Standing ovation pour une Passion émouvante
Grand Théâtre de Provence, Aix en Provence le 19 avril 2019
Ensemble vocal et instrumental de Lausanne. Direction, Michel Corboz
Bach, Passion selon Saint Matthieu
C’est en 1961 que Michel Corboz a fondé l’Ensemble Vocal de Lausanne, puis enregistré plusieurs pièces de Monteverdi, et Bach un peu plus tard dont les Passions (Saint Jean en 1978 et Saint Mattieu en 1983, disques édités alors par ERATO). Aujourd’hui âgé de 85 ans, si la démarche du chef suisse avec sa canne est difficile pour rejoindre le podium, la battue est quant à elle alerte et claire, faisant couler la musique avec une fluide sérénité.
Déjà portée dans sa dénomination, la cohérence est le premier mot qui vient pour qualifier l’Ensemble vocal et instrumental de Lausanne, choristes et musiciens étant très habitués à se produire ensemble. Le groupe vient d’ailleurs de donner cette Passion à deux reprises à Lisbonne, et n’a eu besoin à Aix-en-Provence que d’une répétition générale le matin du concert.
Comme Bach l’a voulu, le double chœur se répartit à gauche et à droite, chacun composé de ses 4 pupitres, avec 4 ou 5 choristes par pupitre, soit au total 34 participants, cette disposition permettant de très beaux effets stéréo. Le chœur se montre délicat et l’orchestre précis et expressif : magnifiques premier violon, hautbois, orgue, continuo.
Parmi les solistes chanteurs, on remarque d’abord la soprano Ana Quintans, la voix la plus lyrique de la soirée, jolie couleur et souplesse, très émouvante dans « Blute nur, du liebes Hertz ! ». La mezzo Marianne Beate Kielland, d’un instrument de moindre ampleur et au grave limité, se montre aussi touchante, comme au cours de son air « Erbarme dich » en fin de première partie, remarquablement accompagnée par le violon solo.
L’Evangéliste de Hans Jörg Mammel est clair et aux extensions faciles vers l’aigu, quoi que sujet à des fragilités de plus en plus marquées à mesure que la soirée avance. L’autre ténor Marco Alves dos Santos adopte un style plus proche de l’opéra, la voix porte avec quelques débuts de tensions par moments.
Les voix graves d’André Baleiro (Jésus) et Peter Harvey (Pilate) sont toutes les deux bien timbrées, avec peut-être un supplément d’autorité et d’homogénéité pour Jésus, malheureusement le « rôle » le moins développé de la soirée pour ce qui concerne le nombre de ses interventions.
Une standing ovation finale salue cette Passion émouvante. (I.F. Photos Caroline Doutre).