Vendredi 25 avril 2025, 20h ; dimanche 27 avril 2025, 14h30. Durée 1h40. Opéra Grand Avignon
Zaïde, singspiel inachevé en deux actes de Wolfgang Amadeus Mozart (1780). Livret original, Johann Andreas Schachtner. Chanté en allemand, sur-titré en français
Direction musicale, Nicolas Simon. Composition / Orchestration, Robin Melchior. Mise en scène, Louise Vignaud. Dramaturgie / Livret parlé, Alison Cosson & Louise Vignaud. Décors, Irène Vignaud. Costumes à la création, Cindy Lombardi, repris par Alex Costantino. Lumières, Julie Lola-Lanteri, reprises par Christophe Delarue. Création sonore, Clément Rousseaux, reprise par Orane Duclos. Assistante à la mise en scène, Alison Cosson. Assistant lumières, Alexandre Schreiber. Études musicales / Continuo, Kira Parfeevets.
Zaïde, Aurélie Jarjaye. Gomatz, Kaëlig Boché. Allazim, Andres Cascante. Sultan Soliman, Mark van Arsdale. Inzel (narratrice), Charlotte Fermand
Orchestre national Avignon-Provence
Coproduction Opéra Grand Avignon, Opéra de Rennes et Angers-Nantes Opéra
AUTOUR DU SPECTACLE
« Baptême de l’air Zaïde », mercredi 16 Avril, 18h30, Opéra Grand Avignon. 6€/personne sur réservation : aurore.marchand@grandavignon.fr
Conférence autour de Zaïde avec Michel Barruol, samedi 19 avril, 14h30, Opéra Grand Avignon, Salle des Préludes, Gratuit
Immersion à l’Opéra Zaïde, vendredi 25 avril, 18h45, Opéra Grand Avignon ; réservée aux détenteurs du billet du spectacle du jour ; réservation : aurore.marchand@grandavignon.fr
« Prologues Zaïde », vendredi 25 avril, 19h15, et dimanche 27 avril, 13h45, salle des Préludes à l’Opéra ; 45 minutes avant les représentations de Zaïde, nous proposons un éclairage sur l’ouvrage ; entrée libre sur présentation du billet du spectacle.
Voir aussi toute la saison 2024-2025 de l’Opéra Grand Avignon
et tous nos articles d’avril 2025
Zaïde est un opéra quasiment absent du répertoire, le 12e sur les 22 du catalogue mozartien. Composé en 1780 sur un livret écrit en allemand, resté inachevé, il n’a été complété et créé qu’en 1866, en Allemagne. C’est Louise Vignaud qui l’a mis en scène tout récemment, en 2023, à Rennes, en co-production avec l’Opéra Grand Avignon, et c’est cette production qui nous est proposée pour le 8e et avant-dernier spectacle lyrique de la saison. Tout imprégné de l’orientalisme de l’époque, Zaïde – inspirée de la pièce éponyme de Voltaire (1732) – évoque les amours de deux jeunes esclaves chrétiens, Gomatz et Zaïde (interprétée par la soprano orangeoise Aurélie Jarjaye) dont le sultan est également amoureux ; ils fuient grâce au serviteur Allazim, mais sont dénoncés par un autre serviteur, Osmin ; or Allazim a jadis sauvé la vie du roi, qui le gracie. Mais on ignore quelle suite avaient prévue Mozart et son librettiste Johann Andreas Schachtner.
Louise Vignaud, assistée d’Alison Cosson, a comblé les lacunes de la narration, pour reconstituer la cohérence de cette œuvre originale, et la situe sur une île déserte, qu’elle envisage comme le symbole de l’ailleurs quel qu’il soit. « Malgré son inachèvement, « Zaïde » demeure une œuvre rare, précieuse, où se dessinent les lignes d’un Mozart engagé, libre et visionnaire », dit-elle. De bonnes raisons de la découvrir.
