Le 1er juin à l’Opéra Confluence s’ouvrira la tournée de l’association marseillaise le CALMS (Collectif des Artistes Lyriques & Musiciens pour la Solidarité), sous le titre de Voix solidaires, dont toute la recette sera versée à deux associations vauclusiennes. Parmi la quarantaine d’artistes qui participent à ce concert, l’avignonnaise Ludivine Gombert. Rencontre avec une soprano empathique et généreuse.
-On présente parfois le monde lyrique comme un univers impitoyable. Votre engagement démontre le contraire.
-En fait, beaucoup d’artistes sont comme moi et éprouvent la même nécessité de participer à la vie globale du pays. Tout est parti de Mickaël Piccone il y a deux ans, mais c’était d’abord un giron marseillais.
-Alors, comment êtes-vous entrée dans le projet ?
–Un peu par hasard. J’ai envoyé l’an dernier un message à Mickaël pour le féliciter de toutes les actions qu’il menait, celle-ci, mais aussi dans les quartiers. Je n’avais pas du tout l’idée d’y participer. C’est lui qui me l’a proposé : « on va monter divers concerts-événements, et on va s’arrêter notamment à Avignon ; pourquoi pas toi ? ». Il s’apprêtait alors à rencontrer le directeur de l’Opéra. Cette initiative était aussi un besoin de se retrouver entre artistes, dans une période où tout était à l’arrêt total, et où beaucoup étaient dans une solitude profonde. Le but était d’être ensemble et d’apporter des tas de choses aux autres. Et dans la foulée j’ai dit oui. Quand on veut faire les choses, elles se font. Et j’ai alors sauté dans le bateau.
-Il s’agit d’une tournée. Comment sont choisies les villes-étapes ?
–C’est Mickaël Piccone qui porte tout sur ses épaules, avec Amélie Robins qui gère beaucoup de choses, et peut-être quelques autres. Les lieux de concert se déterminent en fonction de l’enthousiasme du directeur, qui accorde une petite place dans sa programmation.
-Vous répétez ensemble le concert, à moins que chacun ne travaille séparément ?
-(sourire) On ne s’est en fait jamais vus avec Mickaël, jamais rencontrés. On a dû se croiser sur une production à Marseille, mais de façon très rapide. J’admire beaucoup ce qu’il fait, dans les banlieues ; c’est très riche de sens, cela mobilise des énergies, et c’est une réussite.
-J’imagine que les 3 concerts du Sud – Avignon le 1er juin, Marseille le 12 et Nice le 22 juin – réunissent des artistes de la région, et celui de Massy plutôt des artistes de la moitié nord ?
–Pour des raisons logistiques, oui, c’est plus facile. Mais c’est aussi en fonction du planning des chacun, des déplacements ; au bon vouloir de chacun, selon ses envies, ses disponibilités. C’est Mickaël qui fédère autour d’un programme qu’il conçoit ; nous, nous sommes les petites mains.
-Et ce programme, ce sont de belles pages festives du répertoire ? Identiques dans chaque lieu ?
–Celui d’Avignon sera un peu plus court, plus léger, à cause du couvre-feu, qui sera encore à 21h. En revanche, dès le 9 juin, le couvre-feu sera à 23h, le concert durera donc 2h15. C’est un programme éclectique, conçu pour faire voyager. En fait vous me verrez peu, je chante très peu ; l’important n’est pas l’ego, c’est l’élan collectif. Je chanterai tout de même la très belle Barcarolle, avec Valentine (Lemercier, NDLR).
-Avec une mise en espace ?
-Non, nous n’aurons pas la possibilité. Nous n’aurons qu’une seule répétition, le jour même. Ce sera sportif (rire) ! Et comme vous le savez, tous les bénéfices du concert seront reversés à deux associations locales, Rhéso à Carpentras, et l’Amav à Avignon, qui aident les femmes confrontées à des violences.
-En ce domaine, avez-vous eu connaissance de difficultés particulières liées à la crise ? A-t-elle laissé des traces ?
–On le voit, pendant les confinements les violences ont flambé, contre les femmes, contre les enfants aussi. J’ai lu beaucoup d’enquêtes sur le sujet, je me suis documentée.
-Vous participiez aussi au collectif Unisson, qui s’était créé au plus fort de la crise sanitaire, pour aider les artistes en difficulté. Où en est cette action ?
–Elle marche très bien. L’équipe a changé, mais l’action se poursuit. Notre prochain concert se donnera en octobre au Théâtre des Champs-Elysées, toujours au profit des artistes en difficulté. En fait, on demande la remise à plat de tout le système, administratif et juridique ; chaque opéra a un fonctionnement propre, avec toutes formes de contrat.
-Sait-on déjà quelles seront les modalités de ce concert ?
–Sans doute en live parce que nous avons bon espoir que tout soit rentré dans l’ordre d’ici-là grâce à la vaccination. On aura une vie pleine d’élans et de projets.
-Des projets pour vous-même ? Est-ce que la crise vous permet de rebondir ?
–Oui, j’ai beaucoup de projets, mais je n’en dis rien tant que tout n’est pas signé. Nous avons beaucoup de choses à dire, tant nous avons été muselés depuis de longs mois ; mais cette crise est peut-être salvatrice, puisqu’elle a montré chez les artistes de belles qualités de résilience. En tout cas la saison prochaine je vais chanter Peter Grimes, de Britten, à Avignon. L’Opéra lance d’ailleurs une campagne pour faire participer le public.
-Vous aviez des projets de concert dans les Ehpad ; où en êtes-vous ?
–Je n’ai pas changé. J’ai déjà pris des contacts, il faut maintenant que je me bâtisse un programme solide, que je trouve un pianiste, et que je me fasse vacciner, puisque c’est un public fragile. Plus encore que pour nous, pour eux la crise a été très difficile, et l’isolement que je perçois me fait mal.
Propos recueillis par G.ad. Photo Perrine Perez Fuentes
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