Ornithologiquement vôtre !
Grand Théâtre de Provence, Aix en Provence le 25 avril 2019
Orchestre Philharmonique de Radio France ; Mikko Franck, direction ; Nelson Freire, piano
Rismki-Korsakov, Le Coq d’or (suite)
Chopin, Concerto pour piano n°2
Rautavaara, Cantus Arcticus, concerto pour oiseux et orchestre
Stravinsky, L’Oiseau de feu
L’Orchestre Philharmonique de Radio France a fait très grande impression ce jeudi soir dans la salle du Grand Théâtre de Provence. Dans la Suite du Coq d’or de Rismki-Korsakov, tirée de l’opéra du même nom, le tapis de cordes est somptueux dès les premières mesures, accompagné successivement par les impeccables harpe, clarinette solo, flûte solo… Le chef Mikko Franck, directeur musical du « Philhar », dirige le plus souvent en reposant sur une chaise à l’assise haute, la gestuelle s’étalant entre économie et quelques battues beaucoup plus amples. Il se lève par moments, surtout pour les changements de nuances, les cassures de rythme, comme pour installer la nouvelle ambiance. On apprécie la rondeur du son, le relief parfois plus héroïque rendu par les cuivres, et l’on parvient à distinguer une profusion de détails dans la partition.
L’immense pianiste Nelson Freire entre ensuite en scène pour interpréter l’une de ses œuvres préférées, le Concerto n°2 de Chopin. Son interprétation est absolument prodigieuse, la pièce semble faire partie de lui-même tant son jeu paraît naturel et personnel. Le soliste est à 74 ans en pleine possession de ses moyens techniques : rapidité d’exécution, virtuosité, moments élégiaques (en particulier dans le 2ème mouvement), le toucher est subtil dans un magnifique délié, sans exclure certaines attaques frappées avec davantage de franchise. L’orchestre conserve aussi sa qualité et son caractère, mais en laissant la première place au soliste.
Il faut ensuite signaler une fin d’entracte un peu agitée : alors que les deux tiers de la salle et l’intégralité des musiciens sur scène sont déjà en place, on attend encore les nombreux spectateurs visiblement invités à de nombreux cocktails. Le temps passe, l’orchestre poireaute un bon quart d’heure, le temps que les retardataires regagnent leur siège… en prenant leur temps, ce qui déclenche quelques quolibets et autres « Dépêchez-vous ! » de la part des auditeurs déjà assis. Il faudra même éteindre les lumières et que le chef vienne sur le plateau, bras croisés pendant de longues minutes pour assister au « spectacle » de la salle, pour accélérer le mouvement…
Place à la musique donc, pour une seconde partie complètement… ornithologique ! Elle démarre avec un opus du compositeur finlandais Einojuhani Rautavaara (1928-2016), nationalité également du chef Mikko Franck : un concerto pour oiseaux et orchestre, intitulé Cantus Arcticus. La musique est complètement tonale, et commence par la flûte, les bois, les cuivres, accompagnés de cris et chants d’oiseaux enregistrés et diffusés par haut-parleurs. Cela est assez agréable, pas du tout révolutionnaire toutefois, quelques grands accords aux cuivres et cordes pouvant rappeler Britten, on pense par exemple aux interludes musicaux dans Peter Grimes.
Le programme s’achève avec l’Oiseau de feu de Stravinsky (dans sa version de Suite pour orchestre de 1919), où les moments doux alternent avec des passages plus agités, les plus connus à vrai dire. On admire la précision rythmique de l’ensemble des pizzicati aux cordes, du xylophone, des percussions, des cuivres. Le chef adopte alors presque définitivement la station debout, pour un final extrêmement brillant. (I.F. Photos Caroline Doutre)