G.ad. Photo Studio Delestrade/ Avignon
NOTE D’INTENTION
Mettre en scène Zaïde est un projet qui m’a d’emblée passionnée, autant pour la musique de Mozart, que pour le travail de recherche et de réécriture que ce projet proposait. Un opéra sans ouverture, sans final, avec un livret posthume : ou tout simplement une grande machine à rêves et à possibles. Zaïde fait partie de ces opéras mystérieux car inachevés. En ce qui concerne la musique, il manque l’ouverture et le final – ou selon certains historiens même le troisième acte : soit le début et la fin, c’est-à-dire l’ancrage de l’histoire et surtout, sa résolution. Pour ce qui est du livret parlé, il est incomplet, et semble avoir été reconstitué après sa mort.
Le travail de réécriture est extrêmement périlleux car rapidement l’essence même de l’œuvre peut en être transformée. Je me suis attachée à la raison de l’écriture en me tournant d’abord vers Mozart : ses correspondances, un essai passionnant de Clément Rosset (Mozart et le silence), des biographies, afin de comprendre l’essence de sa musique et de sa recherche philosophique dans le contexte du XVIIIe siècle. Ce qui a fait émerger trois éléments.
Zaïde est le premier opéra franc-maçonnique de Mozart, un « opéra sérieux », qui propose une vision : c’est cette vision que j’ai cherché à comprendre. Selon plusieurs études, le sultan décide finalement d’épargner Zaïde, Gomatz et Allazim, et qui plus est de leur rendre la liberté. Cette clémence soudaine est intéressante, au-delà du coup de théâtre qu’elle propose : elle raconte que rien n’est jamais là où on l’attend, que la vérité est ailleurs. Zaïde propose ainsi une leçon d’humanisme, c’est-à-dire de foi en l’homme, et puisqu’on est au XVIIIe, en un homme éclairé. Ensuite, il y la notion d’expérience, d’initiation, induite par cette pensée franc-maçonnique. Notion que l’on retrouve couramment dans les récits ou pièces du XVIIIe français ou allemand. Chez Marivaux par exemple, avec L’île aux esclaves ou La dispute ; chez Montesquieu avec Les lettres persanes ; chez Voltaire avec Candide ou Zadig ; chez Lessing avec Le discours sur les francs-maçons ou Nathan le Sage. Il y a ce plaisir d’observation de l’autre, de mise à l’épreuve, d’étude du genre humain. C’est par cette porte que j’ai choisi d’entrer dans l’œuvre.
Enfin, il y a la notion d’orientalisme : elle m’a semblé intéressante en ce qu’elle proposait aux spectateurs du XVIIIe siècle un ailleurs, une civilisation qui fascine, un fantasme, la possibilité d’une autre lumière. Mais rien n’y fait référence dans les textes chantés ; l’opposition musulman / chrétien n’est évoquée que dans les textes parlés. Nous retiendrons ici la notion de distance, mais comme un ailleurs absolu.
Un monde lointain, fantasmé, où l’âme humaine est mise à l’épreuve, et où d’autres possibles peuvent advenir.
Zaïde est un opéra inachevé, sérieux, généreux, humaniste. Un conte philosophique destiné par Mozart à faire penser ses contemporains sur le genre humain, ses complexités, ses peurs, ses désirs. Proposer Zaïde à un public d’aujourd’hui, c’est lui offrir la possibilité de suspendre le temps pour écouter les âmes.
Louise Vignaud, metteuse en scène
ARGUMENT
Zaïde, composé par Mozart en 1780, est un singspiel inachevé en deux actes, inspiré par la mode des récits orientaux et l’attrait de l’exotisme au XVIIIe siècle. L’œuvre se situe dans un Orient imaginaire, dans l’empire ottoman, et mêle amour, oppression et quête de liberté, sur fond de critique de l’esclavage et des abus du pouvoir.
