On perçoit, palpable, une âme
Opéra Grand Avignon, mercredi 1er février 2023, 20h
Quatuor Varese. François Galichet, Julie Gehan Rodiguez, violons. Jacques Perez, alto. Thomas Ravez, violoncelle
Robert Schumann, Quatuor N°2 opus 41. Franz Schubert, La jeune fille et la mort.
Réservations Opéra Grand Avignon. Tarif 20€ à 8€
Voir aussi toute la saison 2022-2023 de l’Opéra Grand Avignon
Et la saison de récital/ musique de chambre
Ce fut un très beau concert, comme les précédentes soirées chambristes de la saison.
Malgré l’arrivée presque récente du 2nd violon Julie Gehan Rodriguez (2016), la formation dégage une impression de parfaite homogénéité, de solidité et de sereine concentration.
Fondé en 2006 au Conservatoire National Supérieur de Musique et Danse de Lyon, le jeune Quatuor Varèse (site officiel et page Facebook ) a reçu les conseils des plus grandes formations analogues, Quatuors Debussy, Ravel et Danel. Il poursuit ensuite son parcours auprès du Quatuor Ysaÿe – comme le Quatuor Girard – et bénéficie d’un contact privilégié avec des musiciens de renom.
François Galichet, membre fondateur, a été d’abord formé au Conservatoire de Rouen, et son récital de fin d’études au Conservatoire de Lyon a obtenu TB à l’unanimité ; Julie Gehan Rodriguez, venue d’Angers, est passée par Erasmus et plusieurs orchestres prestigieux (Orchestre de Paris, Orchestre National de France, Orchestre de Chambre de Paris, et en 2013 Orchestre de la Garde Républicaine), avant de rejoindre, passionnée de musique de chambre, le Quatuor Varèse en 2016 ; Jacques Perez, altiste, après le Conservatoire de Lyon et une formation à Montréal, s’est enrichi de diverses collaborations internationales, participant par exemple à la tournée américaine du pianiste Lang-Lang et au Festival de La Folle journée de Nantes, avant de rejoindre le Quatuor Varèse en juin 2010 ; Thomas Ravez enfin, violoncelliste, est passé brillamment du Conservatoire de Reims à celui de Lyon, après avoir reçu les enseignements d’Anne Gastinel notamment, et a fondé le Quatuor Varèse avec son condisciple François Galichet.
Dès 2009, trois ans après sa création, le Quatuor a obtenu le 2e prix Adami au Concours International de Musique de Chambre de Lyon et le Prix Lions Rotary, et ne cesse de recueillir récompenses dans divers concours (Jeunes talents en 2012, Mozart, Schubert, Ravel…), s’illustrant aussi dans la musique contemporaine.
Ce jeune quatuor est invité sur tous les continents, et joue de beaux instruments historiques prêtés par diverses fondations. Il se produit par ailleurs avec Manu Comté au bandonéon dans un programme « Tango Nuevo », et prépare un CD Schumann pour 2024.
En cette soirée d’hiver, il fait entendre sur la scène de l’Opéra Grand Avignon deux grandes pièces de la musique romantique allemande, Schumann et Schubert. Écoute mutuelle, excellente maîtrise technique de chacun, et belle sensibilité d’interprétation, dessinent un concert de haut vol.
Le public a offert en retour une écoute respectueuse. Chaque pièce a déroulé sa cohérence interne et le kaléidoscope de ses nuances. La rapidité d’exécution pour l’opus 41 de Schumann, allègrement enlevée ce soir, avec des attaques précises, restitue en excellence le bonheur d’un compositeur trentenaire, mari et jeune père comblé. Schumann voulait se mesurer à ses aînés, à « la grande ombre de Beethoven qui planait juste avant lui, a rappelé brièvement l’altiste Jacques Perez, ainsi que l’étoile de Mendelssohn qui brillait alors, soulignée par Schubert ».
En seconde partie, Schubert offre un autre moment de grâce, mais dans le tourment d’un compositeur de 31 ans, touché par la syphilis et angoissé par la mort prochaine. Les deux violons chantent doucement, puis le premier violon crie son déchirement. Dans le deuxième mouvement, le phrasé se fait lancinant, chaque phrase se détache, avant que la violence d’un tutti ne nous étreigne. Le troisième fait vibrer toute l’intensité des instruments, dont le tempo, tout en finesse, sublime chaque ligne mélodique.
En bis, longuement demandé par le public, le Scherzo du 1er Quatuor de Schumann déploie toute sa fougue, et toute la solide complicité artistique qui cimente la formation.
Voilà une soirée où l’on perçoit, presque palpable, une âme… On aura plaisir à réentendre ce magnifique quatuor dans la saison 2023 des Musicales du Luberon.
G.ad. Photos DR & G.ad (concert)
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