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Jeudi 14 juillet 2022, 21h30, durée 1h30. Théâtre antique d’Orange. Chorégies 2022 (site officiel)
Missa solemnis (1823), Ludwig van Beethoven. Messe en ré majeur, op. 123 pour quatre solistes, choeur et orchestre
Direction musicale, John Nelson. Soprano, Eleanor Lyons. Mezzo-soprano, Marie-Nicole Lemieux. Ténor, Cyrille Dubois. Basse, Nicolas Courjal
Orchestre NEXUS Symphonique
COGE (Chœur des Grandes Écoles), Paris
Chœur de Grenelle, Paris
Chœur de la Sorbonne, Paris
Chœur Stella Maris, Paris
Laudate Deum en chœur de chambre, Lausanne
Le Motet, Genève
En association avec De tous chœurs
En cette agréable soirée du 14 juillet, les gradins du Théâtre Antique d’Orange n’avaient pas fait le plein pour cette œuvre pourtant majeure de Ludwig Van Beethoven. La faute à la date choisie ou les interprètes n’étaient-ils pas suffisamment connus pour attirer un public plus nombreux, friand de grands noms ?
Ancien Orchestre Romand des Jeunes Professionnels, l’orchestre Nexus, fondé en 2010, n’est en effet pas un habitué des scènes françaises et du paysage international. Sa vocation première est d’offrir un cadre d’apprentissage du métier et de développement aux jeunes musiciens, musiciens de demain, en lien avec leurs aînés plus expérimentés de divers orchestres permanents de la Suisse Romande. Se produisant le plus souvent entre Lausanne et Genève, il est rarement venu en France, où il a déjà donné, à Notre-Dame de Paris, en novembre 2018, cette même Missa Solemnis avec le même chef et, entre autres, le Chœur des Grandes Ecoles et le Chœur Laudate Deum. Orange était l’occasion de le découvrir.
Accueilli également pour la première fois aux Chorégies, le chef américain John Nelson a été directeur musical de l’Ensemble Orchestral de Paris (1998-2008) et est surtout connu par une discographie de qualité réalisée avec divers orchestres français (Lyon, Strasbourg, ONF), mais la majeure partie de son activité est plutôt hors France. Les chœurs n’étaient pas, non plus, de ceux dont on entend le plus parler, mais parmi les solistes, Lemieux, Dubois et Courjal ne sont pas des inconnus pour le public français, seule la soprano australienne Eleanor Lyons, remplaçant Patricia Petibon initialement prévue, faisait ses débuts dans notre pays.
Hé bien ! Tous réunis nous ont offert une belle soirée, qui débuta, 14 juillet oblige, par le premier couplet d’une Marseillaise enflammée, dans l’orchestration de Berlioz, chantée devant un public debout reprenant lui-même les paroles, encouragé par le chef. Puis vint la messe solennelle, plus, de toute évidence, une glorification de la foi, dans laquelle, à son époque, Beethoven cherchait un secours, qu’une messe classique, vu les effectifs utilisés et la longueur de l’œuvre.
C’est avec une gestuelle engagée, précise, sans baguette, stimulant de la main et de son énergie chœur, orchestre et solistes, que John Nelson a dirigé ses troupes, sachant rendre le gigantisme et dégager de l’œuvre toute la palette expressive voulue par le compositeur, illustrant par des tutti triomphants, enthousiastes ou menaçants et des passages plus recueillis et intimes les phrases ou mots significatifs du texte. Ainsi a-t-on pu apprécier l’entrée majestueuse et recueillie du Kyrié, le démarrage triomphant d’un Gloria mené avec fougue, alternant passages enthousiastes et plus doux, tel le pax hominibus, un Credo affirmant la foi du compositeur, avec cet instant de grâce associant un chœur murmurant, solistes et flûte. Instant de grâce aussi avec le Sanctus mené par le violon solo, malheureusement parfois à peine audible, selon l’emplacement de l’auditeur dans les gradins, qui nous offrit un Benedictus empreint d’émotion, avec un quatuor dominant, aux échanges subtils et l’intervention du chœur assis. L’Agnus Dei enfin, mettant en évidence les qualités de tous les interprètes, notamment du quatuor vocal, a clos cette belle interprétation, nous offrant de religieux Miserere suivis de Pacem obsessionnels et répétés.
Tout au long du concert, les 230 choristes, déployés sur toute la largeur de la scène, issus de 5 chœurs différents, particulièrement sollicités, ont su former un ensemble homogène, malléable, répondant parfaitement à toutes les nuances, du piano au forte, exigées par l’œuvre et par le chef. Homogénéité aussi et bonne complémentarité du quatuor de solistes, nécessaires dans une œuvre qui ne leur confie pas personnellement de grands airs, mais, sauf en situation d’introduction, les emploie le plus souvent en duo, trio ou quatuor. Nous avons pu y remarquer une Eleanor Lyons à la voix claire et puissante, une Marie-Nicole Lemieux en pleine possession de ses moyens, le ténor aigu de Cyrille Dubois. La belle voix profonde de Nicolas Courjal était cependant parfois couverte par l’orchestre, le chœur ou les timbres plus aigus de ses partenaires, mais il a pu la mettre en évidence dans l’introduction un peu plus développée pour le soliste, de l’Agnus Dei.
L’orchestre enfin, constitué de jeunes éléments, dynamique, attentif aux volontés du chef, a su se placer à la hauteur de l’évènement et participer avec efficacité à cette belle soirée, conclue par une longue ovation du public.
B.D.
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