Mardi 17 octobre 2023, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence
Mozart et Beethoven
Les Siècles. François-Xavier Roth, direction musicale. Chouchane Siranossian, violon
Wolfgang Amadeus Mozart, Symphonie n°35 en ré majeur « Haffner ». Ludwig van Beethoven, Concerto pour violon en ré majeur. Wolfgang Amadeus Mozart, Symphonie n°41 en ut majeur « Jupiter »
L’orchestre Les Siècles fête ses vingt ans, et c’est son directeur musical et fondateur François-Xavier Roth qu’on retrouve ce soir au pupitre, sur la scène du Grand Théâtre de Provence, dans un programme Mozart et Beethoven.
Dès la symphonie mozartienne n°35, on apprécie le rendu de cette formation qui joue sur instruments en lien avec le répertoire interprété, un son bien plus rond et moins métallique que celui d’orchestres dits modernes. Ceci est particulièrement vrai pour les quatre cuivres présents, instruments qui se fondent ici très naturellement dans la masse orchestrale, sans tirer « la couverture à eux », ceci du point de vue acoustique. L’ensemble des cordes se montre virtuose dans les moments agités et très délicat pour les passages plus retenus, comme les interventions par petites touches dans le 2ème mouvement en andante, en même temps que les vents conduisent les mélodies. Le 3ème mouvement en menuet est logiquement très dansant, les timbales prenant leur juste place, puis le presto final nous sert un Mozart vif-argent et sa musique d’une grande souplesse.
Mozart reviendra après l’entracte avec sa symphonie n°41 « Jupiter » et une interprétation par Les Siècles qui déploie un grand charme, mais sans exclure pour autant du mordant dans certaines attaques aux cordes, amenant ainsi de belles nuances forte – piano. Chaque instrument a ici sa place et peut développer sereinement sa mélodie, l’ensemble des vents sonnant remarquablement dans le 2ème mouvement en andante cantabile. Le mouvement final en molto allegro apporte du brillant et l’on goûte au très juste équilibre entre instrumentistes, leurs départs en canon et les mélodies en contrepoint, comme pour certains groupes de cordes ou encore le basson. Le chef choisira de reprendre la fugue finale en bis à l’issue du concert.
Mais le morceau de choix de la soirée était constitué du concerto pour violon de Beethoven, dont le premier des trois mouvements dépasse sensiblement en durée la symphonie de Mozart n°35 qui précédait. Dès l’entame, on entend chez Beethoven une musique au contour dramatique plus affirmé, avec ses changements de tonalité amenés aux mélodies, le chef veillant aussi à bien accentuer les nuances entre forte et piano. Lors de ses premières interventions, la violoniste française Chouchane Siranossian ne semble pas au mieux pour ce qui concerne la précision de l’intonation, quelques notes froissant très brièvement nos oreilles. La soliste trouvera assez rapidement la justesse, en jouant en particulier un splendide deuxième mouvement lent en larghetto, une interprétation pleine de sensibilité avec des échanges subtils avec l’orchestre, comme lorsque le violon joue sur d’infimes pizzicati. L’équilibre entre soliste et orchestre est en tout cas idéal ce soir, même si le violon ne nous semble pas toujours prendre sa place d’acteur principal.
Le bis accordé par Chouchane Siranossian à l’issue du concerto nous le confirme, quand la violoniste interprète seule une mélodie arménienne du XIème siècle. La musique dévoile des couleurs d’Europe centrale, voire orientales, et l’instrument montre alors sa très forte présence. On pourrait même entendre plusieurs instruments quand la violoniste joue deux cordes en même temps, en quelque sorte une corde en basse continue et l’autre détaillant la mélodie. Le silence de la salle est total et les dernières notes s’éteignent en un petit souffle, un très grand moment musical et d’émotion.
F.J. Photos I.F.
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