« Je m’appelle Georges ». Actuel. Off Avignon 2024

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Mais qui est donc Emilie ?

Théâtre Actuel, 17h40, durée : 1h30. Du 3 au 21 juillet, relâche les 4, 11 et 18 juillet. Réservations au 07 89 74 54 00 ou 06 81 81 08 78

Une très belle comédie romantique que cette pièce, écrite par Gilles Dyrek. Elle nous plonge à un rythme effréné dans la vie de Georges, qui vient lui-même nous raconter son histoire ; et c’est l’un des charmes de cette pièce que ce récit à la première personne. Tout commence par une rupture, Christine quitte Georges, ce dernier ne comprend pas comment il peut être quitté dans une telle sérénité. Tout accablé qu’il est, il part faire son jogging et découvre avec terreur que tous les immeubles de la ville dans laquelle il vient de s’installer portent les noms de ses ex. Tous sauf un, en construction : « la villa Émilie ». Il est donc persuadé que sa prochaine amie sera une Émilie. Dans une quête complètement folle et semée d’embûches, il part donc à la recherche de cette Émilie à aimer, tout en étant persuadé qu’elle le quittera. Et lorsqu’il rencontre une femme dont il tombe vraiment amoureux, il fera tout pour ne pas connaître son nom et se livrera à un jeu de mystères à découvrir.

Grégori Baquet incarne à la perfection un Georges, charmant et touchant dans sa quête d’amour. Mélanie Page est à la fois Christine et cette inconnue, son jeu sensible la rend irrésistible. Tous les autres personnages sont incarnés par le brillant trio : Marine Dusehu, Stéphane Roux et Etienne Launay. Ils sont tous pittoresques en diable, tant comme collègues de travail de Georges que comme personnages secondaires, tous plus bigarrés les uns que les autres, que Georges va croiser sur sa route.

La mise en scène d’Eric Bu est très dynamique et entraînante. Les décors nous emportent agréablement presque dans l’univers du film d’animation avec ces murs blancs qui s’habillent de dessins et se transforment pour créer les différents espaces.

Une comédie rafraîchissante, pleine de fantaisie. Une pièce légère et pétillante.

Sandrine. Photo Frédérique Toulet

N.B. Grégori Baquet a été moliérisé en 2014 (Révélation masculine pour Un obus dans le cœur) ; et nominé en 2018 (Molière du comédien dans un spectacle de théâtre privé pour Adieu, monsieur Haffmann, de Jean-Philippe Daguerre ; rôle principal qu’il a créé en 2016) ; et nominé en 2019 (Molière du comédien dans un spectacle de théâtre public pour Hamlet).

Le disque Les Rois du monde, chanté notamment par Grégori Baquet, tiré de Roméo et Juliette, de la haine à l’amour, est le 21^e single le mieux vendu de tous les temps en France.

Le comédien-chanteur est par ailleurs engagé dans des actions caritatives (Sidaction, sclérose).

« Gueules Noires ». Roi René. Off Avignon 2024

Une nécessité pendant les temps qui courent !

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Théâtre du Roi René, 19h25 du 03/07 au 21/07 (relâche les lundis) Tel 04 13 68 06 59 et aussi Web. Tragicomédie tout public.

Ah, la magie du théâtre : quand la salle est encore éclairée, vous pénétrez dans la baroquissime chapelle des Ursulines. Mais dès qu’elle est éteinte, vous vous retrouvez plusieurs centaines de mètres sous terre, dans une galerie minière, juste après un coup de grisou. Et tout de suite, je félicite Olivier Herbert pour son décor très réaliste. Thomas Rizzotti y ajoute une ambiance lumineuse qui participe au sentiment d’oppression ou d’espoir.

De cette galerie effondrée, s’extrait Ahmed, un mineur algérien. Il est seul, affolé quand il prend conscience de sa situation. Puis, apparaîtra Stéphane. D’origine polonaise, celui-ci a plus d’expérience du sous-sol et des catastrophes possibles. Néanmoins, ils sont bien coincés tous les deux et personne ne répond à leurs appels. Erwan Orain et Kader Nemer jouent très juste, tant les situations angoissantes que l’humour qui aide à les tenir à distance. En effet, les auteurs, Kader Nemer et Hugues Duquesne, connaissent les mines du Nord par les témoignages de leurs ancêtres : la difficulté du métier, notamment la catastrophe de 1965 ; mais aussi, le partage de vie dans les boyaux, alors qu’au-dessus, sur terre, les peuples ne se fréquentaient pas.

