Hugues Girard, Agathe Girard, violons ; Odon Girard, alto ; Lucie Girard, violoncelle
Ludwig van Beethoven (1770-1827), Quatuor opus 59 n°2 (1806). Allegro ; molto adagio ; allegretto ; presto.
Philippe Hersant (1948), Quatuor n°5, The Starry Sky. Premier enregistrement mondial
Hersant dialoguant avec Beethoven, par la grâce d’un jeune quatuor à cordes talentueux et inspiré. Un album à la fois lumineux et profond comme un ciel étoilé…
Le 8 juin 2018 sortait le « Ciel étoilé » du Quatuor Girard. C’est une litote que de dire de ces quatre frères et sœurs issus d’une nombreuse famille et illustre lignée avignonnaise, qu’ils commencent à briller sérieusement au firmament musical national et international.
Qu’ils aient envie de tutoyer les étoiles, on le comprend aisément. Pour autant, qu’ils aient choisi le binôme Beethoven-Hersant ne s’impose pas d’emblée comme une évidence. Et pourtant, Hugues et Agathe (violons), Odon (alto) et Lucie (violoncelle) ont voulu réunir en une même étoile – filante, donc unique – les éléments marquants de leur jeune carrière. « Notre expérience formidable d’avoir pu jouer en concerts l’intégrale des quatuors de Beethoven, notre lumineuse rencontre avec Philippe Hersant dont nous avons l’honneur de présenter le premier enregistrement de son quatrième quatuor, notre très enrichissante résidence à la Chapelle musicale Reine Elisabeth de Belgique, et cette si précieuse connivence qui s’est rapidement instaurée avec le luthier Charles Coquet, nous amenant à jouer sur un quatuor d’instruments… »
Beethoven, on le sait, réalise une heureuse transition entre classicisme et romantisme, offrant des contrastes saisissants entre des univers multiples, et il ne cesse, tout au long de sa vie, personnelle et musicale, d’évoquer la fascination qu’exerce sur lui ciel étoilé. Hersant lui rend donc un hommage explicite, exprimant avec le langage d’aujourd’hui – et dans une expression anglaise, « starry sky », qui donne son titre à l’album – cette aspiration intemporelle à l’infini. On touche là au « silence éternel des espaces infinis » de Pascal, référence implicite, et à une vraie spiritualité cosmogonique du XXIe siècle ; ainsi on n’hésitera pas à placer ce Starry sky dans la lignée d’un Malraux prophétique, même si l’on ne sait toujours pas avec certitude quel adjectif (« spirituel », « religieux », « mystique » ?) celui-ci attribuait à un XXIe siècle qui n’était alors que putatif.
Le souffle quasi métaphysique du monde traverse tout cet enregistrement.
La cohésion des jeunes quartettistes, la main d’un unique luthier pour leurs quatre instruments chaleureux et profonds (2014-2016), et la complicité artistique qu’eux-mêmes entretiennent, tant avec Beethoven dont ils se sont longuement imprégnés qu’avec Hersant dont ils proposent la création mondiale, assurent la réussite de ce projet. Intelligence et finesse, respect mutuel, signent chacune des prestations « des Girard », en concert ou en enregistrement, et ce « Ciel étoilé » nous emmène volontiers, mutatis mutandis, vers « l’inaccessible étoile »…
Pascal avait raison, « Le silence éternel des espaces infinis m’effraie, et la seule chose qu’on puisse lui opposer, c’est la poésie et la musique. » (G.ad.)
Laisser un commentaire