Qualité suisse pour un Requiem allemand !
Grand Théâtre de Provence, Aix en Provence le 17 avril 2019
Sinfonieorchester Basel
MDR Rundfunkchor Leipzig
Direction, Marek Janowski
Christina Landshamer, soprano. Wilhelm Schwinghammer, baryton
Johannes Brahms, Ein deutsches Requiem
A tout juste 80 ans, Marek Janowski est un chef d’un grand métier, bien connu des Parisiens – il fut Directeur musical du Philharmonique de Radio France entre 1984 et 2000 -, mais aussi des Provençaux, dont certains se souviennent encore de son Ring wagnérien dirigé lors de l’édition 1988 des Chorégies d’Orange
On perçoit, tout du long de ce Requiem allemand de Brahms, que son architecture musicale est d’une solidité à toute épreuve, d’un classicisme de bon goût, avant tout au service de l’œuvre. Dans le premier des sept mouvements, le chœur « Selig sind, die da Leid tragen », l’ambiance est recueillie mais sans pompe, sans effets démonstratifs. Le deuxième numéro « Denn alles Fleisch, es ist wie Gras » sonne un peu plus solennel, mais la baguette accélère par instants le tempo, comme pour donner de la vie, du mouvement. Les montées de son, les climax puissants sont évidemment présents, mais sans rechercher le spectaculaire ni la démesure, plutôt un certain équilibre à répartir sur l’ensemble de la partition.
Le Sinfonieorchester Basel est une phalange à la grande assurance, cordes magnifiques, instruments à vent impeccables (et quel magnifique hautbois !), et cuivres presque parfaits.
Protagoniste essentiel de la soirée, le MDR Rundfunkchor Leipzig (« MDR » pour Mitteldeutscher Rundfunk… et non pas l’abréviation de « mort de rire » !!), fait preuve d’une magnifique cohésion et d’un fondu homogène entre les pupitres. Les sopranos ne saturent pas dans l’aigu, les masses chorales répondent à l’ensemble des nuances demandées par le chef, par exemple le pianissimo du 5ème numéro, les choristes restant assis pendant la partie de soprano « Ihr habt nun Traurigkeit ». La qualité de l’allemand est évidemment optimale pour cette formation basée à Leipzig, encore améliorée par des efforts d’articulation bienvenus.
La soprano Christina Landshamer est dotée d’un joli timbre et d’une belle musicalité, de qualité homogène sur toute son étendue vocale, développant de très belles lignes élégiaques à l’élégance toute mozartienne. Le baryton Wilhelm Schwinghammer n’évolue pas sur les mêmes cimes et sa participation handicape malheureusement les 3ème et 6ème mouvements : voix en manque flagrant de stabilité, vibrato pas toujours sous contrôle, et un registre aigu trop limité avec quelques notes arrachées et disgracieuses. C’est vrai que pour le n°3, l’angoisse de l’homme, sa fragilité, son humilité en sortent renforcées… mais tout de même !
On retient cependant au bilan la splendide performance d’ensemble des masses chorales et orchestrales, saluée à la fin du concert par un très beau silence respectueux de la salle, avant que ne partent d’abondants applaudissements. (I.F. Photos Caroline Doutre)