Mis en scène par Ali Bougheraba, ils nous font toucher du doigt comment les deux personnages font connaissance et malgré l’éloignement familial, géographique, religieux…ils peuvent se comprendre, se respecter, s’aider et même s’apprécier. Ceux qui ont connus les 60’s et 70’s souriront aux références automobiles ou aux objets du quotidien, datés mais pittoresques, parfois attendrissants. Les plus jeunes, eux, découvriront un pan de l’histoire populaire de l’époque.

Sans angélisme, on partage une note d’espoir avec le fait de faire Société. Et en cette période politiquement troublée, ce spectacle nous distille un optimisme sur notre capacité à nous rencontrer : merci !

Norbert. Photo Audrey Knafo

« Tebas Land ». Alya. Off Avignon 2024

Une réflexion philosophique fort bien portée !

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Alya l’Espace, 20h15 du 03/07 au 21/07 (relâche les lundis) Tel 04 90 27 38 23 et Internet. Théâtre contemporain (portugais surtitré français)

Quand la scène s’éclaire, nos yeux sont attirés côté jardin par cette terrible cage où un jeune homme joue maladroitement au basket. Il est dans une cour de prison. Côté cour, un tableau blanc, un vidéo projecteur, un bureau et surtout un homme plus mûr, mature : c’est un auteur dans son local de travail. Ce personnage veut écrire une pièce sur un parricide et ce qui l’a amené à commettre ce meurtre si particulier.

Au début de la pièce, l’interprète de l’auteur, Otto JR, explique sa démarche, de façon très claire. Il vaut mieux, car la pièce se joue en portugais surtitré français. Même, si l’on n’a pas fait « portugais LV3 ; C » depuis quelques années, la compréhension est encore bonne. Et nous découvrons combien il est difficile de monter un projet avec des prisonniers : les autorisations de visites, éventuellement de sorties, voire d’actions se rapprochent d’un ubuesque dédale.

Pourtant, l’auteur entre en relation avec le prisonnier. Et comme le Renard dans Le Petit Prince, il leur faut s’apprivoiser. La scène est d’autant plus belle que Robson Torinni joue un prisonnier bourru, revêche même. Lors de l’interview d’après représentation, cet homme délicat m’expliquera avoir rencontré plusieurs véritables prisonniers pour s’imprégner davantage du rôle. Otto JR et lui sont d’ailleurs multi primés au Brésil pour ce spectacle et pour bien d’autres.

Il est souhaitable, dès que possible, de se détacher du surtitrage. La traduction littérale du texte rend la lecture malaisée et nous éloigne du jeu prenant des acteurs. Cependant, le texte de Sergio Blanco veut montrer combien le mensonge et la vérité sont indissociables lors d’un échange entre deux personnes, tout autant que lors de la création d’une œuvre partiellement autobiographique. Cette intention est soulignée par la mise en scène de Victor Garcia-Peralta. Car nous nous demanderons encore à la fin de la pièce : qu’y a-t-il de vrai dans ce que transmet le criminel à l’auteur ? Et quelles sont les intentions de ce dernier lorsqu’il avance dans son projet ? A chaque spectateur de se faire une opinion…

Une belle pièce philosophique, au sens noble du terme.

Norbert. Photo Rodrigo Lopes

« Je vis avec Freddie Mercury ». Lucioles. Off Avignon 2024

Un réel talent d’acteur !

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Théâtres Les Lucioles, 22h20 du 29/06 au 21/07 (relâche les lundis) Tel 04 90 14 05 51et Internet. Seul en scène musical

Dès qu’il entre en scène et que la lumière l’enveloppe, il est là ! Qui ça ? Jean-François, cet autoproclamé sosie de Freddie Mercury. La première image est très réussie : le costume est impeccable, les cheveux sont plaqués, le physique correspond bien, seul manque le défaut dentaire !

Thierry Margot, auteur et acteur de ce seul-en-scène, aime à répéter qu’il a créé un spectacle, non pas sur Freddie Mercury, mais sur un jeune homme mal dans sa peau, qui vit à travers le prestigieux membre de Queen. Ainsi, ce Jean-François narrera les grandes étapes de sa vie en portant des costumes flamboyants du chanteur et en incluant dans son propos de nombreux airs du groupe. Ce sont ces moments-là que j’ai le plus appréciés, car Thierry Margot est excellent dans son jeu, particulièrement son articulation dans les playbacks. En outre, il pimente d’humour, donc de légèreté, lorsqu’il aborde les moments plus difficiles de l’existence de son personnage. Quand il est au piano sur la seule bande vocale, le calage des tempi est bluffant !

