Madama Butterfly fait le plein à l’Opéra de Marseille… et vous submerge d’émotion !
Jeudi 21 novembre 2024, l’Opéra de Marseille
Madama Butterfly, opéra de Giacomo Puccini. Livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa. Création à Milan, à La Scala, le 17 février 1904. Dernière représentation à l’Opéra de Marseille, le 23 mars 2016
Direction musicale, Paolo Arrivabeni. Mise en scène, Emmanuelle Bastet. Scénographie, Tim Northam. Costumes, Véronique Seymat. Lumières, Bernd Purkrabek
Alexandra Marcellier (Cio-Cio San) ; Eugénie Joneau (Suzuki) ; Amandine Ammirati (Kate Pinkerton) ; Christine Tumbarello (La Mère de Cio-Cio San) ; Miriam Rosado (Zia) ; Francesca Cavagna (Cugina) ; Thomas Bettinger (Pinkerton) ; Marc Scoffoni (Sharpless) ; Philippe Do (Goro) ; Jean-Marie Delpas (Le Bonze) ; Marc Larcher (Le PrinceYamadori) ; Frédéric Cornille (Le Commissaire impérial) ; Norbert Dol (Yakusidé) ; Pascal Canitrot (L’Officier du registre)
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille
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Nombre de maisons d’opéra ont programmé cette année des titres de Giacomo Puccini (1858-1924), dont on commémore en 2024 le centenaire de sa disparition. Le mois de novembre tournerait presque à un « embouteillage puccinien » dans notre région, avec, en même temps que Madama Butterfly à Marseille, le rare Edgar à l’Opéra de Nice et la plus classique Bohème à l’Opéra de Monte-Carlo… mais abondance de Puccini ne nuit pas !
Production de l’Opéra national de Lorraine, nous avions eu la chance d’assister au spectacle d’Emmanuelle Bastet à l’Opéra de Saint-Étienne il y a tout juste trois ans, en novembre 2021. La réalisation se revoit avec un plaisir renouvelé, dans la scénographie très dépouillée de Tim Northam où le plateau de bois clair en forme de large vague remonte vers le fond. Des panneaux ajourés sont aussi déplacés et pivotés à vue, formant des paravents qui suggèrent, au gré des tableaux, une longue cloison, une pièce ouverte ou bien une autre fermée. Les effets de lumières réglés par Bernd Purkrabek enchantent l’œil également, comme en fin de premier acte pendant le long duo d’amour entre Butterfly et Pinkerton, quand de petites ampoules évoquent les étoiles dans la nuit, ou encore par la suite, après la veillée nocturne, lorsque la clarté monte en transparence derrière les panneaux du sol. Pour compléter la séduction visuelle, les costumes de Véronique Seymat sont superbes, en particulier les habits traditionnels japonais des femmes qui accompagnent Cio-Cio-San.
Son passage stéphanois il y a trois ans dans le rôle-titre révélait la magnifique Butterfly d’Alexandra Marcellier. On la retrouve en tout aussi bonne forme à Marseille, voix d’un fort impact et puissante dans le registre aigu, mais capable également de somptueuses notes filées. Chose essentielle dans ce rôle où les mouchoirs sont régulièrement de sortie au cours du dernier acte, l’interprète sait également émouvoir aux larmes. C’est le cas ce soir, dans un engagement théâtral intense, en particulier lorsqu’elle présente à Sharpless le petit garçon qu’elle a eu avec Pinkerton, puis jusqu’à son suicide final, la pauvre Cio-Cio-San expirant dans les bras d’un Pinkerton repentant. Passage le plus connu de la partition, son grand air « Un bel di vedremo » est conduit avec une émotion palpable.
En Pinkerton, le ténor Thomas Bettinger ne se montre pas toujours très homogène, avec de forts contrastes de qualité entre aigus d’un beau métal brillant et un médium plus discret et moins précis d’intonation. Le baryton Marc Scoffoni complète sans histoire en Sharpless, ainsi qu’Eugénie Joneau en Suzuki, voix particulièrement séduisante et musicale, malgré l’annonce préalable qui la disait souffrante. Les rôles secondaires ne sont pas tous enthousiasmants : si les ténors Philippe Do et Marc Larcher se montrent bien en voix, avec de petits accrocs toutefois pour le premier, le niveau baisse sensiblement avec Jean-Marie Delpas, difficile à écouter dans le rôle épisodique du Bonze.
Sous la baguette de Paolo Arrivabeni, le Chœur et l’Orchestre de l’Opéra de Marseille se montrent en bonne forme, des musiciens qui suivent les nuances indiquées par le chef, la harpe et les percussions placées dans les loges d’avant-scène bénéficiant d’une acoustique particulière. Grand succès au rideau final, dans une salle archicomble.
I.F. © Christian Dresse
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