Opéra de Marseille (à c. du 31-12-2020)
La mise en scène initialement confiée à Leo Nucci sera finalement assurée par Louis Désiré. La distanciation physique des artistes sur scène en vigueur imposait à Leo Nucci d’adapter sa mise en scène et son dispositif scénique. Avec son équipe, ils ont préféré y renoncer plutôt que d’altérer la production telle qu’il l’avait conçue.
Opéra en 4 actes et 4 tableaux. Livret de Giuseppe GIACOSA et Luigi ILLICA
Création à Turin, Teatro Reggio, le 1er février 1896
Direction musicale Paolo ARRIVABENI. Mise en scène Louis DESIRÉ. Décors/Costumes Diego MÉNDEZ CASARIEGO. Lumières Patrick MÉEUS
Mimi Angélique BOUDEVILLE. Musette Lucrezia DREI
Rodolphe Enea SCALA. Marcel Alexandre DUHAMEL. Schaunard Régis MENGUS. Colline Alessandro SPINA. Benoît Antoine GARCIN. Alcindoro Jean-Luc ÉPITALON
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille
La vidéo a été mise en ligne le jeudi 31 décembre 2020 à 17h sur marseille.fr et opera.marseille.fr , et reste visible jusqu’au samedi 30 janvier 2021
Une Bohème puissamment émouvante
Cette « Bohème » mise en scène par Louis Désiré, et enregistrée sans public, est un condensé de concision et d’émotion. A voir sur le Web jusqu’au 30 janvier 2021.
S’il est un opéra où le noir est justifié, alors qu’il est omniprésent et inopportun dans de nombreuses productions actuelles, c’est sans doute La Bohème. Noirceur, rigueur, sobriété, telle est la signature de cette production de Louis Désiré, remplaçant celle de Leo Nucci dont la conception initiale n’entrait pas dans les contraintes sanitaires.
Montée dans les conditions que l’on connaît – enregistrée sans public et visible sur le web jusqu’au 30 janvier grâce à la pugnacité de Maurice Xiberras et de son équipe -, cette production, sans autre décor qu’un lit, une pauvre table et quelques chaises, est pourtant totalement aboutie.
Elle repose avant tout sur un quatuor de choc, vocalement et scéniquement irréprochable : les deux baryons, Alexandre Duhamel qui crève l’écran (Marcello, le peintre) et Régis Mengus (Schaunard, le musicien), la basse Alessandro Spina (Colline, le philosophe) et le ténor Enea Scala (Rodolfo, le poète). Les deux soprani sont bouleversantes : Angélique Boudeville (Mimi), que nous avions entendue aux Saisons de la Voix de Gordes en 2019 et qui est accueillie pour la première fois sur la scène de Marseille, exprime sans pathos les émotions les plus diverses, malgré des médiums parfois un peu faibles, et Lucrezia Drei (Musette) sait moduler toute la complexité de son rôle.
Tous les solistes, qu’ils soient familiers de l’œuvre ou en prise de rôle très convaincante (Enea Scala et Angélique Boudeville) offrent ce que l’on peut attendre de mieux : une belle présence dramatique, une ligne de chant précise et souple, une sensibilité qui, même sur le petit écran, submerge toute la longue scène finale – une vingtaine de minutes -. Et, entre eux, équilibre et homogénéité, soulignés par la sobriété de la lumière blanche, parfois incisive, souvent limitée au faisceau nu de la poursuite. La formation orchestrale réduite restitue sous la direction de Paolo Arrivabeni toutes les couleurs de la transcription signée par Gerardo Collela. Et les chœurs, élégamment masqués, livrent aussi une projection vocale tout à fait intelligible.
Une réalisation puissante, qu’on ne devrait pas manquer. Et qui prouve que, même dans la situation actuelle, les artistes du spectacle vivant peuvent – et doivent – travailler.
G.ad.
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