La pluie s’invita, le soleil s’imposa, jailli des œuvres de Haydn et Mozart
Jeudi 18 août 2022, 21 h, Auditorium du Parc, Festival International de Piano de La Roque d’Anthéron
Orchestre National d’Auvergne, Christian Zacharias, piano et direction
Haydn, Symphonie n° 43 « Mercure ». Mozart, Concerto pour piano et orchestre n° 9 « Jeunehomme». Haydn, Symphonie n° 45 « Les Adieux »
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Pluie et soleil, tel fut le programme en cette nuit du 18 Août. La pluie s’invita, le soleil s’imposa, jailli des œuvres de Haydn et Mozart interprétées par l’Orchestre National d’Auvergne, en formation orchestre de chambre (26 exécutants), et Christian Zacharias. J’ai toujours apprécié l’art de Zacharias pianiste et regrette qu’il ne nous ait offert de cet art que le seul concerto de Mozart et son bis. Un peu plus de piano nous aurait comblé. Mais ne boudons pas notre plaisir, il est aussi chef d’orchestre talentueux dans le répertoire classique, comme nous l’a confirmé cette soirée.
Deux symphonies de Haydn, de sa période « Sturm und Drang » (tempête et passions), encadraient le concerto de Mozart. D’abord, la n° 43, en mi bémol majeur, datée de 1771, sous-titrée « Mercure », on ne sait pourquoi, dans le courant du 19ème siècle. L’allegro initial fut bien mené, vivant, le chef en détaillant les inflexions, les temps calmes, les accélérations. L’adagio, accompagné du roulement d’un orage lointain, s’écoula bien sage et même lyrique, jusqu’à sa conclusion paisible et sereine. On y notera un court mais joli passage en pizzicati. Le menuet, troublé un moment par un perturbateur – un engin volant dans le ciel de La Roque -, fut enlevé, dynamique, entraînant, peut-être un petit peu lourd. L’allegro final, vif et décidé, menait à une coda, se terminant sur une note rêveuse.
S’installant ensuite au piano, Christian Zacharias dirigeait et interprétait le concerto « Jeunehomme », que Mozart écrivit en 1777 pour une pianiste française de passage portant ce nom ou, selon certains musicologues, celui de Jenamy. L’allegro fut joué quasiment vivace, gai, joyeux, optimiste. L’andantino débutait rêveur et apaisé, rejoint à son tour par un roulement de tonnerre lointain, puis le bruissement des ponchos que le public déplie, les premières gouttes tombaient, l’averse et les mouvements d’une partie de l’assistance cherchant un abri interrompirent le concert. Facétieux, après avoir adressé quelques paroles au public, Zacharias reprit malgré tout et termina son andantino pour attaquer un rondo décidé et dominateur, beau mouvement présageant déjà les concertos de la maturité. Une belle ovation salua cette interprétation d’un chef et pianiste visiblement amusé par cette péripétie, offrant en bis, vif et joyeux, clairement exposé, le rondo en ré majeur K. 485 de Mozart.
L’artiste nous a une nouvelle fois enchantés, par la délicatesse de son jeu, son élégance, son souci du détail et de la précision, de la clarté, de l’articulation du discours musical. Sa direction d’orchestre dénote les mêmes qualités, ne recherche pas le tape-à-l’œil ; elle est simple, souple, soulignant les nuances, semblant sculpter le morceau qu’il interprète.
La pluie ayant cessé, le quart d’heure de pause que l’artiste avait demandé fut raccourci et le concert reprit avec l’introduction autoritaire de la symphonie Les Adieux, surprenant la partie du public qui s’était égaillée. L’adagio en est original, sautillant, subtil, serein, le menuet cadencé et joyeux. Le presto est magnifique, décidé, vif, qui, au final, laisse la place à un adagio plus réfléchi, qui va voir l’orchestre s’éteindre progressivement, d’abord avec l’arrêt des vents (2 cors, 2 hautbois, 1 basson), puis des contrebasses, après une jolie partie soliste, suivies, au fur et à mesure des autres cordes jusqu’à l’extinction des deux derniers violons. Comme j’aurais voulu revivre le scénario de la création de l’œuvre en 1772 et voir les musiciens quitter la scène un à un, à mesure de la fin de leur partition, ç’aurait été original ! Ce sera pour une prochaine fois. Cette belle interprétation, en tout cas, déclencha une ovation enthousiaste et débordante, saluant un orchestre sans reproches et un Zacharias communiant, souriant, avec son public.
Tous ne se firent pas prier pour donner en bis le rondo allegro de la Petite Musique de Nuit, vif et rapide, histoire de mettre en valeur les cordes de l’Orchestre National d’Auvergne, en parfaite cohésion et d’une belle sonorité, en particulier, ai-je noté, du côté des violoncelles et des contrebasses.
L’ovation reprit de plus belle, et c’est à regret que le public vit les musiciens quitter la scène.
B.D. Photos Valentine Chauvin
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