Jeudi 10 juillet 2025, Festival d’Aix-en-Provence au Conservatoire Darius Milhaud
Baryton, Stéphane Degout
Quatuor Diotima : Yun-Peng Zhao (violon), Léo Marillier (violon), Franck Chevalier (alto), Alexis Descharmes (violoncelle)
György Ligeti,Quatuor à cordes n°1. Ottorino Respighi, Il tramonto. Othmar Schoeck, Notturno
Un programme varié, rare, dans des univers entre léger et triste, entre sombre et guilleret…
Le baryton Stéphane Degout et le Quatuor Diotima ont mis à l’affiche un programme original de musique de chambre, en associant les trois compositeurs György Ligeti, Ottorino Respighi et Othmar Schoeck, autour du thème principal de la nuit.
Le récital commence par une partie uniquement instrumentale, soit le Quatuor à cordes n°1 de György Ligeti (1923-2006), pièce très exigeante en douze parties qui s’enchaînent sans pause pour la plupart. Fondé en 1996, et d’ailleurs déjà passé par le festival d’Aix-en-Provence pour, entre autres, des créations d’œuvres de Pascal Dusapin et Thomas Adès, le Quatuor Diotima bénéficie évidemment de cette grande expérience de jeu collectif au cours de cette presque trentaine d’années. C’est particulièrement vrai pour ce qui concerne l’exécution rythmique de ces miniatures très variées en styles et tempi, le plus souvent dans une ambiance calme et mystérieuse, mais entrecoupée de passages agités parfois très virtuoses, entre pizzicati espiègles, certains moments très dansants, ou encore quelques glissandi subtils et poétiques.
On passe graduellement au thème de la nuit avec Il tramonto (Le coucher du soleil) d’Ottorino Respighi (1879-1936), poème lyrique pour voix et quatuor à cordes composé en 1914. Le relief musical est sombre et annonce le drame, un « coucher de soleil » à l’image de l’histoire d’amour tragique de cette jeune femme qui, désespérée par la mort de son amant, finit par se donner également la mort. Ecrit initialement pour une mezzo-soprano, ce poème est interprété ce soir par le baryton Stéphane Degout, un fidèle également du festival depuis ses débuts ici-même en 1998. La voix sonne avec ampleur, plénitude et expressivité, sur un long souffle qui favorise une splendide articulation du texte.
Après l’entracte, le Notturno (Nocturne) en allemand d’Othmar Schoeck (1886-1957) nous révèle un compositeur peu connu, dont cet opus écrit pour baryton et quatuor à cordes est assez caractéristique et fut d’ailleurs interprété et défendu par le grand Dietrich Fischer-Dieskau. La pièce, en cinq mouvements de longueurs différentes et ambiances fort contrastées, rassemble dix poèmes autour de l’obscurité ou de la nuit. Entre tristesse et séquences plus dynamiques, voire guillerettes par instants, le chant de Stéphane Degout caractérise au plus près la vaste panoplie des sentiments, dans un volume parfois considérable. L’accompagnement musical oscille quant à lui entre romantisme assez classique teinté de Richard Strauss et une Seconde école de Vienne façon Alban Berg, compositeur vers lequel s’est du reste rapproché le baryton français en interprétant Wozzeck en octobre dernier à l’Opéra de Lyon. Le cinquième et dernier mouvement « Ach, wer möchte einsam trinken » (« Ah, mais qui voudrait boire seul ») est assez caractéristique de ce large spectre de styles, qui commence à la manière d’une chanson à boire et se termine dans un calme apaisé, comme une douce mort (« … Et si je suis las, ô prends donc cette âme, (…) Emporte-la et laisse-la voyager avec toi… »).
I.F. & F.J. © Festival Aix-en-Provence
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