Et si l’ « Etrangère » nous livrait (la vérité de) l’ « Etranger » ?
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Théâtre du Balcon, du 5 au 26 juillet 2025, 13h30, 1h30. Relâche les 10, 17, 24 juillet. Tout public à partir de 10 ans. Réservation : 04 90 85 00 80
Et pourquoi pas Marie Cardona plutôt que Meursault ? Si le regard d’une femme ouvrait d’autres fenêtres au roman de Camus ? C’est le pari de Jean-Baptiste Barbuscia, auteur et néo-metteur en scène. Un pari d’autant plus audacieux qu’il s’inscrit dans un récit enchâssé qui va vite déboucher sur un jeu de piste, ou enquête policière, c’est selon…
Ainsi un professeur, lui très « classique », et sa seule élève, elle très… actuelle, nouent peu à peu une authentique relation, d’intelligence et de confiance partagées, autour du roman de Camus. La fraîcheur de la jeunesse s’oppose avec une impertinence salutaire – et tellement juste – au professeur engoncé dans sa lecture formatée.
La narration se dessine, avec les mots de Jean-Baptiste Barbuscia, avec une vraie sensibilité, dans un hommage libre mais respectueux à l’écrivain. C’est sans doute sa principale réussite : révéler la vérité de l’Etranger en le regardant par un prisme inattendu.
Ainsi Marie l’étudiante donne corps à Marie l’amante, et à travers elle libère la parole féminine ; elle donne aussi de l’épaisseur aux personnages secondaires, qui n’étaient dans le roman que simples silhouettes sur lesquelles Meursault promenait son regard absent. Et ce sont ces deux Marie, parfois indissociables, qui, dans leur pleine présence au monde, vont faire jaillir paradoxalement la vérité « étrangère » de Meursault.
Le jeu des deux comédiens porte ce même paradoxe : animés d’une authentique présence scénique, ils deviennent les « révélateurs », au sens photographique du terme, de la « présence » de Meursault, pourtant totalement absent de la pièce. Et si certains moments, comme la scène du meurtre sur la plage, sont d’une troublante beauté, l’ensemble témoigne assurément d’une relecture intelligente d’une œuvre qu’on redécouvre ainsi avec bonheur.
Geneviève
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