… et une heureuse découverte : Caillebotte, sous le photographe, le compositeur
Collégiale Saint-Didier, Avignon (13 et 15 octobre 2017)
Fauré, Cantique de Jean Racine opus 11 ; Caillebotte, Ecce quam Bonum, pour orchestre, chœur et orgue ; Fauré, Requiem opus 48
Michel Piquemal, direction (notre entretien ici)
Orchestre Régional Avignon-Provence
Chœur Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur
Daphné Touchais, soprano ; Richard Rittelmann, baryton
http://www.orchestre-avignon.com/ et www.operagrandavignon.fr
Ce fut un beau concert en ouverture de saison, sous le titre de « Spiritualité française », et le public lui a fait honneur.
Le Requiem de Fauré, pièce de choix, a fait monter sous les voûtes de la collégiale sa belle sérénité confiante, dans une orchestration riche et sobre à la fois, en version deux solistes. Sans doute l’œuvre la plus jouée de Gabriel Fauré, créée au tournant du XXe siècle et qui respire une espérance sereine. « Mon Requiem, dira plus tard le compositeur, on a dit qu’il n’exprimait pas l’effroi de la mort, quelqu’un l’a appelé une berceuse de la mort. Mais c’est ainsi que je sens la mort : comme une délivrance heureuse, une aspiration au bonheur d’au-delà, plutôt que comme un passage douloureux ». On raconte que le curé de l’église de la Madeleine, où fut créée l’œuvre, lui, ne l’entendait pas de cette oreille : « Monsieur Fauré, nous n’avons pas besoin de toutes ces nouveautés, aurait-il ainsi fulminé ; le répertoire de la Madeleine est bien assez riche, contentez-vous-en ! ».
Avant le Requiem, les spectateurs avignonnais ont découvert en Martial Caillebotte, plus connu comme photographe et frère du peintre Gustave, un compositeur injustement méconnu, dans la partition riche et chatoyante de la messe Ecce quam bonum. C’était un cadeau de Michel Piquemal, qui en a pour l’instant l’exclusivité concédée par la famille, mais qui souhaiterait la partager et la transmettre.
Le limpide Cantique de Jean Racine, d’un Gabriel Fauré d’à peine 19 ans, avait ouvert le programme.
Sous l’énergique et chaleureuse direction de Michel Piquemal, l’Orchestre Régional Avignon-Provence, son complice artistique depuis de longues années, a ce soir-là développé ses plus beaux accents, enrichi de quelques supplémentaires, dont l’orgue positif (Luc Antonini) et la harpe aérienne (Martine Flaissier).
Le Requiem dégageait bien les divers pupitres, soulignant les fermes attaques des altos (Fabrice Durand chef de pupitre) et violoncelles (Nicolas Paul), la chaude présence des contrebasses (Frédéric Béthune), la limpidité de la harpe, les envolées des violons (Cordelia Palm super soliste), l’éclat des cors (Thomas Breuque), trompettes (Thierry Aubier) et trombones (Didier Comte).
Le Chœur régional Provence-Côte d’Azur au grand complet a prouvé, une fois de plus, son professionnalisme, aux côtés de l’Orap. Quant aux solistes, si la soprano Daphné Touchais n’a pas vraiment emporté l’adhésion, apparemment nouée par le stress, en revanche le baryton niçois Richard Rittelmann a fait l’unanimité, par le velouté du timbre jusqu’à quelques belles inflexions de basse, et l’expressivité de l’interprétation, notamment dans le « Dies irae » puissant et le « Libera me » poignant ; le souhait du compositeur, d’« un baryton-basse tranquille, un peu chantre », a été ce soir-là exaucé.
Une nouveauté cette année : le concert a été donné deux fois, le vendredi soir et le dimanche en matinée, comme d’autres concerts de la saison. (G.ad.) (Photo Daphné Touchais : Ledroit Perrin)