Il faut bien ça, car nous avons tous lu ou vu des reportages sur des personnes qui font disparaître leur vie derrière celle qu’ils se représentent de leur idole. C’est, hélas, souvent pathétique. Ce spectacle n’entend pas être une étude psychologique, il nous montre une vie à travers plusieurs aspects. Et l’auteur glisse quelques éléments autobiographiques ainsi que de bons jeux de mots. En échangeant avec lui, il ne cachera pas une relation difficile avec son père décédé. Cela pourra toucher les spectateurs.

David Furlong assure la mise en scène, très sobre, de ce One Man Show. Notons aussi, Clément Colle pour l’importance de la création lumière.

Norbert

« Femme non rééducable ». Balcon. Off Avignon 2024

Edifiant, émouvant, force au respect

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Au Balcon, 38 rue Guillaume Puy. Du 29 juin au dimanche 21 juillet 2024, 18h25. Relâche les 11 et 18 juillet. Résa. 04.90.85.00.80.

Comme ce tapis posé au centre du plateau, sur lequel elle déverse son seau de cailloux, elle est la cible du régime de Poutine… Avec une vive émotion et une grande intensité, Caroline Rochefort, jean noir, chemise blanche et petit gilet coloré, incarne la journaliste russe Anna Politkovskaïa, fervente défenseuse de la liberté. Par petites touches – un texte devenu un grand classique -, elle brosse le destin hors du commun de cette héroïne contemporaine, « non rééducable », qui n’a eu de cesse de dénoncer les atrocités commises par l’armée russe dans la guerre en Tchétchénie. Puissante ou douce, sa voix s’élève dans la lumière tamisée pour évoquer les horreurs dont elle a été témoin, les menaces à son égard, ses arrestations, ses procès, ses séjours en prison… Epuisée, « la folle de Moscou », comme il la surnommait, n’a jamais plié contre l’Etat despotique, incarné sur scène par Pierre Berçot, qui finit par la faire définitivement taire, le 7 octobre 2006, quand on la retrouve assassinée à 48 ans, dans l’ascenseur de son immeuble à Moscou. Un hymne aux droits de l’homme édifiant, très émouvant, qui force au respect. On n’en ressort pas indemne.

Marie-Félicia. Photo Louis Josse

« Le cabaret de Carolina ». Rouge-Gorge. Off Avignon 2024  

Un véritable show de cabaret ! Une heureuse surprise…

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Le Cabaret de Carolina, Théâtre Le Rouge Gorge, 20h55 du 01/07 au 21/07, Tel 04 84 51 24 34 et aussi par Internet ; Humour musical.

On a beau être chroniqueur pour classiqueenprovence et profiter des meilleurs artistes lyriques ou chœurs dans les grands oratorios et autres opéras célèbres, on peut prendre aussi du plaisir lors d’un spectacle de cabaret, pourvu qu’il soit de qualité. Alors, disons-le tout de suite, les compétences vocales de Miguel-Ange Sarmiento sont réelles. Dans son personnage de Carolina, il passe aisément de la voix de tête à la voix de poitrine et chante juste. Lors de l’avant-première, la sonorisation vocale était légère. C’est appréciable, car cela rapproche de l’artiste.

Avec Rémi Cotta, scénographe, ils ont co-écrit le spectacle Le Cabaret de Carolina. En une quinzaine de chansons populaires, Carolina nous raconte sa vie : de son enfance à sa carrière de…star internationale ! Humour assuré, notamment avec les enchaînements, finement burlesques et surtout avec ces tubes que tout le monde connaît, des 60’s ou des années 2020. J’ai apprécié la réécriture de textes et tout particulièrement les variations mélodiques sur paroles originelles. C’est du meilleur effet ! D’autant que certains morceaux avaient même été conçus ainsi dès leur écriture, comme nous l’a confirmé ensuite Miguel-Ange Sarmiento. Ce qui n’en diminue pas pour autant la difficulté d’interprétation.

Carolina n’hésite pas à quitter la scène et à interpeller son public : elle fait mouche, toujours sans vulgarité. Les costumes participent largement au show, multiplicité et paillettes. Cela brille aussi, grâce au jeu de lumière travaillé de James Groguelin. Les spectateurs n’oublieront pas non plus le personnage de Higgins. Lequel garde son sérieux imperturbable, malgré les sarcasmes de sa grande dame de patronne.

Ainsi, toutes les générations passeront un très bon moment au Cabaret de Carolina !

Norbert, texte et photo