Pomme d’Api, petit bijou d’Offenbach au Théâtre de l’Odéon de Marseille
Pomme d’Api, opérette en un acte de Jacques Offenbach, à Marseille, Théâtre de l’Odéon (26 septembre 2025)
Jean-Christophe Keck, direction musicale
Julia Knecht, Catherine ; Xavier Mauconduit, Gustave ; Philippe-Nicolas Martin, Rabastens
Orchestre de l’Opéra de Marseille
C’est Jean-Christophe Keck, le grand musicologue spécialiste d’Offenbach, également chef d’orchestre, qui présente d’abord le concert au public. Pomme d’Api, « l’une des toute meilleures pièces en un acte de Jacques Offenbach » a été créée en 1873 au Théâtre de la Renaissance à Paris. L’occasion de rappeler quelques événements de cette année-là, mais aussi de faire jouer à l’orchestre de très brèves mesures du Concerto pour violoncelle de Camille Saint-Saëns, joué pour la première fois en 1873.
C’est en représentation de concert qu’est interprété l’ouvrage, dans son orchestration originale, avec l’ensemble des artistes en place sur le plateau. Les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Marseille sont en nombre suffisant pour assurer une confortable homogénéité de son et une qualité d’interprétation maintenue tout du long, aussi bien pour détailler de jolies mélodies à la flûte, maîtriser les traits de virtuosité des différents instruments, que faire monter le tourbillon offenbachien dans les tutti enthousiasmants. Ceci est vrai dès l’Ouverture, exposant plusieurs mélodies qui seront développées plus tard au cours de l’opérette.
L’intrigue est déjà une promesse de sourires et de rires : le célibataire endurci Rabastens, 48 ans mais « 39 pour les femmes », vient de licencier sa femme de ménage et passe une annonce pour une nouvelle bonne. Parallèlement, Rabastens a obligé son neveu Gustave à se séparer de Pomme d’Api, une liaison qui durait depuis deux ans, bien trop longtemps aux yeux du tonton, pour qui il faut changer de femme tous les trois mois. La nouvelle bonne se présente, sous le nom de Catherine, et Rabastens lui fait immédiatement la cour. Gustave reconnaît un peu plus tard Pomme d’Api sous les traits de Catherine, puis celle-ci consentira finalement à se remettre en ménage avec son jeune amant, au vu de ses preuves d’amour. D’abord furieux, Rabastens donnera sa bénédiction au mariage, pour un heureux dénouement.
Les trois solistes sont alignés ce soir en bord de scène, derrière leur pupitre, bien utile non seulement pour le chant, mais aussi pour des dialogues parfois assez conséquents qu’il serait sans doute déraisonnable de maîtriser par cœur pour cette représentation unique. C’est le Rabastens de Philippe-Nicolas Martin qui entame les débats, belle voix lyrique de baryton, excellement projetée et à l’articulation soignée du texte. Les deux autres interprètes sont davantage des voix d’opérette, d’abord la soprano Julia Knecht en Catherine, d’une diction très claire pour les dialogues, mais parfois moins facilement compréhensible, en particulier dans le bas du registre qui se révèle moins sonore. Le ténor Xavier Mauconduit compose un Gustave attachant, qui porte souvent toute la naïveté du personnage, d’un instrument plutôt large et confortable dans le médium, mais qui a tendance à se resserrer sur des notes aiguës régulièrement émises avec un effort visible et sans doute préjudiciable à la bonne gestion des ressources vocales.
Les numéros se succèdent, d’une grande séduction mélodique, aussi bien les airs pour solistes que les ensembles, comme l’impayable Trio du gril « Va donc, va donc chercher le gril ! ». On tombe sous le charme de la Romance pleine d’émotion de Gustave « Consultez votre cœur » en fin d’opus, et l’on apprécie aussi le plus joyeux Rondeau de Catherine / Pomme d’Api « J’en prendrai un, deux, trois … », où la jeune fille compte ses éventuels futurs amants (… jusqu’à neuf !). Cette mélodie et ses paroles sont d’ailleurs reprises dans le trio final, un passage à nouveau proposé en bis pour clore joyeusement la représentation.
F.J. Photos © I.F.
Laisser un commentaire