Werther, opéra de Jules Massenet, Opéra de Monte-Carlo, Salle Garnier (26-02-2022)
Direction musicale, Henrik Nánási ; mise en scène, Jean-Louis Grinda ; décors et costumes, Rudy Sabounghi ; lumières, Laurent Castaingt ; vidéo, Julien Soulier
Werther, Jean-François Borras ; Albert, Jean-François Lapointe ; Le Bailli, Marc Barrard ; Schmidt, ami du Bailli, Reinaldo Macias ; Johann, ami du Bailli, Philippe Ermelier ; Charlotte, fille du Bailli, Stéphanie d’Oustrac ; Sophie, sa sœur, Jennifer Courcier
Orchestre philharmonique de Monte-Carlo
Chœur d’enfants de l’Académie de Musique Rainier III
Belle distribution francophone pour un Massenet bien ciselé
Absent de la scène monégasque depuis 2005, Werther y revient dans la production de Jean-Louis Grinda créée au Palau de Les Arts-Reina Sofia de Valence en 2017. Pendant l’ouverture, un miroir en avant-scène reçoit des projections vidéo faisant apparaître Werther, puis Charlotte. Déjà présent sur le plateau, Werther regarde ces images comme en flash-back, pistolet en main et chemise d’emblée ensanglantée. Puis un autre miroir cassé derrière le rideau se disloque, les montants gauche et droit s’écartent, la partie supérieure s’élevant dans les cintres, pour se reformer de temps à autre, dans les moments les plus dramatiques. Mis à part ce parti pris, la réalisation visuelle est plutôt fluide et illustrative du livret, très dégagée aux deux premiers actes, un peu de mobilier – dont le clavecin et la vitrine pour les pistolets – étant installé pour les deux suivants.
La distribution vocale est essentiellement francophone, ce qui favorise évidemment la compréhension du texte et forme un grand atout pour l’auditoire. Dans le rôle-titre, le ténor monégasque Jean-François Borras chante avec goût, capable de varier les nuances et la puissance, entre petites phrases à mezza voce et passages plus lyriques à pleine voix, dans des aigus particulièrement épanouis. Son jeu en scène n’est cependant pas toujours aussi convaincant, peinant par moments à faire sentir avec naturel les insupportables « souffrances du jeune Werther ». Sa Charlotte est la mezzo Stéphanie d’Oustrac, qui dégage davantage d’intensité, même si l’intonation est par instants moins parfaite que celle de son collègue. Son personnage est véritablement un être de chair et d’émotion, dans un chant qui traduit ses divers états et frémissements.
Le baryton québécois Jean-François Lapointe compose un solide Albert, plutôt droit dans ses bottes et à l’aigu très vigoureux. Jennifer Courcier en Sophie a une vraie allure de jeune fille avec ses deux grandes nattes, chantant d’un timbre aérien et fruité. De valeureux solistes complètent les rôles plus secondaires, en particulier les voix graves de Marc Barrard en Bailli et Philippe Ermelier en Johann. La direction musicale de Henrik Nánási modèle un grand relief à la partition de Massenet, ciselant les passages d’intimité et n’hésitant pas par ailleurs à monter vers les climax pour les scènes les plus dramatiques, quitte à jouer à un niveau très élevé de décibels dans cette salle Garnier aux dimensions réduites.
I.F. Photos Alain Hanel
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