Camille et Julie Berthollet ont entamé une tournée promotionnelle de leur dernier album, Dans nos yeux, et qui passera par Carpentras (84) le samedi 27 janvier 2024, dans la toute nouvelle structure de spectacles, le Cabaret. Les places se sont envolées en quelques jours, mais reste une liste d’attente (contact : ville de Carpentras, 04 90 60 84 00)… Nous avons parlé à Camille et Julie, séparément, quelques jours avant le concert.
Comment reconnaître Julie ? Avec la pétillance de ses 26 ans (elle est née le 16 mai 1997 à l’Ile Maurice), elle aime surprendre, avec des looks toujours différents.
Voir aussi notre entretien avec Camille, la cadette, violoncelle
-A propos de votre dernier album Dans nos yeux, que vous interprèterez à Carpentras, vous évoquez un retour à vos sources musicales. Quelle formation instrumentale vous accompagne, le programme évoquant vos « musiciens acolytes » ?
-C’est une formation flexible, à 4 pour la tournée : Vincent Forestier, pianiste, qui a fait des études classiques à Genève (à la HEG, la Haute École de Genève, NDLR), avec aux claviers et percus Maxime Ferry, qui vient de la variété et de la pop… et nous deux aux différents instruments.
-Vous défendez la porosité des frontières musicales ; vous vous délectez des musiques de films ou de séries, qu’on entend habituellement plus qu’on ne les écoute. Avec vous, Warner classics prend un sacré coup de jeunesse (rire de Julie) ! Ces « crossover » semblent de plus en plus acceptés dans la musique classique ; est-ce que cela amène un nouveau public dans les salles ?
-De nouveaux publics, oui. Nous voyons de jeunes enfants qui nous ont vues à la télévision et qui amènent leurs parents, et inversement. Des publics très divers. Et on nous dit souvent, à la fin des concerts : « Jamais je n’aurais pensé que je pouvais aimer la musique classique ! » Ce sont là les plus beaux témoignages.
-Classique ou moderne… anecdotiquement, vous avez toujours Dvorak en sonnerie de votre téléphone ?
-(rire) C’était la sonnerie de mon réveil, alors je l’ai changée.
-C’était Humoresques, que propose le logiciel intégré de certains Smartphones ?
-Non, c’était le Concerto pour violoncelle.
-Vous-même parlez plus spontanément que Camille ; est-ce votre place d’aînée, même si ce n’est que de 15 mois ? ou votre tempérament de Taureau ?
–Ça dépend (un joli rire clair). Dans la vie privée, c’est Camille qui parle le plus. En fait, c’est équilibré entre nous. Quand on est séparées, qu’on n’est pas dans la même ville, Camille m’appelle sans cesse. Sur un sujet de débat, c’est généralement moi qui prends la parole.
-Julie, vous êtes en avance pour tout : pour la musique, puisque vous avez commencé le violon à 2-3 ans, pour la scolarité, avec vos 2 ans d’avance ; pardonnez la brutalité de ma question : vous êtes HPI ? Vous semblez en avoir le profil… Si oui, le vivez-vous comme une chance ou un handicap ?
-En effet, j’ai été diagnostiquée. Le bon côté, c’est que je suis entrée assez vite dans l’association ANEP, de jeunes qui ne sont pas meilleurs ou plus doués, mais qui ont un fonctionnement similaire entre eux. Mais oui, dans la société c’est difficile. C’est parfois une force, qui me permet d’analyser certaines situations dans le détail, notamment sur les sujets scientifiques. Mais il est beaucoup plus difficile de se fondre dans le groupe, et cela nous demande beaucoup plus d’énergie qu’à n’importe qui. Il existe toutefois quantité de sortes de HPI, avec des fonctionnements différents, et avec les pathologies qui vont avec : l’autisme, les troubles de l’attention et de la concentration… C’est une manière de vivre, il faut s’adapter. Mais j’aimerais aussi n’avoir jamais à mentir ; quelquefois en effet on peut blesser sans le vouloir, c’est un mode de fonctionnement…
-On est en début d’année ; quel 1er souhait pourriez-vous formuler spontanément pour 2024 ?
-C’est très clair ; sans hésiter, qu’il y ait plus de paix, que les enfants partout dans le monde aient moins à souffrir, car les enfants sont les premières victimes ; qu’ils puissent grandir dans un monde apaisé.
-Vous-même, vous composez, Camille fait des arrangements. Vous avez dit quelque part que vos voyages lointains, vos tournées, vous inspiraient. Quel est le déclencheur de l’inspiration : un mot, un paysage, une musique ?
-Plein, j’ai plein de sujets d’inspiration. On rencontre plein de gens différents chaque jour ; tout peut m’inspirer : une musique, les gens qu’on rencontre, un paysage, une impression, tout peut m’inspirer. Et la plus grande chance pour moi, c’est d’être « du soir », à partir de 18h…
-Ecrivez-vous d’abord le texte ou la musique ?
-Les deux, l’un et l’autre, sans penser à l’autre, mais avec prédominance des textes. C’est ainsi que j’ai en réserve quelques mélodies au piano, mais beaucoup de textes ; et quand je m’aperçois que deux univers peuvent aller ensemble, une mélodie et un texte, j’en fais une chanson. Et c’est tous les jours que j’écris…
-A heures fixes ou suivant l’inspiration ?
-Suivant un puissant besoin. Je me sens dans l’obligation d’écrire. Je suis même en train de terminer un manuscrit, que je voudrais oublier ; je ne connais pas du tout cet univers, mais j’ai senti la nécessité de l’écrire…
-C’est une fiction ?
-Une sorte de carnet de bord, une autofiction.
-Et j’imagine que vous fourmillez encore de nombreux projets.
-Bien sûr. Ma plus grosse envie, en ce moment, c’est de créer des musiques pour ces courts-métrages, pour des films. C’est aussi d’enregistrer un album très classique, et de continuer la composition. Mais c’est aussi un travail d’équipe avec Camille ; elle aussi écrit et compose.
-Vous avez toutes les deux eu une formation multiple…
-Bien sûr, au conservatoire on étudie l’analyse, le contrepoint, le solfège, l’histoire de la musique, les instruments… et j’en oublie !
-Etes-vous déjà venue en Provence, en concert ou en vacances ? Quel(s) souvenir(s) en gardez-vous, même si vous n’avez sans doute guère le temps de faire du tourisme ?
–Petites, nous avons passé toutes nos vacances dans le Sud, en camping-car. Maintenant nous n’avons pratiquement plus de vacances, mais nous savons que le public du Sud est particulièrement chaleureux, même si tous les publics le sont. Et on se réjouit de venir à Carpentras.
-Aimeriez-vous ajouter quelque chose ?
–Oui, je voudrais parler de notre programme. C’est un retour aux sources, quand nous étions petites. On écoutait plein de disques à la maison, Vivaldi, Bach, Beethoven, Mozart… C’est pour nous un retour en enfance, ce qu’indique le titre Dans nos yeux. La tournée est un reflet de l’album, et nous avons avec nous les mêmes musiciens dans le CD et sur scène.
-Je ne vous avais pas posé cette question, pourtant essentielle, de votre programme, parce que vous y aviez déjà largement répondu pour de nombreux médias, et je ne voulais pas vous imposer une énième répétition…
–Ah, merci (rire). En tout cas, on se réjouit toutes les deux de cette tournée, et de l’accueil que nous réserve partout le public.
Propos recueillis par G.ad. Photos Simon Fowler
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