Entre feu (si peu) et glace (bien trop)…
La Bohème. Opéra en quatre actes de Giacomo Puccini. Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après les Scènes de la vie de Bohème d’Henry Murger. Opéra Confluence du Grand Avignon (19 janvier 2019)
Création le 1er février 1896 au Teatro Regio de Turin sous la direction d’Arturo Toscanini
Direction musicale Samuel Jean. Chef de chant Frédéric Rouillon. Mise en scène Frédéric Roels et Claire Servais. Assistante mise en scène Aurélie Valle. Décors et costumes Lionel Lesire. Lumières Roberto Venturi
Mimi Ludivine Gombert (notre entretien ici). Musetta Olivia Doray
Rodolfo Davide Giusti. Marcello Philippe-Nicolas Martin. Schaunard Boris Grappe. Colline David Ireland. Benoît / Alcindoro Grégoire Fohet-Duminil. Parpignol Gentin Ngjela. Un venditore ambulante Julien Desplantes. Un sergente di Doganieri Pascal Canitrot. Un Doganiere Saeid Alkhouri
Orchestre Régional Avignon-Provence
Choeur de l’Opéra Grand Avignon. Direction Aurore Marchand
Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon. Direction Florence Goyon-Pogemberg
Chanté en italien, surtitré en français
Durée du spectacle 2h20
Nouvelle production de l’Opéra Grand Avignon
On connaît la Bohème comme un réservoir assuré d’émotion.
La mise en scène de la nouvelle production avignonnaise, épurée et distanciée, restitue parfaitement l’hiver parisien glacial qui verra brûler les feux vifs mais brefs d’amours contrariées. Mais elle ne se réchauffera pas au soleil des premières fleurs…
Ludivine Gombert offre, certes, sa rare sensibilité à une Mimi bouleversante, un rôle qui semble avoir été écrit pour elle, tout de frémissement contenu (voir notre entretien ici). Autour d’elle, les quatre artistes impécunieux sont magistralement typés, physiquement et vocalement, et assurent une belle cohérence entre eux ; néanmoins le ténor Davide Giusti (Rodolfo), qui a tenu à honorer son engagement malgré une laryngite, ne se montre guère empressé envers sa partenaire, la regardant à peine et semblant ne chanter que pour lui ; il n’avait pas été un Alfredo plus convaincant, ni plus amoureux, dans La Traviata de fin de saison dernière.
Les rôles épisodiques ne déméritent pas. Pour autant, les « petites mains glacées » de Mimi, condamnée par la maladie, les corps et les cœurs de tous, seront à peine embrasés par les sentiments : amour douloureux de Rodolfo et Mimi, amour tumultueux de Musetta et Marcello (Olivia Doray et Philippe-Nicolas Martin, tous deux excellents), amitié et compassion de tous…
Les metteurs en scène, Frédéric Roels et Claire Servais, composent assurément de beaux tableaux, de la chambre initiale des quatre garçons à la scène finale de la mort de Mimi, en passant par l’animation joyeuse et colorée du café Momus (avec Maîtrise et Chœurs – renforcés – très investis). La continuité dramatique, même au mépris de la vraisemblance, est assurée par la continuité des costumes, robe blanche pour la pure Mimi, robe rouge pour son amie la piquante Musetta.
L’orchestre, élargi, a parfois rivalisé avec les solistes, mais les additionnels comme harpe et xylophone ont accompagné délicatement les passages les plus intenses.
Une production intéressante, qui mêle, comme Puccini, le feu et la glace… (G.ad. Photos Cédric Delestrade/ACM-Studios/Avignon).