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Théâtre du Chien qui fume, 21h15, durée : 1h20. Du 7 au 29 juillet, relâche les 12, 19 et 26 juillet. Réservations au 04 84 51 07 48
Il en faut, du talent, pour rater un contre-ut !
Colorature, c’est l’histoire vraie de Florence Foster Jenkins, une milliardaire persuadée qu’elle avait une voix magnifique, qui a donné de nombreux concerts pour des œuvres caritatives, dont un très célèbre au Carnegie Hall, la plus prestigieuse salle de concerts de New York. Un enregistrement nous est parvenu, dont nous entendrons un extrait dans la pièce ; nos oreilles en frémiront…
La pièce commence avec Gregory Baquet au piano, qui jouera, lui avec justesse et talent – d’une famille bien connue -, tout au long du spectacle. Il réunit décidément toute la palette : acteur, chanteur, pianiste ; c’est un véritable régal de le voir et de l’entendre. Il est Cosmé McMoon et il va se confier au public, rétrospectivement après la mort de Mrs Jenkins, sur la collaboration qu’il a menée avec elle et sur les raisons qui lui ont fait accepter ce poste si particulier, depuis les premières répétitions avec elle jusqu’aux plus grands concerts.
Agnès Bove interprète Mrs Jenkins avec un talent impressionnant ; on ne peut qu’admirer comment cette soprano, excellente (comme elle le prouvera in fine, en chantant en direct), réussit à chanter si faux tout du long, massacrant allègrement tous les airs, de Mozart à Verdi. L’entendre chanter est une torture pour les oreilles mais déclenche automatiquement le rire, comme ont ri des milliers de spectateurs pendant ses concerts. Pour autant, Mrs Jenkins n’a jamais accepté d’entendre les critiques et reproches faits par son coach, puisqu’elle se croyait l’oreille absolue.
La grande force de ce spectacle est de ne pas se contenter d’une caricature de cette soprano, reprenant ses récitals ratés, mais il sait porter aussi un regard sensible et touchant sur cette femme, le regard de Cosmé justement, que l’on partage, qui nous montre les fragilités de celle qui s’exposait tant.
Un portrait donc tout en délicatesse et bienveillance, qui sait à la fois provoquer le rire – effet de surprise, de contraste, voire de défense ? – et toucher le cœur. Il en faut du talent, pour incarner un artiste raté !
Sandrine. Photo Marie Dicharry
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