L’histoire débute dans le jardin du sultan Soliman, où Zaïde, une esclave chrétienne, tombe amoureuse de Gomatz, un jeune esclave chrétien également, qu’elle sauve d’une mort certaine. Gomatz et Zaïde rêvent de liberté et de fuite. Tous deux sont surveillés par Allazim, un autre esclave plus âgé, sage et loyal, qui joue un rôle de médiateur entre les jeunes amants et le monde cruel qui les entoure.
Mais leur amour est menacé : Soliman, le sultan, s’éprend à son tour de Zaïde. Quand il découvre sa trahison et l’amour qu’elle voue à Gomatz, il est envahi par la jalousie. Il fait arrêter les deux amants.
Dans l’air célèbre « Tiger ! Wetze nur die Klauen », Soliman exprime sa fureur et sa douleur d’avoir été rejeté. L’intrigue atteint un point culminant alors que les deux amoureux risquent la mort pour leur passion et leur loyauté l’un envers l’autre.
Malheureusement, Mozart n’achèvera jamais l’œuvre. Le livret de Johann Andreas Schachtner reste sans conclusion, et la fin du drame est laissée à l’imagination. Il est probable que Mozart envisageait une résolution morale : que le sultan, touché par la fidélité des amants, leur accorde la liberté.
Musicalement, Zaïde est une oeuvre puissante et expressive, annonçant déjà le génie dramatique de
L’Enlèvement au sérail ou La Clémence de Titus. Les airs sont expressifs, les ensembles d’une grande intensité, et Mozart y expérimente déjà une fusion entre la légèreté du singspiel et la profondeur de l’opéra sérieux. Malgré son inachèvement, Zaïde demeure une œuvre rare, précieuse, où se dessinent les lignes d’un Mozart engagé, libre et visionnaire.
NOTE SUR LE LIVRET
Rapidement, s’est imposée à moi la nécessité de réécrire le livret parlé. Si le texte des chants, par souci musical, resterait intouché, il s’agissait de reconstituer une histoire cohérente dans les trous. Ce livret parlé est toutefois extrêmement important car les monologues ou dialogues, nombreux, qui ponctuent l’histoire, permettent de la faire avancer : difficile de s’en passer ! Les airs ou duos quant à eux sont des moments d’action suspendus où les personnages font état de leurs sentiments. Pour ce travail, je me suis associée à Alison Cosson, avec qui j’avais déjà travaillé à des pièces écrites autour de matières préexistantes : Rebibbia d’après le livre L’Université de Rebibbia de Goliarda Sapienza et Le Crépuscule des singes d’après les vies et œuvres de Molière et Boulgakov. Alison a cette capacité d’écriture caméléon qui tout en affirmant un style poétique très personnel, sait jouer avec l’exercice de style.
L’idée pour ce livret réécrit serait à la fois de proposer une vraie modernité de langue tout en jouant avec l’esprit XVIIIe, sa candeur conjuguée à sa préciosité. C’est ainsi que nous sommes entrées dans la réécriture, en proposant une histoire qui s’apparente à un conte philosophique contemporain, le récit initiatique d’une jeunesse perdue mise à l’épreuve. On comprend que le point de départ du Zaïde original est une sombre histoire de navires, de pirates, de destins séparés par la mer. C’est de là que nous sommes reparties : d’un naufrage, sur un rivage lointain. Un naufrage, des naufragés, des rescapés. On repart à zéro. Il y a quelque chose du retour à l’état de nature, de l’histoire originelle. Les relations humaines peu à peu se reconstruisent. Nous n’avons pas touché aux textes des chants. Mais nous avons évidemment cherché avec Alison une langue qui soit cohérente pour chacun, et nous avons tâché de respecter les caractères dessinés par Mozart dans sa musique : Zaïde, esprit curieux et éprit de liberté ; Allazim, serviable et humaniste ; Soliman, séduit par le pouvoir et refusant le changement ; Gomatz, en perte de repères. S’est imposée à nous l’histoire de trois jeunes gens recueillis encore nourrissons et élevés sur une île à l’écart de tous par un esprit, jusqu’à l’arrivée d’un autre, Gomatz, qui va perturber cette organisation. Zaïde, c’est elle qui donne son nom à l’opéra : il était donc important que ce personnage, ses désirs, soient moteur dans l’intrigue. C’est elle qui donne l’idée de départ, c’est elle qui résiste, c’est elle enfin qui entraîne les trois autres vers un nouveau monde possible. Il était évidemment important pour nous de mettre en valeur la force de ce caractère émancipateur, et d’offrir ainsi à l’opéra un caractère féminin libre et affranchi de toute morale patriarchale.
