Le concert inaugural nous a gâtés !
Concert d’ouverture de la saison symphonique 2021-2022
Jeudi 14 octobre 2021, 20h30, durée 1h30. Opéra Grand Avignon, ré-ouverture
Direction, Debora Wadman. Piano, Michaël Levinas.
Orchestre National Avignon-Provence
Etienne-Nicolas Méhul, Ouverture « L’Irato ». Ludwig van Beethoven, Concerto pour piano n°3 en ut mineur op.37. Louise Farrenc, Symphonie n°1 en ut mineur op.32
Réouverture du « nouvel » Opéra Grand Avignon
Voir la Saison 2021-2022 de l’Opéra Grand Avignon
Voir la Saison 2021-2022 de l’ONAP
C’est l’Orchestre National Avignon-Provence qui assure la soirée inaugurale de l’Opéra Grand Avignon, qui renaît après 4 ans de travaux. Avec ce concert «Maestoso», Debora Waldman a su imposer sa rigueur et son bel enthousiasme à la tête de l’Orchestre National en Région Avignon-Provence.
Un véritable succès pour cette musicienne née au Brésil, révélée par Kurt Masur dont elle fut l’assistante à l’Orchestre national de France. Pour fêter dignement la réouverture de cette salle, totalement reconstruite, fidèle « à l’italienne » mais à l’acoustique désormais parfaite, le pianiste et compositeur Michaël Levinas interprète le 3e concerto pour piano de Beethoven, créé par le compositeur lui-même en 1801 et le seul en mode mineur. La virtuosité du soliste et son sens de la composition développent une interprétation personnelle de cette œuvre qui se dégage de l’influence mozartienne, et d’établir un dialogue soutenu avec l’orchestre. La rencontre entre la cheffe et le soliste est marquée par la violence de l’engagement, la tension héroïque du discours et l’extrême concentration du phrasé. Avec son énergie conquérante, le piano transcende la virtuosité ordinaire attachée au genre du concerto. Le pianiste a offert en bis un début des Scènes d’enfants de Schumann, un style pianistique bien différent. A la fois pianiste sensible au répertoire très large et compositeur exigeant, professeur au CNSM de Paris, élu en 2009 à l’Académie des Beaux-Arts, il était un interprète de choix pour une telle soirée.
Fidèle à son projet d’élargir son répertoire et pour sa 2e saison, Debora Waldman conforte sa volonté de faire sonner des œuvres méconnues et de faire jaillir à la lumière nombre de compositeurs, et surtout de compositrices injustement oublié(e)s. Une sorte de mission sacrée pour cette musicologue passionnée qui a déjà retrouvé et joué la symphonie oubliée Grande Guerre (1917) de Charlotte Sohy (1887-1955) à laquelle elle a consacré un bel ouvrage, La Symphonie oubliée ; elle a assuré la création mondiale de l’œuvre en 2019, et dirigé la première audition à Paris avec l’Orchestre National de France à la Maison de la Radio.
Elle propose ainsi deux découvertes originales : l’ouverture de l’opéra Irato (l’Emporté) d’Etienne-Nicolas Méhul (1763-1817) ; une œuvre moins connue que le patriotique Chant du départ du même compositeur, pourtant prestigieux compositeur lyrique pendant la Révolution, dont l’élégante légèreté séduisit Napoléon et dont le préromantisme inspira notamment Berlioz. On doit aussi à Méhul d’être l’un des fondateurs du Conservatoire de Paris. L’ouverture jouée ce soir est très courte, pleine de grâce, de finesse et d’éclat.
Une autre découverte symbolique est la Symphonie n°1 en ut mineur de Louise Farrenc, (1804-1875) ; son enseignement fut marquant au Conservatoire de Paris et elle fut l’une des rares symphonistes françaises à jouer un rôle capital comme compositrice dans la France du XIXe siècle. Elle puisa son imaginaire poétique chez Haydn et Schubert. Au sujet de cette première symphonie, héritière inspirée de Mozart et Beethoven, de Louise Farrenc, on peut lire dans la Revue Gazette Musicale de Paris en 1845 : « Il résulte pour nous de l’audition de la symphonie de Madame Farrenc que, par exception à ce qui s’était vu jusqu’à ce jour, il peut être donné à une femme de marcher avec succès dans l’épineuse et sérieuse voie des Haydn, des Mozart et des Beethoven… L’œuvre de Madame Farrenc dénote du caractère, de la hardiesse et de la chaleur, et les masses instrumentales y sont mises en mouvement avec une entente remarquable des effets ».
Sous la baguette de Debora Waldman, cette œuvre de Louise Farrenc a sa place dans les symphonies romantiques au rythme enlevé, au souffle instrumental énergique. Le dialogue entre les instrumentistes se conclut avec vigueur sous les applaudissements de la salle.
D.B. Photos D.B.
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