La tragédie grecque dans toute son intensité poignante
Théâtre l’Albatros, 18h45, durée 1h25, jusqu’au 17 juillet seulement. Réservations au 04 90 85 23 23
Dimanche soir, il sera trop tard. Chaque année sauf Covid, l’excellente compagnie crétoise ViVi revient avec une nouvelle création, une tragédie en grec ancien surtitré ; l’interprétation chorégraphique, plus que vigoureuse, exprime dans sa violence retenue l’emprise poignante du destin tragique qui étreint l’humanité. Cette année, c’est une pièce d’Eschyle, qui raconte, vue du côté des Perses vaincus (l’Iran actuel), ceux qu’on appelle « les barbares », la terrible bataille navale historique qui a décimé en 480 avant JC dans le golfe de Salamine (près d’Athènes) la flotte perse sous les coups des Grecs, moins nombreux mais aux bateaux plus mobiles.
Sur l’espace scénique nu, la tension monte progressivement dans le palais royal, chez les conseillers du roi (le chœur, sobre), puis quand arrive la reine Atossa inquiète pour son fils qu’on croit mort, ensuite lorsque l’ombre du roi Darius revenue du royaume de l’au-delà déplore l’inconséquence militaire terrible de son successeur ; l’intensité tragique culmine avec le retour de Xerxès, le jeune roi, vaincu, qui porte tout le poids de cet épouvantable malheur, individuel et collectif.
Une diction parfaite dont se régale la lycéenne que je fus, traductrice d’Eschyle, mais qui semble tenir aussi sous son emprise le reste du public, dont je n’imagine pas qu’il ne soit composé que d’hellénistes ; l’alternance entre passages proférés et strophes chantées ; une chorégraphie « virile », parfois acrobatique ; des surtitres concis qui épousent parfaitement la narration ; un dépouillement dans la scénographie qui concentre pleinement l’attention sur le tragique ; une densité dans l’interprétation, croissante jusqu’à l’akmè du malheur… Telle est la ligne artistique de la compagnie, qui confirme une fois de plus son excellence, et son universalité, dans l’espace et dans le temps.
Aussi réussi, mutatis mutandis, que la hiératique et solennelle adaptation télévisée proposée par Jean Prat en forme de magnifique oratorio éponyme, le 31 octobre 1961 (France-TV et France IV) et qui avait été elle aussi, à l’époque, un véritable événement culturel.
Geneviève. Photo G.ad.
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