Nous avons supprimé, en accord avec le chef Nicolas Simon, le rôle d’Osmin et le chœur d’esclaves. Il s’agissait de recentrer l’intrigue sur les quatre personnages principaux pour en extraire la « substantifique moelle », renforcer le huis clos pour rendre les enjeux de chacun d’autant plus forts : partir, rester, tuer, épargner, sauver, mourir. Nous avons en revanche ajouté un rôle parlé. La notion d’expérience supposait un maître du jeu, qui pouvait rappeler des personnages comme Sarastro dans La flûte enchantée, ou Prospero dans La Tempête de Shakespeare. Ce maître du jeu ne connaît pas l’issue : il ne donne pas une leçon, mais pose une question. Ce personnage, cet esprit, nous l’avons nommé Inzel. Esprit de l’île qui recueille les enfants, les met à l’épreuve de Gomatz, et leur offre la possibilité de grandir. Esprit qui accueille également le public, en ouvrant – une fois n’est pas coutume – la représentation. Notre Zaïde enjambe les siècles et les genres.
Cet opéra d’hier et d’aujourd’hui nous propose un instant de nous jouer des frontières aussi bien stylistiques qu’humaines, pour relier les Lumières à l’aune de notre monde contemporain – qui en a bien besoin !
NOTE DE MISE EN SCENE
Zaïde est un conte. De ces histoires qui ouvrent les portes de l’imaginaire, permettant de travailler un ailleurs. Les noms des personnages ont des consonances étrangères. Le texte est parsemé de références au vent, aux comètes, aux flots tempétueux.
Mais Zaïde est aussi un récit d’expérience, au sens premier du terme. Le XVIIIe siècle étudie le genre humain, fabrique des Encyclopédies, organise des expéditions scientifiques à l’autre bout du monde armées de microscopes et autres objets d’études et d’observation de la nature. C’est la jonction de ces deux univers, la mythologie et le laboratoire, qui m’intéresse à mettre en scène dans cet opéra. La mythologie d’abord. Le plateau de théâtre propose un ailleurs. On le regarde comme on regarderait par une fenêtre : un horizon de possibles, un monde qui n’est pas le nôtre. Il s’agira de reconstituer un espace étrange, inconnu. La scénographie représente de prime abord un rocher noir, massif, âpre, comme des ces roches noires et volcaniques qu’on peut observer sur les plages arctiques islandaises. Ou sur une lune imaginaire peut-être. Il peut faire penser également à L’Île des morts de Böcklin. Un espace clos où il faut être initié pour entrer. Des rochers phosphorescents, allumés comme par magie par Inzel, jonchent le sol. L’air est brumeux. Une composition sonore accompagne les moments textuels, pour accentuer l’organicité de l’île, le vent, la roche, l’écume.
