Au Festival d’Aix-en-Provence : l’OJM, on aime !
Samedi 20 juillet 2024, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence, dans le cadre du Festival international d’art lyrique
Concert de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée. Evan Rogister, direction ; Astrid Nordstad, mezzo-soprano
Leonard Bernstein, Candide, Ouverture. Hector Berlioz, Cléopâtre. Composition collective de l’OJM. Florence Price, Adoration. Antonín Dvořák, Symphonie n°9 en mi mineur, dite « Du Nouveau Monde ».
Créé en 1984, l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée (OJM) fête donc ses 40 ans et retrouve son rendez-vous régulier avec le public, en fin de festival à Aix-en-Provence. Lors de cette édition, on est à nouveau frappé par le niveau d’excellence de ces jeunes musiciens, ainsi que par la folle énergie qui se dégage de cette phalange.
D’emblée, l’Ouverture de Candide nous montre le bon niveau de préparation technique des instrumentistes, en particulier du point de vue rythmique, la partition étant émaillée de ruptures et changements de tempi. Dans ce véritable pot-pourri des différents airs de l’opéra du génial Leonard Bernstein, le chef Evan Rogister, à la double nationalité américaine et allemande, se trouve visiblement comme un poisson dans l’eau, donnant du brillant à ces pages.
Suit Cléopâtre, scène lyrique d’Hector Berlioz et habituellement plus connue sous le titre de « La Mort de Cléopâtre », qui nous semble ce soir moins convaincante. La mezzo-soprano norvégienne Astrid Nordstad délivre un français certes appliqué mais qui laisse plusieurs mots ou phrases dans un léger brouillard pour ce qui concerne la compréhension de l’auditeur. Le registre grave est sombre et possède un caractère certain, mais il se fait malheureusement couvrir régulièrement par l’orchestre dès que celui-ci joue un tant soit peu. Une discrétion vocale qui contraste toutefois avec certains aigus parfois surpuissants.
On enchaîne avec une composition collective de l’OJM, qui forme le sommet artistique et émotionnel de la soirée. Pour l’occasion, cinq formidables musiciens solistes viennent se placer à la rampe : Sarra Douik (chant et oud), Colin Heller (nyckelharpa), Matteo Nicolin (guitare), Oscar Viret (trompette) et Hacene Zemrani (saxophone). Il s’agit d’une composition aux accents clairement orientaux, où la trompette prend d’abord la mélodie principale, donnant rapidement le relais à la chanteuse. Et l’on tombe immédiatement sous le charme de la voix de Sarra Douik, au timbre expressif et chargé d’émotion, entre graves susurrés et vibrato typiquement méditerranéen. Le morceau se poursuit en plusieurs séquences davantage endiablées, où l’ensemble de l’orchestre chante, pour s’achever en un tourbillon rempli d’énergie, faisant se lever la salle comme un seul homme.
Après l’entracte, c’est le retour à un programme plus classique, si ce n’est la courte pièce « Adoration » de Florence Price, composée en 1951, dans la même tonalité que la 9ème symphonie de Dvořák. C’est pour cette raison que le chef demande au public de ne pas applaudir entre les deux œuvres, afin de pouvoir enchaîner dans la continuité. L’OJM se montre, dans l’opus de Dvořák, à nouveau d’une sereine solidité technique : beaux unissons des cordes, brillant des cuivres (à l’exception d’une petite imperfection du cor solo… mais quel orchestre au monde possède un cor solo d’une robustesse à toute épreuve ?!), poésie du cor anglais au cours du deuxième mouvement, agréables traits d’agilité des autres bois, violon solo, petite harmonie… Une grande ampleur est donnée au troisième mouvement, tout comme au dernier qui s’achève en un finale plein de souffle, sans pour autant basculer dans le style pompier.
I.F., texte et photos
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