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Un récital d’anthologie
Chorégies d’Orange (site officiel). Théâtre antique, mardi 11 juillet, 21h30. Durée 1h40
Récital Evgeny Kissin, piano
Bach, La Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur, BWV 903. Mozart, La Sonate pour piano no 9 en ré majeur, K. 311/284c. Chopin, Polonaise en fa dièse mineur op.44
Rachmaninov, Lilas op. 21 n° 5 ; Prélude op. 32 n°8 en la mineur. Rachmaninov, Prélude op. 23 n°10 en sol bémol majeur. Rachmaninov Etudes-Tableaux op. 39 n°1, 2, 4, 5 et 9
Les Chorégies d’Orange nous ont offert un magnifique récital de piano avec le très grand pianiste russe : Evgeny Kissin, 20 ans après sa dernière venue à Orange.
Nous l’avions découvert alors qu’il n’avait que 17 ans, lors de son passage sur la scène avignonnaise. Le pianiste, à l’époque accompagné par sa mère et son professeur de piano, était déjà reconnu comme étant l’un des plus grands interprètes de sa génération.
« Pianiste russe né le 10 octobre 1971 à Moscou, Evgeny KISSIN enfant prodige, commence le piano dès l’âge de 2 ans. Il entre à la célèbre cole de Moscou dès ses 6 ans et étudie avec son unique professeur Anna Pavlovna Kantor. Le jeune musicien donne son premier récital sous la baguette d’Herbert Von Karajan à 10 ans et joue les deux concertos pour piano de Chopin à l’âge de 12 ans sur la scène moscovite. Dès 1988 il est lauréat du concours national Rachmaninov et obtient le grand prix du concours jeunes musiciens à Tbilisii. Médaillé d’argent en 1994, il poursuit alors une carrière internationale qui le propulse de festivals en scènes prestigieuses, il joue sous la direction des plus grands chefs d’orchestre. En 2001 il est le premier soliste instrumentiste à se produire aux Chorégies d’Orange avec le Concerto n°1 de Chopin. Partout, il est ovationné et reconnu comme un grand nom du piano. Sa discographie est importante. Il reçoit de nombreuses récompenses pour ses enregistrements chez Vanguards Classics des œuvres de Racmaninov et de Chopin ».
Dans les gradins du théâtre antique d’Orange, le public attendait Evgeny Kissin pour un programme Bach, Mozart, Chopin et surtout Rachmaninov pour la seconde partie de la soirée.
La Fantaisie Chromatique et Fugue en ré mineur BWV 903 du grand Jean-Sébastien Bach ouvre la soirée et emplit l’espace grandiose des Chorégies. Le toucher délicat d’Evgeny Kissin, d’une parfaite plénitude sonore, prend tout son sens dans la fugue d’une fluidité éloquente. Le pianiste y fait entendre de très beaux trilles. Le jeu délicat presque féminin de Kissin donne à Bach une couleur raffinée.
En 2008, E.Kissin déclarait à Frédéric Gaussin de la revue Pianiste: « Je considère Bach comme le sommet de la musique en terme d’universalité, au point de vue de la masse spirituelle. C’est une partie intégrante de mon être, mais je n’ose tout simplement pas le jouer en public ! » Heureusement que 15 ans plus tard le grand pianiste nous a offert cette interprétation du Maître !
Le contraste est saisissant avec la sonate n°9 en ré Majeur K311/284 de Mozart qui semble plus « mécanique » mais en même temps d’une simplicité enfantine. Evgeny Kissin sait s’imposer par un jeu précis. En dehors de sa parfaite maîtrise technique, ses phrasés sont expressifs.
La Polonaise en fa dièse mineur op 44 de Chopin souvent surnommée « Polonaise tragique », contraste totalement avec le début de la soirée. Nous sommes là dans le romantisme pur. Il s’agit d’une œuvre virtuose, énergique jusqu’à la véhémence, sombre et rageuse, qui nécessite une grande maîtrise du piano. Kissin nous restitue un Chopin cursif et plein d’énergie. Dans la même interview de 2008, Kissin déclarai t: « Je suis très proche de Chopin, c’est le compositeur que je joue le plus, celui dont la musique est la plus proche de mon cœur . C’était un révolutionnaire qui exige une grande souplesse de la main au piano »
La seconde partie du programme est consacrée à Rachmaninov .
Première pièce du compositeur: Lilas op21 n°5. Composée en 1941, il s’agit d’une romance qui fait partie de 12 mélodies. De cette oeuvre de maturité on retient surtout la délicatesse du compositeur. Cette courte pièce est nostalgique, l’interprétation de Kissin reste pure et expressive, elle semble émaner totalement du musicien.
Après deux préludes op 23 n°10 et 32 n°8, pièces qui font partie des 24 préludes faisant écho aux 24 préludes composés par Chopin, l’artiste est dans la virtuosité pure sans pour autant négliger une musicalité constante. La technique passe au service de l’expression, le toucher du pianiste est somptueux.
Kissin a interprété pour finir, cinq Études-Tableaux op 33.
La technique est ici encore au service de l’expression, ces pièces d’une densité harmonique et d’une grande complexité rythmique sont éblouissantes !
Une ovation bien légitime a été faite au pianiste qui possède un répertoire maîtrisé comme personne ! Il ne s’est pas fait prier pour accorder un moment de bonheur supplémentaire au public avec Rachmaninov encore et une pièce intitulée « Mélodie » op3n°3.
Une courte pièce empreinte de délicatesse. Une belle conclusion pour cette soirée magnifique.
D.B. Photos Philippe Gromelle
Le 24 juillet 2023, sur sa page Facebook, le pianiste russe Evgeny Kissin s’émeut des bombardements de Poutine sur Odessa.
G.ad.
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