Du vent dans les cheveux, mais surtout de l’émotion dans les oreilles !
Lundi 22 juillet 2024, 21h30, durée 2h35, Théâtre Antique d’Orange, dans le cadre des Chorégies 2024 (site officiel)
Tosca, musique de Giacomo Puccini (1858-1924). Livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa, d’après la pièce de Victorien Sardou. Création : Teatro Costanzi de Rome, 14 janvier 1900
Direction musicale, Clelia Cafiero. Orchestre philarmonique de Nice, chœurs de l’opéra du Grand Avignon et des Chorégies
Floria Tosca, Aleksandra Kurzak. Mario Cavaradossi, Roberto Alagna. Baron Scarpia, Bryn Terfel. Cesare Angelotti, Jean-Vincent Blot. Sciarronne, Jean-Marie Delpas. Il carciere, Jean-Marie Delpas. Spoletta, Carlos Natale. Il sacristano, Marc Barrard. Pastore, Galia Bakalov
Le mistral balaie les abords du majestueux théâtre antique, faisant voler les sacs où tous les habitués ont mis leur indispensable coussin. Si nous nous réjouissions d’avoir un peu d’air en cette chaude soirée, le mieux fut néanmoins l’ennemi du bien. En effet, dès le placement des partitions, celles-ci s’envolaient et ce fut pire à chaque changement de page. Pauvres musiciens azuréens ! Ils n’ont cependant pas démérité et ont bien interprété la partie instrumentale de l’œuvre, sous la baguette de leur dynamique cheffe Clelia Cafiero. Précise dans sa gestuelle, elle a mené l’Orchestre philarmonique de Nice au mieux de ce qu’il était possible de faire dans ces conditions là.
Une autre question me taraudait : que peut bien donner la version concertante d’un opéra aussi connu que Tosca dans un tel lieu ? Compte tenu des contraintes imposées par une exécution en extérieur, le jeu en valait-il la chandelle ? Je ne reviendrais pas sur ce choix contestable et contesté de la direction des Chorégies pour 2024. Cependant, l’envie d’écouter ces grands artistes avait aiguisé ma légitime curiosité, surtout en cette année du centenaire de la disparition de Puccini.
Bonne surprise, dès les premières mesures, le tableau d’une Madone est vidéoprojeté sur le grand mur. Il situe l’action dans la chapelle où travaille le peintre Mario Cavaradossi. Il en sera de même avec le palais Farnese, puis le château Saint Ange. Plus intéressant encore, les solistes ont tout de même utilisé l’immense plateau. Les premiers en scène, Marc Barrard – qu’on retrouvera quatre jours plus tard à Gordes pour les Olympiades de l’Opéra – et Jean-Vincent Blot y semblent à leur aise pour déployer leur voix. Il n’y a aucun problème pour les entendre sauf lorsqu’ils s’orientent à l’opposé de nous : maudit soit le mistral qui emporte leurs voix ! Pour sa part, Roberto Alagna ne s’économisant pas, il enflamma tout le théâtre antique à chacun de ses airs. Il fut bien malin de se positionner au plus près du mur qu’il connaît si bien, pour que ce dernier renvoie le son vers le public.
Dans le 1er acte, Sir Byrn Terfel sembla plus perturbé par la difficulté à rester au contact de l’orchestre. Cependant, au fil de la soirée, nous retrouvâmes en lui le fameux interprète magistral de Scarpia. Ses mimiques se firent plus prononcées et son timbre, aussi cruel que nous l’attendions. Son duo de la fin du deuxième acte avec Aleksandra Kurzak, en Tosca, fut véritablement apprécié. La soprano était en effet particulièrement convaincante. Malgré le vent, elle sut moduler sa voix selon la situation. Lors du célèbre aria, les 8000 spectateurs retenaient leur souffle : elle y fut parfaite. Son amant dans l’œuvre, son époux à la ville, nous procura les mêmes frissons au troisième acte.
Quand arriva le moment d’applaudir, je réalisais que, comme le public, j’étais bel et bien entré dans le drame de Tosca : la soirée était réussie !
N.A., texte & photos
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