« Viens voir les comédiens… »
Samedi 27 avril 2019, 20h30. Dimanche 28 avril, 14h30. Durée 2h55
Opéra Confluence, Avignon. wwww.operagrandavignon.fr
Les Saltimbanques. Opéra comique en trois actes de Louis Ganne. Livret de Maurice Ordonneau. Nouvelle adaptation et réécriture de Mireille Larroche
Direction musicale Alexandre Piquion. Mise en scène Mireille Larroche. Scénographie Camille Vallat. Lumières Arthur Michel
Suzanne Dima Bawab. Marion Ségolène Bolard. Madame Malicorne, directrice du cirque Malicorne Raphaële Andrieu. Madame Bernardin, la secrétaire de production Julie Mauchamp. Une journaliste Marie Simoneau. Pinsonnet Manon Poirier. Une habilleuse Liliane Tomeï. La maquilleuse Laurence Labrousse. La perruquière Sandrine Degioanni
Grand Pingouin Frédéric Cornille. Paillasse Cyril Héritier. André, comédien journaliste Jean-François Baron. Monsieur Malicorne, directeur du cirque Malicorne Alain Itlis. Le Comte de l’Etiquette, producteur Nicolas Rigas. Le patron de l’hôtel, responsable du catering Jean-Baptiste Saunier. Rigodin, réalisateur de TV Pascal Joumier. Coradet, Bertillard, ingénieur du son puis assistant Martin Loizillon. Monsieur Bernardin. Laurent Dallias. Caméraman : Alain Rastoin. Le directeur de la chaîne Saeid Alkhouri. Le directeur des programmes Julien Desplantes. Un brigadier Xavier Seince. Les circassiens Romane Chandelier, Jean-Baptiste Diot, Christelle Ibanez, Twiggy Mauduit, Victor Szczachor
Orchestre Régional Avignon-Provence
Chœur et Ballet de l’Opéra Grand Avignon
Acrobates, jongleurs et circassiens
Nouvelle production de l’Opéra Grand Avignon
Le nom même est une invitation à la fête : avec les saltimbanques, on saute, on danse, on rêve, on a des étoiles dans les yeux, comme l’a montré l’opérette éponyme dès l’ouverture sous l’alerte baguette d’Alexandre Piquion, qui avait récemment dirigé in loco un concert symphonique : une succession d’airs de parade martiaux, de pièces rythmées, de valses plus (trop ?) douces…
Sans prétendre être la production du siècle, ces Saltimbanques de Mireille Larroche ont offert une soirée fort sympathique : couleurs, acrobaties (excellents circassiens, dans un espace scénique réduit !), chorégraphies enlevées (bravo à Eric Belaud et aux quatre couples de danseurs), abattage des premiers rôles, plateau fourni, on ne savait plus où donner des yeux… La musique, dans un syncrétisme de bon aloi, participait à cette joyeuse profusion.
En revanche, côté voix les oreilles ont été frustrées. Si les chœurs ont assuré une présence convaincante, le joli filet de voix de Suzon (Dima Bawab) peinait en revanche à passer la rampe, et Marion (Ségolène Bolard), progressivement plus assurée, ne projetait guère plus. Et la diction était sans doute restée en coulisse… Les autres rôles, masculins et féminins, endossés par des artistes du chœur, ne pouvaient guère rivaliser davantage avec un orchestre emporté par le rythme de la partition. C’était pourtant une idée audacieuse que de confier la scène aux artistes locaux, jusqu’aux costumière et perruquière dans leur propre rôle.
Néanmoins il a fallu attendre le 3e acte pour obtenir une lecture cohérente de l’œuvre.
Le 1er acte, devant une barre d’immeubles, dessinait la misère des artistes de foire, rhabillés en intermittents actuels, condamnés à des lieux et conditions lugubres.
Au 2e acte se tournait un film de télévision, dans une ambiance cocardière « Made in Normandie » dont les vedettes étaient des transfuges de la troupe de saltimbanques, et les soldats américains d’un Débarquement… d’opérette !
Enfin l’acte final confrontait les paillettes et le clinquant du show biz avec la précarité généreuse – et utopiste voire totalement utopique – des artistes de la rue ; on imagine bien que la balance a penché côté cœur… Les violons étaient au rendez-vous, préparés par des airs de Pagliacci judicieusement rajoutés.
Cette opérette créée en 1899 pour les fêtes de fin d’année, a tenu ses promesses, intelligemment modernisée par la metteure en scène Mireille Larroche, qui a été formée par Ariane Mnouchkine au théâtre du Soleil, et qui a dirigé pendant 7 ans la Péniche Théâtre, plutôt tournée vers le répertoire contemporain ; toujours inventive, elle a fondé en 1982 la Péniche Opéra devenue compagnie lyrique nationale en 1998 ; elle ne compte plus ses réalisations lyriques, notamment aux Chorégies (Madama Butterfly en 2008), à Avignon (Butterfly puis Wozzeck), en France et à l’étranger. Et si la modernisation systématique du répertoire, souvent gratuitement idéologique et acrobatiquement anachronique, nous fait toujours craindre le pire, la qualité de la metteure en scène pouvait légitimement rassurer… On a même frôlé le karaoké en entamant la célèbre valse : « C’est l’amour qui flotte dans l’air à la ronde. C’est l’amour qui console le pauvre monde. C’est l’amour qui rend chaque jour la gaîté. C’est l’amour qui nous rendra la liberté ! », dont beaucoup de spectateurs ont ainsi découvert l’origine. (G.ad. Photos Cédric & Mickaël. Studio Delestrade)