Salon de musique à La Mirande
Hôtel La Mirande (site officiel), Avignon. Mardi 15 février 2022, 15h
Gary Hoffman, violoncelle. Jean-Sébastien Bach, Suites pour violoncelle 1, 2 et 3 ; BWV 1007/8/9
Hôtel La Mirande, Avignon. Mardi 15 février 2022, 18h30
Gary Hoffman, violoncelle. Jean-Sébastien Bach, Suites pour violoncelle 4, 5 et 6 ; BWV 1010/11/12
Hôtel La Mirande, Avignon. Mercredi 16 février 2022, 20h
Philippe Graffin, violon, & Lidy Blijdorp, violoncelle,
Ravel, Kaddish ; Bach, Inventions à deux voix ; Debussy, Prélude à l’après midi d’un faune (arrangement de Rob Zuidam, violoncelle et violon, création) ; Erwin Schulhoff, Duo pour violon et violoncelle (1925)
Depuis quelques années, Martin Stein a ouvert son Salon de musique hivernal au cœur de l’hôtel de La Mirande, que sa famille a acquis en 1987 et qu’il dirige aujourd’hui. Ce lieu historique au pied du Palais des Papes offre son cadre élégant et raffiné à des artistes de renom qui, dans une proximité délicate, partagent avec le public un moment hors du temps.
En cette semaine de février, deux dates étaient à réserver impérativement, confirmées tardivement à cause de la situation sanitaire. Des artistes en résidence ont choisi de donner aux mélomanes avignonnais, en avant-première, un programme destiné ensuite à des salles prestigieuses en France ou à l’étranger.
Mardi 15 février, c’est l’immense violoncelliste canadien Gary Hoffmann (site officiel) – lauréat en 1986 du Grand Prix de la Ville de Paris au prestigieux Concours Rostropovitch – qui revient en ce lieu où il avait donné en avril 2019 l’intégrale des Sonates de Beethoven pour piano et violoncelle avec David Selig. Le Double concerto de Brahms qu’il avait partagé il y a quelques années à la salle polyvalente de Montfavet avec Cordelia Palm, violon super solo de l’Orchestre Avignon-Provence m’a laissé un souvenir absolument inoubliable. Gary Hoffman propose à La Mirande, en deux volets successifs (15h puis 18h30) ce monument de la musique que représentent les six Suites pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach, avant de les donner au Wigmore Hall à Londres le dimanche 13 mars à 19h30 (site officiel). Le même programme avait déjà magistralement interprété par Emmanuelle Bertrand les 29 et 30 janvier dans le cadre de Musique baroque en Avignon.
Dans cette ancienne livrée cardinalice de l’« altera Roma » papale, devenu Hôtel Pamard, aujourd’hui La Mirande, le salon raffiné constitue un écrin de choix pour concert d’exception ; les tomettes vernissées, l’estrade de bois, le plafond à caissons, y créent pourtant une acoustique un peu sèche. Néanmoins, après la relative rudesse des premières notes, très vite le célébrissime Prélude de la première Suite se déploie avec son cortège de souvenirs et d’émotions multiples. Et le son se dessine, se sculpte, avec une extrême précision ; chaque note se perçoit dans son unicité singulière ; les aigus sont clairs, les graves profonds. Les Suites sont données dans leur ordre traditionnel, avec une pause médiane de deux heures. Et même si le passage entre les danses d’une même suite glisse presque en fondu enchaîné, les différences de tempo, de ton, de l’une à l’autre, sont immédiatement sensibles. Après l’allègre virtuosité de la courante – Suite 1 -, la légèreté du menuet ne saurait se confondre avec la gigue qui s’enchaîne – Suites 1 et 2 -, même si l’un et l’autre se révèlent aussi dansants. Dans le prélude de la troisième Suite, la mélodie se détache sur fond de basse continue, et un vibrato furtif souligne le frisson du magnifique instrument, un Niccolo Amati de 1662.
Chaque note, chaque accord, chaque danse, chaque suite, s’entend dans sa couleur propre, ciselée par un artiste concentré de bout en bout, jouant de mémoire, immobile, yeux fermés, dans une intensité qui touche à la perfection. La main droite est fine, délicate, semblant à peine tenir l’archet, aux attaques pourtant vigoureuses. Le poignet et le bras, d’une extrême souplesse, accompagnent discrètement la danse. La main gauche est d’une légèreté insolente, me faisant regretter de n’avoir pu entendre la seconde partie et la redoutable agilité de la dernière Suite.
Mercredi 16 février à 20h, le violoniste Philippe Graffin (photo 1), directeur artistique du Salon de Musique, et la talentueuse violoncelliste Lidy Blijdorp, eux aussi également en résidence, interprètent des pages de Bach, Ravel, Debussy, Schulhoff ; notamment en création l’arrangement de Rob Zuidam pour violoncelle et violon du célèbre Prélude à l’après midi d’un faune, initialement version symphonique sur un poème de Mallarmé. Ils donneront ce même concert au Concertgebouw d’Amsterdam le 20 février (site officiel).
G.ad. Photos G.ad. (Gary Hoffman)
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