Emouvant…
Festival d’Aix-en-Provence au Conservatoire Darius Milhaud (lundi 15 juillet 2024)
Soprano, Sondra Radvanovsky. Piano, Anthony Manoli
Henry Purcell, When I am laid. Georg Friedrich Händel,Piangerò la sorte mia. Sergueï Rachmaninov, Ne me chante pas, ma belle ; Que l’on est bien ici ; Je t’attends. Richard Strauss, Jour des morts ; Libérée ; Demain ; Invitation secrète. Franz Liszt,Tre sonetti del Petrarca. Jake Heggie, If I had know. Umberto Giordano, La mamma morta.
La Canadienne Sondra Radvanovsky reste aujourd’hui parmi les plus recherchées de la planète lyrique, pour interpréter les rôles les plus lourds de soprano dramatique, au sein du répertoire italien principalement. Elle enchaîne ainsi, dans les théâtres les plus prestigieux, les Turandot, Lady Macbeth, Tosca, Maddalena (Andrea Chénier)… En première invitation au Festival d’Aix-en-Provence, elle a préparé ce soir un récital très personnel, évoquant les évènements marquants de ses trois dernières années, entre disparition de sa mère et nouvelle relation amoureuse avec le médecin s’étant occupé de celle-ci.
Le démarrage du programme ne séduit pas vraiment l’oreille, aussi bien dans « When I am laid » de Dido and Aeneas (Purcell) que « Piangerò la sorte mia » de Giulio Cesare (Händel). Le vibrato y est en effet très développé, tout comme la puissance du son, tandis que l’agilité se révèle insuffisante dans la section centrale de l’air de Cléopâtre.
Les airs de Rachmaninov qui suivent lui conviennent mieux, dans un vibrato qui semble plus naturel. Elle dédie ces passages au baryton russe Dmitri Hvorostovsky (1962-2017), disparu prématurément à la suite d’une tumeur au cerveau, un ami proche qui lui est resté très cher. Les quatre Lieder de Richard Strauss dans la suite sont chantés avec de très louables attentions, la difficulté restant de toute évidence les passages en mezza voce, dont le contrôle a tendance à lui échapper.
Après l’entracte, les Tre sonetti di Petrarca de Franz Liszt confirment l’inadéquation de ces pages, le plus souvent très délicates, avec le format vocal de la chanteuse, d’un volume très élevé, voire bien trop important. La mélodie « If I had known » du compositeur Jake Heggie, sur un poème de Sondra Radvanovsky elle-même, est particulièrement touchante. Tout comme « La mamma morta » tiré d’Andrea Chénier de Giordano, cette fois en plein cœur du répertoire de l’interprète, un air chargé d’émotion entre des graves assurés et pleins, et une extension vers le registre aigu régulièrement surpuissante.
Accompagnée par son valeureux pianiste Anthony Manoli, la soprano accorde quatre généreux bis, qui correspondent a priori idéalement à ses caractéristiques vocales. C’est d’abord « Io son l’umile ancella » extrait d’Adriana Lecouvreur, avec des résultats variés pour ce qui concerne les doux passages allégés : très belle phrase « un soffio è la mia voce », mais diminuendo final qui lui échappe. « Pace, pace mio Dio ! » de La forza del destino est sans doute le sommet de la soirée, magnifique d’ampleur et de sentiment véhiculé, développé sur une technique sans faille. « Vissi d’arte » de Tosca est malheureusement entaché d’une nouvelle difficulté à trouver et tenir la note piano, en fin d’air. Le célèbre « O mio babbino caro » qui provient de Gianni Schicchi de Puccini est enfin une belle conclusion, air ici d’une jolie musicalité, conduit par une grande chanteuse cette fois en totale maîtrise.
I.F., texte et photo
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