Nous sommes introduits par Inzel, esprit à la peau bleue dont la tête est ornée d’une coiffe digne de Méduse. Elle ne fait pas partie de notre monde, assurément, et pourtant elle en a la langue, la familiarité, le concret. Elle semble connaître chacun de nous et s’en amuse. Parée d’un costume à la lisière entre le cabaret et une déesse sortie des eaux, brisant d’emblée le quatrième mur, elle invite le spectateur à plonger avec elle dans un univers fantastique. Si Gomatz est le seul personnage qui rappelle une certaine normalité, comme venu de « notre » monde, contemporain à nous, Zaïde, Allazim et Soliman appartiennent à l’univers fantastique d’Inzel. Leurs cheveux couleurs de lune, leurs vêtements fabriqués à partir de bouts de tissus et de cordages récoltés sur les rivages, leurs bijoux en coquillages, sont les costumes de ces enfants sauvages qui ont reconstitué une mini société entre eux, avec ses codes et ses ressemblances. Le tout premier travail de direction avec eux est de fabriquer ce groupe, de travailler avec eux l’imaginaire commun d’une enfance et d’une adolescence partagée. Les corps se connaissent, s’achoppent, jouent, se battent, s’enlacent ; ils ont leur familiarité. Mais nous sommes au théâtre, et là revient la question de l’expérience et du laboratoire. L’opéra commence par un texte d’Inzel, personnage qui n’est pas sans rappeler le Speaker de Calderon de Pasolini ou encore le Chœur shakespearien. Il raconte et donne les clés de la compréhension au spectateur. Ce prologue se passe devant un rideau qui dissimule le plateau ; Inzel se joue du théâtre, de sa surprise. Le dispositif d’observation se met en place autour d’elle. Lorsque le rideau s’ouvre, c’est bien au spectacle que nous assistons, à un spectacle orchestré par elle ; c’est aussi à une expérience clinique sur le genre humain.
La scénographie est donc également conçue comme un diorama, ces boîtes pensées comme des dispositifs de présentation où l’on peut observer, dans un décor reconstitué en trois dimensions devant un fond coloré, une espèce étrange, humaine en l’occurrence. Le cadre de scène est assumé pendant les interventions d’Inzel. Si dans le premier acte, celui de la rencontre, le mystère règne encore dans une atmosphère nocturne, le lever du jour accompagne symboliquement la prise de conscience du dispositif, une île où ils sont prisonniers, une boîte dans laquelle ils sont enfermés. Le mur d’étoiles devient des projecteurs sur pieds ; le rocher mystérieux, un décor reconstitué ; les rochers phosphorescents, des concrétions de plastiques échoués. La création sonore se fissure, s’électrise, s’électronise, rappelant une technicité de laboratoire. Tout est fictif et fabriqué. Le plateau est avant tout un lieu d’observation. La musique de Mozart arrête le temps.
Excepté le trio et les quatuors finaux, qui sont en mouvement et indiquent une action, les moments de musiques correspondent à un instant suspendu où le personnage observe ses sentiments, les analyse, se décrit, à lui-même ou à l’autre quand il s’agit d’un duo. C’est l’âme ici qui est au centre. C’est cette direction que je veux renforcer dans le travail : ce n’est pas, comme on peut en avoir l’habitude dans les mises en scènes d’opéra, l’artifice, le spectaculaire, le mouvement qui comptent, mais le dépouillement pour être en mesure d’écouter cette musique des âmes. Il s’agit donc de renforcer le huis clos, l’épure des mouvements, aller chercher leur répétition pour raconter l’enfermement, et offrir au spectateur une précision d’observation. Observer au microscope les sentiments, rechercher le vide pour aller chercher l’âme. La distribution est tout aussi radicale. Quatre personnages pour un opéra de deux heures, c’est peu. Ce n’est donc décidément pas l’intrigue qui est au centre, mais la façon dont elle agit sur eux, ce qu’elle provoque comme musique. C’est d’ailleurs en ceci que cet opéra de Mozart est profondément universel : il interroge l’humanité et sa capacité à recevoir et à donner ; il questionne l’essence.
