A Toulon, une Périchole qui décolle…
La Périchole, opéra bouffe de Jacques Offenbach, à l’Opéra de Toulon, mercredi 28 décembre 2022
Laurent Campellone (Direction musicale), Laurent Pelly (Mise en scène & costumes), Paul Higgins (Réalisation de la mise en scène), Agathe Mélinand (Adaptation des dialogues), Chantal Thomas (Scénographie), Michel Le Borgne (Lumières), Sarah Eger (Réalisation des lumières), Jean-Jacques Delmotte (Collaboration aux costumes)
Antoinette Dennefeld (La Périchole), Chloé Briot (Guadalena/ Manuelita), Alix Le Saux (Berginella/ Ninetta), Valentine Lemercier (Mastrilla/ Brambilla), Nathalie Perez (Frasquinella). Philippe Talbot (Piquillo), Alexandre Duhamel (Don Andrès de Ribeira), Rodolphe Briand (Don Miguel de Panatellas), Lionel Lhote (Don Pedro de Hinoyosa), Eddy Letexier (Marquis de Tarapote)
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Toulon
En reprenant La Périchole dans la production de Laurent Pelly créée au Théâtre des Champs Elysées au mois de novembre, l’Opéra de Toulon gâte son public. On connaît en effet le metteur en scène français comme un vrai maître du répertoire comique en général et de l’œuvre de Jacques Offenbach en particulier. Ce spectacle, idéal pour les fêtes de fin d’année, vient le confirmer, même s’il faut attendre le deuxième des trois actes (la partition est donnée dans sa version de 1874, remaniée en trois actes) pour nous en mettre plein les yeux. La scène toulonnaise est à l’évidence plus petite que celle du Théâtre des Champs Elysées, et l’on sent la foule péruvienne du premier acte un peu à l’étroit sur la place de la ville de Lima. Une partie des décors est d’ailleurs aveugle, alors que nous ne sommes pas placés sur les fauteuils les plus excentrés de la salle.
Les habitants arborent des tenues de tous les jours et La Périchole et Piquillo sont des chanteurs de rue à tendance rock, avec tatouages. Habituelle collaboratrice de Pelly, Agathe Mélinand a remanié les dialogues, dont certains jurent avec l’esprit « bulles de champagne » du livret original de Meilhac et Halévy : l’exemple le plus frappant en est la tirade de La Périchole à l’égard du vice-roi au premier acte « Saloperie de journée (…) putain de pays ! ».
Mais l’ouverture du rideau sur le deuxième acte balaie ces réserves, on retrouve un large sourire devant les canapés et miroirs suspendus sur un fond de décor noir, les femmes de la cour aux longues perruques blondes et robes argentées jouant des caricatures de langues de vipère. Le cachot pour les « maris récalcitrants » en première partie de l’acte III est ensuite une immense cellule grillagée, tandis que pour le second tableau c’est retour en ville avec certains habitants qui taguent et démontent le portait géant du vice-roi.
On retrouve la majorité des chanteurs qui formaient la deuxième distribution à Paris il y a un mois, à l’exception du ténor Philippe Talbot qui remplace ici Stanislas de Barbeyrac. Son Piquillo est bien chantant, d’un volume modéré mais qui sait aussi claironner certains aigus avec plus de force. La prononciation du texte est appliquée, aussi bien pour les dialogues que les parties chantées, qualité qu’il partage avec la Périchole d’Antoinette Dennefeld. Celle-ci possède un timbre riche et noble, allié à un jeu en scène assez naturel, voire gourmand, par exemple au cours de son air « Ah! quel dîner je viens de faire ! (…) Je suis un peu grise… ».
Troisième rôle de grande importance, Alexandre Duhamel (Don Andrès de Ribeira) compose un vice-roi drôle et particulièrement sonore, d’une grande présence. Classiqueenprovence l’avait apprécié dans le même rôle à Marseille en 2016 dans une production Burtin/ Chazalet. Le reste de la distribution est aussi d’excellente tenue, comme les trois « cousines », Chloé Briot (Guadalena/ Manuelita), Alix Le Saux (Berginella/ Ninetta) et Valentine Lemercier (Mastrilla/ Brambilla), marchandes de vins et alcools en tous genres et qui vendent le meilleur Riquiquin de la ville. Lionel Lhote (Don Pedro de Hinoyosa) est un baryton puissant et Rodolphe Briand (Don Miguel de Panatellas) un ténor de caractère idéal pour ce répertoire.
Actuel Directeur Général de l’Opéra de Tours, le chef Laurent Campellone apporte beaucoup d’énergie et d’entrain à la représentation. Il n’évite pas plusieurs décalages entre fosse et plateau, sans toutefois déraper dans l’accident rythmique majeur. Les choristes de l’Opéra de Toulon prennent aussi un plaisir visible à participer à ce spectacle réjouissant, salués, tout comme l’ensemble des artistes, par une salle qui fait heureusement le plein ce soir à Toulon.
I.F. Photos Kevin Bouffard/ Opéra de Toulon
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