Dimanche 8 décembre 2019, 17h. Palais des Papes, Cellier Benoît XII, Avignon
Quatuor Girard : Hugues Girard, Agathe Girard, violons ; Odon Girard, alto ; Lucie Girard, violoncelle
Bach, L’Art de la fugue – extraits. Haydn, Quatuor n°5, en fa mineur, opus 20.
Schubert, La Jeune Fille et la mort, en remplacement de Mozart, Quintette n°4, en sol mineur, K516, pour deux alti ()
En co-réalisation avec la Société de Musique de Chambre d’Avignon et l’Opéra Grand Avignon
Ce fut un concert-événement (« du baroque au classique »), avec le Quatuor Girard, quatre frères et sœurs, originaires d’Avignon, qui pour la première fois dans leur ville d’origine jouaient en hommage à leur arrière-grand-tante, Simone Girard. L’altiste Gérard Caussé, lui, n’avait pu rejoindre la Cité des papes par suite de la grève des transports.
Du baroque au classique, tel était le fil rouge tiré par le Quatuor Girard, invité conjointement par Musique Baroque en Avignon et la Société de Musique de Chambre d’Avignon.
Un fil rouge qui n’avait rien d’immédiatement évident.
Jusqu’à l’époque baroque en effet, c’est la voix, monodique ou polyphonique, qui prime dans la musique, les instruments ne servant qu’à l’accompagnement ou aux intermèdes. Ce n’est que par la suite que cordes, bois ou vents, prennent peu à peu leur autonomie. Et c’est justement cette période-charnière, particulièrement intéressante, et dans laquelle va naître la « formation quatuor » telle que nous la connaissons aujourd’hui, que le quatuor Girard a fait revivre ce dimanche dans le Cellier Benoît XII, au cœur du Palais des Papes. A travers Bach puis Haydn.
« Bach, dans l’Art de la fugue, une musique à 4 voix égales, fonctionne très bien avec un quatuor », précise Lucie, violoncelliste, en ouverture de concert. Les quatre extraits choisis déroulaient en effet diverses facettes, avec successivement une ouverture alerte, une pièce plus dansante, un passage plus lent et méditatif, et un final fougueusement virtuose. On a pu apprécier particulièrement la qualité des entrées instrumentales : entrées de l’alto seul (3e extrait), du 1er violon (4e), mais aussi de chacun, du violoncelle au 1er violon en tessiture ascendante (2e).
Place ensuite à Haydn, le « père du quatuor » suivant l’expression consacrée, qui fait la transition entre baroque et classique. Son Quatuor n°5, opus 20, est encore au début de la longue série de ses quelque quatre-vingts compositions quartettistes. Il garde la fraîcheur du genre naissant, mais manifeste déjà l’équilibre parfait entre les quatre voix, tout au long de la pièce : de l’Allegro moderato en fa mineur – tonalité principale -, jusqu’au finale (une fugue, clin d’œil à Bach), en passant par le menuet, commun à tous les quatuors de Haydn, qui marie l’ombre du trio à la lumière du 1er violon, et enfin l’adagio. La complicité artistique de la jeune formation avignonnaise, déjà internationale – elle revient de Chine – permet à chacun d’exprimer sa personnalité propre tout en assurant la parfaite cohésion de l’ensemble.
La seconde partie devait être partagée avec l’altiste international Gérard Caussé, dans le Quintette n°4 de Mozart. Les grèves de la SNCF ayant empêché le soliste de rejoindre Avignon, Lucie, Hugues et Agathe (violons), Odon (alto) Girard ont dû modifier leur programme en dernière minute : plutôt baroque ou plutôt chambre ?
Ils ont choisi l’équilibre, face à Bach et Haydn, en proposant une œuvre en hommage – c’était le thème du concert – à leur arrière-grand-tante Simone Girard, fondatrice de la Société avignonnaise de concerts, ancêtre de la Société de musique de chambre, et chez qui Francis Poulenc son ami avait composé une partie des Dialogues des Carmélites. Une œuvre célébrissime, que les quatre frères et sœurs avaient entendue il y a quelques années sur la scène de l’Opéra Grand Avignon (alors Opéra-théâtre d’Avignon), sous les archets réunis du Quatuor Ysaÿe, auquel ils doivent une bonne part de leur formation. C’est aussi l’œuvre qui leur a donné « l’envie de devenir quatuor ». On ne saurait donc s’étonner qu’ils aient interprété La Jeune fille et la mort de Schubert, avec une sensibilité toute particulière, mettant en lumière toute l’intensité dramatique de l’œuvre. Des attaques parfaitement synchrones, des développements harmoniques subtils, un dialogue émouvant entre les pizzicati du violoncelle et les lignes mélodiques du 1er violon dans le 2e mouvement (andante), et une interprétation très juste dans les choix de lecture, dessinent une œuvre, et un concert, de très grande qualité. Les instruments, réalisés il y a quelques petites années par le luthier Charles Coquet, participent sans aucun doute à la finesse du son, dans l’écrin délicat du Cellier patrimonial.
On retrouvera ici notre entretien avec Lucie, Hugues et Agathe Girard, et ici leur CD The Starry Sky (G.ad. Photos concert G.ad. Portrait Jean-Baptiste Millot)
Prochains concerts de Musique Baroque en Avignon
- La Chapelle harmonique, samedi 11 janvier 2020, 20h30, Auditorium du Grand Avignon, Le Pontet
- Thibaut Garcia, guitare baroque, dimanche 9 février, 17h, Conservatoire du Grand Avignon, amphithéâtre Mozart
- Les Nouveaux Caractères, dimanche 15 mars, 17h, Collégiale St-Didier, Avignon
- Jakub Jozef Orlinski contre-ténor & Ensemble Il Pomo d’Oro, jeudi 30 avril, 20h30, Opéra Confluence, Avignon
- Ensemble Sébastien de Brossard, dimanche 17 mai, 17h, Conservatoire du Grand Avignon, amphithéâtre Mozart
- Léa Desandre, Thomas Dunford, Ensemble Jupiter, samedi 6 juin, 21h45, Jardins du musée Calvet, Avignon
Réservations sur www.operagrandavignon.fr, ou 04 90 14 26 40, ou à l’Espace Vaucluse, place de l’Horloge, Avignon, lundi-samedi, 11h-18h.
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