Tout est présent pur, il n’y a pas de passé, donc aucune psychologie à prendre en compte. Dans ce décor abrupt, les chanteurs et la chanteuse ne peuvent pas mentir. La direction doit les amener à une finesse d’interprétation théâtrale, presque naturaliste, cinématographique. Il s’agit de trouver avec eux la vérité des rapports, faire surgir des individualités, refuser un jeu qui serait trop démonstratif et théâtralisé, trop psychologisant. C’est dire (ou chanter) qui fabrique l’émotion, non un sentiment préalable qui justifie le chant. Le subterfuge ne pardonne pas. Le jeune Mozart est exigeant, il offre des partitions de bravoure. Zaïde est un opéra de jeunesse, un opéra qui ne ment pas. Il fait appel à l’intelligence du spectateur, à sa capacité à s’ouvrir à l’autre, à la différence, à la nouveauté, pour se laisser surprendre et accepter de prendre le temps d’écouter, loin du spectaculaire et de la rapidité de succession d’événements dont la société contemporaine est friande. C’est un moment où le temps se suspend pour laisser place au conte, à son imaginaire, pour laisser place à la pensée. Zaïde, ou la mise à l’épreuve de l’ombre pour aller vers les lumières.
BIOGRAPHIES
Nicolas Simon, direction musicale
Nicolas Simon est chef principal de l’Orchestre de Caen, fondateur de La Symphonie de Poche, directeur musical du Yellow Socks Orchestra, et chef du projet Démos. Chef d’orchestre passionné par la transmission, il œuvre pour rapprocher musiciens, compositeurs et publics.
Formé au Conservatoire de Paris, il y obtient un Master de direction d’orchestre en 2010, après des études de violon et des rencontres marquantes avec Zsolt Nagy, Pierre Boulez ou encore François-Xavier Roth, qu’il assiste à plusieurs reprises. Il rejoint en 2014 l’orchestre Les Siècles en tant que chef associé.
Créatif et curieux, il fonde en 2013 La Symphonie de Poche, un ensemble à effectif réduit et à l’univers décalé, salué par la critique. Très engagé dans la démocratisation culturelle, il participe activement au projet Démos et fonde en 2018 Le Philharmonicoeur, orchestre solidaire et citoyen.
À l’opéra, il se distingue avec La Dame Blanche, Zaïde ou Pelléas et Mélisande, souvent en collaboration avec Les Siècles et la metteuse en scène Louise Vignaud. Il est également invité par de nombreux orchestres en France et à l’étranger, dont le London Symphony Orchestra, le Capitole de Toulouse ou encore l’Orchestre National de France.
Robin Melchior, composition / orchestration
Arrangeur-compositeur nourri d’influences musicales variées, Robin Melchior aime mélanger les genres et les sonorités. Son éclectisme et sa maîtrise de l’écriture instrumentale l’amènent à réaliser orchestrations, arrangements et compositions pour de multiples artistes et institutions. Ses travaux vont du répertoire symphonique (Orchestre Philharmonique de Radio France, Les Siècles, Ensemble Aedes, Orchestre des Pays de Savoie, Opéra de Rennes…) à la musique de film (Quatuor Debussy, Orchestre du Capitole de Toulouse, ONDIF…) en passant par l’électro, la variété ou encore les musiques de tradition orale (Orchestre National de Metz,
Un violon sur le sable, Trio Sora…). Longtemps guide-conférencier au Musée de la musique et actuellement professeur d’écriture et d’orchestration au CRR de Créteil, Robin Melchior considère la médiation et la transmission comme des éléments essentiels de son activité d’artiste. Convaincu par le pouvoir de cohésion humaine et sociale de la pratique collective, il est très investi dans le projet Démos (dispositif d’éducation musicale et orchestrale à vocation sociale de la Philharmonie de Paris).
