apparitions. C’est un scénario fantastique, mis en place pour faire ressortir la noirceur terrible des âmes.

-Vous parlez en effet de ces sentiments « enfantins, archaïques » dans votre note d’intention. Pensez-vous que cela participe de la dimension épique ? Est-ce que votre mise en scène exprime cette dimension dans une imagination débridée ou dans la sobriété ?

-Je cherche un équilibre pour ne pas tomber dans autre chose…. dans un Walt Disney par exemple, dans la pyrotechnie ; et fournir des effets horrifiques, irrationnels, non réalistes. Je veux rester au plus près de la sensation que Verdi et Shakespeare ont voulu donner. Rester dans Shakespeare, dans le cauchemar. La voix de Lady Macbeth par exemple est plus un cri que du bel canto. C’est la part animale de l’humain.

-Dans cette perspective, peut-on parler de culpabilité ?

-Vous savez, ma première profession a été d’enseigner la philosophie… (le chef toulonnais Laurent Campellone a commencé lui aussi par la philosophie, NDLR)

-Justement, c’est bien le sens de ma question.

-Et ce qui est amusant, c’est que j’avais commencé une thèse sur la culpabilité, à travers Heidegger notamment, et j’avais étudié le cas de Macbeth. J’ai retenu de cette période la phrase de Lévinas : « Macbeth a tué le sommeil ». Une phrase très forte. Vous savez, ce sont ces états mentaux de l’insomnie, où, à 3 heures du matin, dans le silence, on éprouve une lucidité terrible. Mais au-delà de la fable, ce qui ressort aussi de l’œuvre c’est l’homme qui essaie d’être autre chose que ce qu’il doit être, que ce qui était prévu ; il a envie d’un autre destin. La culpabilité les brûle tous les deux, mais différemment.

-Vous avez créé cette production de Macbeth au printemps dernier à Marseille. Outre les contraintes liées au lieu même, avez-vous fait d’autres modifications ? Votre vision a-t-elle évolué ?

-La création a eu lieu au printemps dernier, donc c’est assez récent ; ce n’est pas comme si s’étaient écoulées plusieurs années. Mais je fais toujours évoluer mes opéras ; je les adapte, je rebondis sur ce qui transpire des interprètes. Autour de l’interprète de Macbeth, qui est le même qu’à Marseille, tous les autres ont changé. Lady Macbeth et Banco, par exemple, ne sont plus du tout les mêmes ; pour Banco, c’est la bonhomie, la fraternité, sur laquelle j’ai rebondi. Avec Don Giovanni…

-…Que vous avez mis en scène aussi il y a quelques années à Avignon.

-Oui, avec Don Giovanni, Macbeth est l’opéra le plus théâtral, le plus proche du théâtre. Verdi a suivi comme jamais toutes les répétitions de la pièce. En fait, pour moi c’est l’humanité de l’interprète qui imprègne le rôle. Et j’ai de la chance, car les interprètes sont excellents.

-Vous faites des mises en scène d’opéra, de théâtre et de cinéma. Y a-t-il des différences fondamentales ? J’imagine que théâtre et opéra sont très proches, mais il y a dans les trois arts des façons différentes d’appréhender l’espace et le temps, par exemple ?

-On a l’impression que ces arts – je parle notamment du théâtre et de l’opéra – appartiennent à la même famille, mais, pour parler comme Pascal, ils s’adressent à des parties différentes de l’âme : le théâtre s’adresse au sens primordial, l’intelligence, la pensée ; l’opéra s’adresse aux sentiments, aux sensations les plus archaïques, les plus profondes.

-Essentiellement aux affects ?

-Oui, plus d’émotions, plus d’affects. L’imaginaire est beaucoup plus libre à l’opéra. Et moi par exemple je me laisse porter par la musique…

-Vous êtes musicien vous-même ?

-Pas du tout. Mais je suis plutôt la musique que le livret.

-Si vous n’aviez pas été metteur en scène, et hors la philosophie que vous avez enseignée, qu’auriez-vous aimé faire ?

-(rire) Vous savez, Macbeth lui-même ne peut pas choisir entre deux vies ; alors pour moi, trois, vous pensez ! (rire). C’est drôle, je ne me suis jamais posé la question. Parfois je me dis qu’il faudrait que j’y réfléchisse… J’ai de toute façon besoin de plusieurs exercices pour que chacun alimente l’autre ; le théâtre réinvente l’opéra, et réciproquement. Ce sont des excitations différentes, et j’ai besoin de toutes pour rester excité. Dans le domaine du théâtre, je travaille plutôt dans le contemporain, et j’ai besoin d’aller de l’un à l’autre.

-Vos projets après Macbeth ?

-Ce Macbeth a suscité en quelque sorte un Macbeth théâtral. J’en ai une véritable angoisse, de l’absence de musique. Ce sera mon premier Shakespeare, eh oui ; ce sera à Angers, puis à la Criée à Marseille. Ensuite ce sera la reprise de Lucia, que vous aviez vue ici. Et je dois écrire un film à la rentrée. A l’opéra en fait, il n’y a pas de leader de projet, en tout cas ce n’est pas moi, je ne fais que répondre à une commande, c’est plus confortable et plus agréable. Au théâtre c’est moi qui porte tout, qui choisis les acteurs…

-Y a-t-il une œuvre que vous aimeriez particulièrement mettre en scène ?

-(long silence) Il y en a beaucoup… Onéguine peut-être ?

(propos recueillis par G.ad. Photo G.ad., mars 2017)

 

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