Une production réussie,
mais au prix d’adaptations successives dans une situation sanitaire compliquée
Die Walküre, opéra de Richard Wagner, Opéra de Marseille (16-02-2022)
Direction musicale, Adrian PRABAVA. Adaptation scénique, Charles ROUBAUD. Costumes, Katia DUFLOT. Lumières, Marc DELAMEZIÈRE. Vidéos, Camille LEBOURGES
Brünnhilde, Petra LANG. Sieglinde, Sophie KOCH. Fricka, Aude EXTREMO. Siegmund, Nikolaï SCHUKOFF. Wotan, Samuel YOUN. Hunding, Nicolas COURJAL. Gerhilde, Jennifer MICHEL. Helmwige, Ludivine GOMBERT. Ortlinde, Laurence JANOT. Waltraute, Lucie ROCHE. Rossweisse, Carine SÉCHAYE. Siegrune, Cécile GALOIS. Grimgerde, Marie GAUTROT. Schwertleite, Julie PASTURAUD
Orchestre de l’Opéra de Marseille
La production a dû s’adapter plusieurs fois à une situation compliquée.
La direction musicale qui devait être assurée par Lawrence Foster a finalement été confiée à Adrian Prabava, et Béatrice Uria-Monzon qui devait interpréter le rôle d’Fricka est remplacée par Aude Extrémo.
Et le programme de salle précise : « Désireux de pouvoir maintenir la production de la Walkyrie dans le contexte sanitaire actuel, l’Opéra de Marseille et l’équipe de production ont été dans l’obligation de revoir le concept du spectacle. Ainsi, l’Orchestre, dirigé par Adrian Prabava, sera sur le plateau. Le metteur en scène Charles Roubaud, entouré par Katia Duflot pour les costumes, Camille Lebourges pour les vidéos, Marc Delamézière pour les éclairages, présentera une adaptation semi-scénique ». (NDLR)
Il aura fallu du courage – et certainement un peu de chance aussi ! – aux équipes artistiques et techniques de l’Opéra de Marseille, ainsi qu’à son directeur général Maurice Xiberras, pour mener à son terme cette série de quatre représentations de La Walkyrie de Richard Wagner. Depuis la création de la mise en scène en 2007 par Charles Roubaud, le Covid s’est malheureusement imposé et modifie aujourd’hui encore les conditions de représentation.
On connaît d’abord trop de spectacles annulés partout en Europe ces derniers temps pour cause de cas positif chez un ou des artistes, pour oublier que toute soirée programmée reste placée sous cette espèce d’épée de Damoclès. Et puis les contraintes sanitaires ont par ailleurs amené l’Opéra de Marseille à positionner l’orchestre sur la scène à l’arrière d’un velum sur lequel sont projetées les diapositives et légères animations conçues par Camille Lebourges. Cette Walkyrie, sous la direction musicale du chef Adrian Prabava, est jouée dans l’arrangement qu’en a fait Eberhard Kloke pour un « orchestre de taille moyenne », soit par environ une bonne moitié de la centaine de musiciens habituellement présents. L’ampleur musicale ressentie par l’auditeur dépend évidemment de son placement dans la salle ; apparemment aucun déficit de décibels pour l’auditoire des étages supérieurs, mais au parterre quelques rares moments de déchaînement orchestral typiquement wagnérien sonnent avec une certaine retenue.
La réalisation de Charles Roubaud, annoncée ce soir en version semi-scénique et déjà très axée sur la vidéo à son origine, se prête finalement bien aux circonstances, avec son décor en mur d’images : écorce de tronc d’arbre à l’acte I, grand mur puis rocher dans la montagne au suivant, avant des branches d’arbres qui enchaînent sur l’embrasement final. L’espace de jeu des protagonistes se situe alors au-dessus de l’habituelle fosse d’orchestre, ce qui a l’avantage de les faire venir au plus près des spectateurs des premiers rangs du parterre.
La distribution vocale réunie est formidable et comporte plusieurs révélations. L’Opéra de Marseille offre effectivement deux prises de rôles féminins, Sophie Koch en Sieglinde et Aude Extrémo en Fricka, toutes deux développant un chant absolument incandescent et puissant. Le ténor Nikolaï Schukoff est aussi l’un des meilleurs Siegmund de notre époque, disposant d’un riche registre grave, tout comme le Wotan de Samuel Youn, grain noble et aigus projetés comme des flèches. Passé un démarrage (« Hojotoho ! ») tout feu tout flamme, mais à l’intonation imprécise, Petra Lang incarne une Brünnhilde sanguine, tandis que la basse au creux abyssal dans le grave Nicolas Courjal (Hunding) complète les rôles principaux. On se réjouit enfin de découvrir certains visages bien connus dans nos théâtres de la région (comme ceux de Jennifer Michel en Gerhilde ou Ludivine Gombert en Helmwige) au sein du groupe des huit Walkyries françaises.
F.J. Photos Christian Dresse
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