Il est également le fondateur de Pixelophonia, un ensemble sympho-rock qui se consacre à la musique de jeu vidéo ; c’est avec passion qu’il y offre durant de nombreuses années ses qualités d’arrangeur, de pédagogue et de chef pour fédérer public et orchestre dans des spectacles énergiques et participatifs, à l’Auditorium Stravinsky de Montreux comme à l’amphithéâtre de l’Opéra Bastille. Depuis 2015, Robin Melchior est l’un des principaux arrangeurs-compositeurs de la Symphonie de Poche, une formation atypique qui place la création au cœur de son projet artistique, en revisitant de manière audacieuse la musique orchestrale (Chabrier, Debussy, Ravel, Gershwin, Bartók…), la chanson (Bourvil, Boris Vian) ou encore le cabaret (Francis Blanche, Kurt Weill).
Louise Vignaud, mise en scène
Diplômée de l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm en mars 2012 et de l’Ensatt (École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre) en octobre 2014, Louise Vignaud travaille à sa sortie d’école comme assistante auprès de Christian Schiaretti, Michel Raskine, Claudia Stavisky, Richard Brunel et Michael Delaunoy. Elle présente à la Comédie de Valence une mise en scène du Bruit des os qui craquent de Suzanne Lebeau en janvier 2015 dans le cadre des Controverses. En 2014, elle participe avec Maxime Mansion et Julie Guichard à la création du festival En Acte(s) dédié aux écritures contemporaines, pour lequel elle met en scène Ton tendre silence me violente plus que tout de Joséphine Chaffin… En 2014 également, elle crée à Lyon la compagnie la Résolue avec laquelle elle met en scène Calderon de Pier Paolo Pasolini, La Nuit juste avant les forêts de Bernard-Marie Koltès et Tailleur pour dames de Georges Feydeau.
Associée au Théâtre National Populaire de 2018 à 2020, elle y met en scène Le Misanthrope de Molière, Rebibbia d’après Goliarda Sapienza et Agatha de Marguerite Duras. À partir de septembre 2021, elle est artiste associée à la Comédie de Béthune. En 2018, elle met en scène Phèdre de Sénèque au Studio-Théâtre de la Comédie Française et Le Crépuscule des singes en 2022 pour le 400e anniversaire de la naissance de Molière, création d’après les vies et œuvres de Molière et Mikhaïl Boulgakov au Théâtre du Vieux-Colombier. Entre 2017 et 2021, elle dirige le théâtre des Clochards Célestes, à Lyon, où elle met en scène en 2018 Le Quai de Ouistreham de Florence Aubenas.
Elle fait ses débuts à l’opéra grâce à la co[opéra]tive pour laquelle elle met en scène en novembre 2020 La Dame blanche de François-Adrien Boieldieu, sous la direction musicale de Nicolas Simon. Elle suit depuis mars 2021 la résidence jeunes créatrices d’opéra à l’Académie du Festival d’Aix-en-Provence, encadrée par Katie Mitchell.
Aurélie Jayjaye, soprano
Aurélie Jarjaye, soprano originaire d’Orange, débute par le piano avant de se former au chant à la Maîtrise de Notre-Dame de Paris puis à la Haute École de Musique de Lausanne. Elle y incarne La Gouvernante dans Le Tour d’écrou de Britten (2014) et fait ses débuts professionnels la même année dans Phi-Phi d’Henri Christiné. Elle se produit ensuite en Suisse (Le Roi David, Requiem de Bottesini) et à l’Opéra de Lausanne dans L’Enfant et les Sortilèges de Ravel.
Son parcours l’amène à interpréter des œuvres rares sur des scènes prestigieuses : Dircé dans Idoménée de Campra à Vienne, Marei dans George le rêveur de Zemlinsky (Nancy, Dijon), ou encore le Rossignol dans Les Rêveurs de la Lune d’Howard Moody à Avignon. En 2023, elle est invitée dans Musiques en Fête, diffusé en direct des Chorégies d’Orange.
Kaëlig Boché, ténor
Kaëlig Boché, ténor, est diplômé du CNSM de Paris en 2019 avec un premier prix et Révélation Classique de l’ADAMI en 2017. Il débute sur scène dans Carmen à Dijon et Ernani au Théâtre des Champs-Élysées, puis enchaîne les rôles : l’Aubergiste dans George le rêveur (Dijon, Nancy), Roderigo dans Otello (Saint-Étienne), ou encore le Prince Quipasseparla dans Le Voyage dans la Lune lors d’une large tournée Génération Opéra.
