Patricia Petibon en ouverture des Musicales du Luberon : « la voix a besoin d’espace »
Pétillante en diable, un rire cristallin, une voix agile qui se joue de tous les registres, et un formidable capital de sympathie, c’est la soprano Patricia Petibon qui ouvrira en beauté à Apt le festival d’été 2021 des Musicales du Luberon : une rencontre avec le public lundi 12 juillet, avant le concert d’ouverture le lendemain. Elle a déjà été accueillie il y a une vingtaine d’années par les Musicales, fidèles aux artistes, débutants ou confirmés. Le programme proposé cette année est « baroque », dans le sens étymologique tout autant que musicologique, accompagné de 17 musiciens de La Cetra sous la direction de Eva Bohri.
Patricia Petibon nous avait déjà accordé un entretien plus long en mai 2016, évoquant son parcours, sa vision de l’art, de l’opéra…
-Patricia Petibon, pouvez-vous nous présenter ce concert de lundi, joliment intitulé « Métamorphoses baroques » ?
–C’est un concert particulier, qui juxtapose musique populaire et musique savante, et qui nous entraîne également dans un tour du monde. A travers les Indiens d’Amérique du Sud, qui sont les témoins de la colonisation. Ils sont l’incarnation mythique de ces musiques populaires, en langue dialectale et avec un vocabulaire très spécifique.
-Vous avez travaillé sur la langue autant que sur la musicalité ?
–Bien sûr, j’ai travaillé à la déchiffrer. C’est assez proche de la musique colombienne, sur laquelle j’avait déjà fait un album il y a déjà quelque temps, chez Deutsche Grammophon, sous la direction d’Andrea Marcon, un fidèle pour mes enregistrements. C’est un programme festif, tout en contrastes, qui demande et qui partage et une énergie certaine. Car on passe sans cesse de la partie festive, à de grands airs, comme la mort de Didon, ou la Médée de Charpentier. Cette juxtaposition entre pays lointains et musique française à texte m’a semblé intéressante.
-Au prix d’une gymnastique vocale, je présume ?
–C’est dans ma nature de me déplacer dans diverses esthétiques vocales, même en récital. J’essaie de tout donner quand je suis en scène, je ne cache rien. J’ai soif de goûter à différentes musiques, d’apprendre, d’être à l’écoute, d’ouvrir des portes : c’est ainsi qu’on s’enrichit.
-Depuis un an et demi, le monde est touché par une pandémie qui ne peut laisser indifférent. Comment vous-même avez-vous vécu cette période ?
–J’ai pris mon temps, je suis assez lente, j’ai une âme de lamentin (rire). Mais ç’a été difficile pour tout le monde, pour les jeunes, et terrible pour les personnes âgées. Pour nous, apprendre ses rôles seuls ou par téléphone, nous a fait ressentir la solitude et le manque d’air ; la voix a besoin d’espace, elle a besoin de la géométrie et de l’acoustique d’une salle. Nos réflexes, nos muscles se sont atrophiés. Cela a tout modifié, l’articulation, la vue, la mémoire. On s’est recroquevillés.
-Vous avez été plusieurs fois accueillie aux Musicales du Luberon, à l’Opéra Grand Avignon… Avez-vous des attaches personnelles dans la région ?
–Sur la Côte d’Azur, à La Seyne-sur-Mer, à Toulon, où j’ai ma famille, et où j’essaie d’aller l’été, quand je le peux.
Propos recueillis par G.ad.
-Lundi 12 juillet, 18h. Espace Jean Giono, Apt. Rencontre avec Patricia Petibon, animée par Jean-Michel Dhuez.
-Mardi 13 juillet, 21h30. Espace Jean Giono, Apt. Concert en plein air. Patricia Petibon & les Métamorphoses Baroques. Patricia Petibon (soprano) La Cetra, Eva Borhi (violon et direction). 60€ à 5€. Tarif : 60http://www.musicalesluberon.fr/
Bio-express
Patricia Petibon, soprano colorature, est née le 27 février 1970 à Montargis, où le Conservatoire porte son nom depuis 2020. Son parcours l’a menée du baroque – c’est William Christie qui l’a découverte -, au contemporain en passant par Mozart et Poulenc. Elle excelle aussi bien dans des rôles de fantaisie (comme le titre de son CD La belle excentrique en 2014) que dans un répertoire tragique : opérette, opéra, oratorio, messe… ou plus insolite, elle aime les « terres inconnues ».
3 Victoires de la musique (Révélation en 1998, et Artiste lyrique de l’année en 2001 et 2003). Saluée par la critique comme par le public (CD, scène).
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