Ciné-opéra :
La Fille du Far West (Puccini)
La Fanciulla del West. Musique Giacomo Puccini. Livret Guelfo Civinini et Carlo Zangarini, d’après David Belasco. Nouvelle production, 2016, Teatro alla Scala di Milan
En direct mardi 10 mai 2016 au Capitole-Studios, Le Pontet (84)
Chef d’orchestre, Riccardo Chailly. Metteur en scène, Graham Vick.
Orchestre et compagnie de danse de la Scala
Minnie, Fille du Far West, Eva Maria Westbroeck.
Shérif, Jack Rance, Claudio Sgura. Dick Johnson, Ramerrez le bandit, Marcelo Álvarez. Nick, Carlo Bosi. Ashby, Gabriele Sagona. Sonora, Alessandro Luongo. Trin, Joshua Stewart. Harry, Emanuele Giannino. Joe, Krystian Adam. Happy, Francesco Verna.
Original, ce premier « western-spaghetti » de l’histoire de l’opéra, avec tous les poncifs de l’Ouest américain que le cinéma a désormais très largement vulgarisés. Mais dans ce saloon nommé « la Polka », tenu par Minnie et fréquenté par de rudes chercheurs d’or, et bientôt par le bandit Dick Johnson, c’est tout de même du pur Puccini, « exotique et bouleversant ». Et c’est en direct de la prestigieuse Scala de Milan. Sous la baguette de Riccardo Chailly et dans une mise en scène de Graham Vick, avec Orchestre et compagnie de danse, on entendra Eva Maria Westbroek dans le rôle-titre, Claudio Sgura avec l’insigne du shérif, et Marcelo Alvarez dans le rôle du bandit au grand cœur.
G.ad.
Cette production malgré de nombreux changements fut un grand moment lyrique.
Eva Maria Westbroek qui devait interpréter le rôle de Minnie fut remplacée par Barbara Haveman que nous avions eu l’occasion d’entendre à l’Opéra d’Avignon dans Simon Boccanegra de Verdi. Marcelo Alvarez qui devait, lui, interpréter le rôle de Dick Johnson, a été remplacé par Roberto Aronica. Quant à la mise en scène, qui avait été confiée à Graham Vick, c’est finalement Robert Carsen qui l’a assurée.
Finalement, nous n’avons pas perdu au change.
Barbara Haveman qui le soir de la première était restée, paraît-il, très en retrait, a donné le soir ddu direct, certainement le meilleur d’elle-même ; je ne me souviens pas depuis Magda Olivero avoir entendu une Minnie aussi vériste, avec une étendue vocale aussi époustouflante, des graves qui vous saisissent tant ils sont expressifs, et des aigus propres aux grands soprani dramatiques. On retrouve bien là l’enseignement de ses professeurs Carlo Bergonsi et Renata Scotto. Elle nous plonge dans l’action et nous fait l’accompagner dans ce drame où la musique de Puccini est riche en rappels au grand répertoire lyrique, aux opéras antérieurs du compositeur, mais aussi des clins d’œil au répertoire verdien.
Le rôle de Jack Rance en est un exemple, qui s’apparente au rôle de Iago dans Otello, tout comme l’air du Baiser qui rappelle « un baccio » d’Otello à Desdémone. Claudio Sgura (Dick Johnson) est exceptionnel par sa belle voix de baryton verdien qui donne à son interprétation la noirceur qu’impose la partition, avec une étendue qui de joue de tous les obstacles de la musique de Puccini. Il est de surcroît un grand comédien, ce qui ne peut qu’enrichir son interprétation.
Nous attendions avec intérêt Roberto Aronica qui remplaçait Marcelo Alvarez. Il n’a absolument pas démérité dans un rôle des plus exigeants. Son timbre est certes différent mais très en regard avec l’esprit de l’œuvre, à la fois vengeur, menteur, aimant, amant, enfin toutes les caractéristiques nécessaires à l’interprétation. Ce fut un réel plaisir et le public ne s’y est pas trompé.
Robert Carsen quant à lui a décidé de situer l’action dans les années 40, dans l’univers du Western. Le chœur, exclusivement masculin – le monde des chercheurs d’or , est à la fois acteur et spectateur. Selon son habitude, Robert Carsen laisse assez de liberté à ses protagonistes. Il utilise largement le plateau, avec un décor très conventionnel et des costumes des années 40, certes, mais liés à l’esprit de l’œuvre.
Première partie animée par le Ballet de l’Opéra Grand Avignon.
Cette soirée fut une belle réussite malgré tous les changements de distribution.
Encore une fois merci au Capitole-Studios et à Fanny Dulau pour leur programmation, cette année encore, riche en événements.
JL.A.