En 2023, il incarne Gomatz dans Zaïde de Mozart (Rennes, Nantes) et Cossé dans Les Huguenots à Marseille. En 2024, on le retrouve à Lille dans Tristan et Isolde (rôles du Bergé et du Timonier).
Nous l’avons entendu il y a quelques jours dans Sigurd à Marseille (NDLR).
Andres Cascante, baryton
Andres Cascante, baryton costaricien, est formé à la Juilliard School, à Yale et au Merola Program de l’Opéra de San Francisco. Lauréat de plusieurs concours (Opera Index, Irene Dalis), il est demi-finaliste des Metropolitan Opera National Council à 22 ans. Il se distingue également comme instrumentiste, jouant notamment de la guitare baroque dans L’Orfeo de Rossi à New York.
En 2022, il rejoint l’Académie de l’Opéra national de Paris, où il chante Germano dans La Scala di seta à l’Athénée, et participe aux productions de L’Enfant et les Sortilèges et The Exterminating Angel. Membre des académies d’Aix-en-Provence et de Pesaro, il incarne Don Profondo dans Le Voyage à Reims. Il se produit aussi à Turin (The Tender Land, Il Tabarro) et chantera le Sacristain dans Tosca à Limoges et Vichy en 2024-2025.
Mark Van Arsdale, ténor
Mark Van Arsdale, ténor originaire du Colorado, est diplômé des universités de Northwestern et d’Indiana. Passé par l’Opéra Studio du Rhin et l’Académie de l’Opéra-Comique, il débute sous la direction de James Levine en Don Ottavio (Don Giovanni) à Tanglewood, un rôle qu’il reprend régulièrement.
Il interprète une large palette de rôles sur les scènes françaises et européennes : Ramiro (La Cenerentola), Tamino (La Flûte enchantée), Belmonte (L’Enlèvement au sérail), Nadir (Les Pêcheurs de Perles), Arturo (Lucia di Lammermoor), Lurcanio (Ariodante), Saladin (Ali Baba), Achille (La Belle Hélène), ou encore le rôle-titre de Phaëton de Lully. Il chante également au Maggio Musicale Fiorentino dans Acis et Galatée.
En concert, il se produit dans des œuvres de Haendel, Haydn, Mozart, Bach, Britten, Gounod, Berlioz et Rossini avec divers orchestres en France et aux États-Unis. En 2024-2025, il reprend aussi La Flûte enchantée à Reims, et chante en concert aux États-Unis.
Charlotte Fermand, comédienne
Charlotte Fermand est une comédienne et metteuse en scène française, formée au Conservatoire national supérieur d’art dramatique (CNSAD). Son parcours théâtral est marqué par une exploration audacieuse de textes contemporains et classiques, avec une attention particulière portée aux écritures féminines et aux formes engagées.
Elle a collaboré avec des metteurs en scène tels que Louise Vignaud (Le Misanthrope, Suspicion), Amine Kara-Kidia (Manque, 4.48 Psychose de Sarah Kane), et Christian Taponard (Extraordinaire et mystérieux de Martin Bellemare). En 2019, elle incarne Adamantine dans Dans l’éclat du secret de Julie Ménard, sous la direction de Maxime Mansion. Elle participe également à des créations collectives comme Théorie pratique de l’espoir en milieu inhospitalier de Pauline Noblecourt, mise en scène par Clément Morinière.
En tant que metteuse en scène, Charlotte Fermand conçoit Stabat Mater Furiosa de Jean-Pierre Siméon en 2016. Elle est également active au sein de la Compagnie Hystera et collabore avec des structures telles que le Théâtre de la Croix-Rousse et La Machinerie – Théâtre de Vénissieux
Laisser un commentaire