Voir tous nos articles sur les Chorégies 2022
Théâtre Antique d’Orange, le 2 août 2022. Chorégies d’Orange
Direction musicale, Keri-Lynn Wilson. Soprano, Liudmyla Monastyrska. Piano, Anna Fedorova
Ukrainian Freedom Orchestra
Sylvestrov : Symphonie n°7. Chopin : Concerto pour piano n°2 en fa mineur, opus 24. Beethoven : Fidelio – Air de Léonore : « Abscheulicher ! Wo eilst du hin ? « . Brahms : Symphonie n°4 en mi mineur, opus 98
Entre Munich (1er août) et Berlin (le 4 août), le Théâtre antique d’Orange est l’unique étape française de cet Ukrainian Freedom Tour – en anglais dans le texte ! –, commencé à Varsovie (28 juillet), pour se terminer à Washington le 20 août.
En solidarité avec l’Ukraine, cette initiative exceptionnelle est coproduite par le Metropolitan Opera de New-York et l’Opéra national de Pologne (Teatr Wielki de Varsovie). Epouse du directeur du Metropolitan Opera de New-York, la cheffe Keri-Lynn Wilson a réuni des musiciens ukrainiens, jouant habituellement au sein de grands orchestres internationaux, pour constituer l’ensemble Ukrainian Freedom Orchestra qui effectue cette tournée d’un mois entre Europe et Etats-Unis.
Davantage symphonique que lyrique, le programme commence avec la Symphonie n°7 du compositeur ukrainien Valentin Silvestrov (né en 1937), une partition empreinte d’une dose modeste de modernisme, qui s’écoute agréablement mais ne bouleverse pas vraiment. On apprécie surtout la merveilleuse acoustique du lieu ce soir, tandis que la battue très métronomique de la cheffe marque les rythmes avec une extrême rigueur. Les cuivres et le xylophone sont assez sollicités, et le passage que l’on apprécie le plus – mais tout est question de goût ! – est une courte séquence lente aux cordes, qui fait entendre certains échos mahlériens.
Après ce morceau, le Concerto pour piano n°2 de Chopin sonne comme de la très grande musique, même si elle paraît manquer ici par moments d’un peu de nerf, voire de souffle. La soliste Anna Fedorova déroule ses arpèges rapides avec célérité et fluidité, et met beaucoup de sensibilité dans son interprétation, l’orchestre sachant, avec bonheur, s’effacer derrière le piano pour lui laisser la place de choix. Deuxième des trois mouvements, le Larghetto d’une sublime musique est certainement le meilleur moment de la soirée.
Dans ce temple de l’art lyrique, la partie chantée est aussi bienvenue, avec le grand air de Leonora, extrait de Fidelio de Beethoven « Abscheulicher ! Wo eilst du hin ? ». La symbolique de ce passage est évidemment forte, la guerre actuelle en Ukraine nous rappelant que la folie meurtrière des hommes est malheureusement intemporelle : chez Beethoven, c’est le tyran Pizarro qui emprisonne Florestan, sa femme Leonora, travestie en Fidelio, étant prête à prendre tous les risques pour sauver l’aimé. La soprano Liudmyla Monastyrska nous paraît toutefois très loin de sa meilleure forme vocale, vibrato envahissant, graves discrets, aigus pas spécialement éclatants et quelques phrases parfois à court de souffle.
Pour terminer le programme, la Symphonie n°4 de Brahms nous semble être jouée avec davantage d’ampleur romantique, avec un deuxième mouvement Andante moderato qui évoque plus la majesté que l’alanguissement. On note les jolies interventions des bois soli dans le quatrième et dernier mouvement Allegro energico e passionato – Più allegro, la musique s’épanouissant vers un finale d’une certaine allure.
L’orchestre joue en bis l’hymne ukrainien, aux cordes seules, un moment d’émotion et de communion, avec tous les musiciens et spectateurs debout dans un silence respectueux.
F.J.
Laisser un commentaire