Excellence de l’instrument, voix moins convaincante
Grand Théâtre de Provence, Aix en Provence le 22 avril 2019
Camerata Salzburg ; Renaud Capuçon, violon ; Rolando Villazon, ténor
Mozart, Symphonie n°35 « Haffner »
Mozart, Concerto pour violon n°3
Mozart, Sérénade n°7 en ré majeur « Sérénade Haffner »
Mozart, airs extraits d’opéras
Un programme Mozart plutôt original dans sa composition, avec la Symphonie n°35 dite « Haffner » coupée en deux parties : les deux premiers mouvements en début de concert et les deux suivants à la toute fin de la deuxième partie. La Camerata Salzburg joue sans chef d’orchestre, dirigée du premier violon, avec une unité, une cohérence, une synchronisation jamais mises en défaut, mêmes dans les passages les plus virtuoses. Le style est extrêmement classique, fluide et sans surprises, avec cependant des contrastes marqués entre les attaques franches du premier mouvement et le doux legato du deuxième.
C’est ensuite au tour de Rolando Villazon d’entrer en scène pour interpréter deux airs en première partie, successivement « Dove mai trovar quel ciglio » extrait de Lo Sposo deluso, puis l’air de concert « Con ossequio, con rispetto ». C’est d’abord le volume sonore qui étonne, vraiment réduit, le ténor ne parvenant plus à projeter son chant comme il y a quelques années. Le registre aigu est fragile et le chanteur doit l’aborder avec une prudence constante, le timbre ayant tendance à se dérober dès qu’il pousse un peu la note. A son crédit tout de même, le chanteur soutient sans problème les cadences, l’articulation est soignée, l’italien de qualité, et il se montre très à l’aise stylistiquement dans ces extraits buffo, sans trop en rajouter. En seconde partie, dans l’air de concert plus héroïque « Va, dal furor portata », la musicalité est appréciable, mais l’instrument paraît à nouveau comme empêché dans sa projection, quelques notes aiguës sont accrochées difficilement, et les brefs passages vocalisés douloureusement savonnés.
Omniprésent au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence, dont il est directeur artistique, Renaud Capuçon interprète le Concerto pour violon n°3. Les dialogues s’établissent sereinement entre orchestre et soliste, celui-ci ne rencontrant aucun problème dans les passages les plus rapides du premier mouvement. Le deuxième mouvement en adagio est encore plus beau de notre point de vue, une interprétation sensible et un solo final qui paraît suspendu dans un silence presque parfait de la salle. Dans le rondeau puis l’allegro final, tous font preuve tour à tour de légèreté, de mordant sur les attaques, de vivacité sur les traits rapides.
Après l’entracte, la Sérénade n°7 en ré majeur « Sérénade Haffner » donne l’occasion au jeune premier violon Benjamin Marquise Gilmore de montrer son talent. Mais sans nul doute, l’auditeur fait la différence avec le son merveilleux émis par l’instrument de Renaud Capuçon, le fameux Guarneri del Gesù « Panette » de 1737 joué par Isaac Stern pendant près de 50 ans.
Il est à noter qu’aucun bis n’est donné à l’issue du programme de la soirée, dommage… un petit rappel pour ténor, violon et orchestre aurait été bien apprécié ! (I.F. Photos Caroline Doutre).