Ce lundi 16 octobre à 17h, âgé de quatre fois 20 ans, Richard Martin est parti vers d’autres scènes, depuis Gardanne où il était en soins. Homme de théâtre, son nom est indissociable du Toursky qu’il avait fondé à Marseille. Certains regrettent déjà que les hommages, régionaux et nationaux, soient bien tardifs, alors que, il y a quelques mois encore il menait une nième grève de la faim contre la ville de Marseille qui l’avait privé de subventions, grève qui l’avait considérablement affaibli, à côté du « crabe » qui l’a finalement emporté.
Né en 1943 à Nice, « monté » à Paris dans les années 60, Richard Martin « redescend » en Provence à la suite des événements de mai 68, qui le marquent. Il pose ses valises à Marseille, dans le quartier Saint-Mauront « qui est un des plus pauvres d’Europe », précise Serge Barbuscia, directeur du théâtre du Balcon à Avignon, qui l’a bien connu. « Pour moi, qui ai d’abord vécu à Marseille, le Toursky est le premier théâtre que j’ai fréquenté, un théâtre qui est devenu un énorme vaisseau, une grosse machine avec 26 salariés, qui a vu passer les plus grands : Michaël Lonsdale, Rufus, et tant d’autres… Un théâtre installé dans des quartiers impossibles mais qui a toujours fait de la qualité ». Grand ami de Léo Ferré, « dont l’imagination a fondé la sienne », c’était un homme de théâtre sous toutes ses facettes : dramaturge, comédien, directeur, metteur en scène. « Il nous a accueillis plusieurs fois : J’entrerai dans ton silence, J’ai soif… Des liens très forts se sont créés. Et nous nous sommes dit enfin : pourquoi ne pas faire un spectacle ensemble ? Et ç’a été Petit boulot pour vieux clown, en 2022, notre premier projet commun, et son dernier spectacle à lui », avec Pierre Forest, dans une mise en scène de Virginie Lemoine.
Avec une vingtaine de créations, autant de mises en scène, une cinquantaine d’interprétations, dont plusieurs au festival d’Avignon, des téléfilms, des séries télévisées, des mises en scène d’opéra, Richard Martin a touché à tous les genres. La reconnaissance officielle lui a été octroyée en 2002 : il a été nommé Chevalier des arts et lettres.
Mais ce qui reste surtout de lui, ce sont ses combats. Sa lutte pour que, se rappelle Serge Barbuscia, très ému, « dans ces quartiers impossibles, puisse demeurer un lieu de culture de qualité, un lieu de liberté et de fraternité, ouvert à tous ». Un combat toujours renouvelé depuis plus d’un demi-siècle. « Il n’a jamais cédé, il a toujours cru en ce qu’il faisait, il a toujours réinventé. Aujourd’hui, c’est un frangin que je perds. Et la représentation du Fossé (pièce écrite par son fils Jean-Baptiste Barbuscia et mise en scène par lui-même, ndlr) ce jeudi aux ATP sera dédiée à Richard : c’est une demande des comédiens, qui m’a beaucoup touché ».
Les obsèques devraient être célébrées samedi 21 octobre (à confirmer). Selon la tradition, les Marseillais peuvent se recueillir devant son cercueil exposé sur la grande scène du théâtre Toursky.
G.ad. Photos Jean Barak, Frédéric Stephan (de g. à dr Serge Barbuscia, Richard Martin, Pierre Forest)
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