Au Festival de Pâques d’Aix-en-Provence : Lea Desandre entre Haendel et Jupiter !
Mardi 15 avril 2025, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence. Dans le cadre du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence
Concert Haendel
Lea Desandre, mezzo-soprano
Ensemble Jupiter : Thomas Dunford, luth et direction ; Augusta Lodge, violon ; Ruiqi Ren, violon ; Jasper Snow, alto ; Cyril Poulet, violoncelle ; Ismaël Campanero, contrebasse ; Violaine Cochard, Clavecin et orgue
Georg Friedrich Haendel : extraits d’oratorios – Theodora, An Occasional Oratorio, Joseph and his Brethren, Solomon, The Triumph of Time and Truth, Semele
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Ensemble à la scène et à la ville, la mezzo-soprano Lea Desandre et le luthiste Thomas Dunford se produisent dans le cadre du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence. Ils sont accompagnés pour l’occasion par des musiciens de l’Ensemble Jupiter, formation créée en 2018 par Thomas Dunford. Réunis ce soir en petit nombre autour du couple, les six instrumentistes n’en montrent pas moins une maîtrise absolue de leurs instruments, une cohésion sans faille, une écoute mutuelle attentive et dynamique, l’ensemble de ces qualités nous procurant un plaisir auditif précieux tout au long du concert. Le programme, qui alterne entre pages chantées et passages purement instrumentaux, est constitué pour l’essentiel d’extraits d’oratorios de Haendel, compositeur au cœur d’un répertoire baroque cher à l’ensemble de ces artistes.
C’est l’oratorio Theodora qui entame la soirée, avec l’air particulièrement doloriste « With Darkness Deep » de l’acte II, où la voix chaude, chaleureuse, profonde et à l’intonation très précise de Lea Desandre exprime admirablement l’angoisse de la jeune Theodora conduite en prison. Un peu plus tard, le deuxième air « As with Rosy Steps the Morn Advancing » reste dans cette veine élégiaque, à la ligne vocale délicate. Il faut tout de même régulièrement tendre un peu l’oreille pour ne rien perdre de la partie vocale, en particulier dans le registre inférieur grave. Ce format de concert en petite formation aurait certainement trouvé sa place idéale dans le petit théâtre du Jeu de Paume, mais on se dit d’un autre côté, au vu de la salle comble ce soir du Grand Théâtre de Provence, que cette hypothèse aurait fait bon nombre de malheureux spectateurs restés sans billet.
Les airs doux contrastent avec les passages plus agités, comme celui extrait de An Occasional Oratorio, « Fly from the Threatening », séquence rapide et vive aux longues enfilades de vocalises, ou encore l’aria « Prophetic Raptures Swell » tirée de Joseph and his Brethren, où sautillent les cordes tout autant que la voix, celle-ci répétant parfois comme en écho certaines lignes de partition.
La voix exprime l’émotion au cours de « Will the Sun Forget to Streak » tiré de Solomon, tout comme dans l’air « Guardian Angels » extrait de The Triumph of Time and Truth, connu également comme l’air de Beauté dans sa version italienne du Trionfo del Tempo e del Disiganno. Ce passage est d’ailleurs pour nous le sommet de la soirée, la voix planant dans sa partie supérieure la plus aiguë, ceci dans un parfait équilibre acoustique avec la légère, et merveilleuse, épaisseur musicale. Le programme se termine avec l’aria « No, No I’ll Take No Less » de Semele, d’une extrême virtuosité, où la colorature est répétée à l’envi, passée ici avec abattage et musicalité.
Entre ces pages vocales sont intercalées plusieurs séquences instrumentales, ménageant ainsi des plages de repos nécessaires à la mezzo-soprano. L’acoustique du lieu est assez favorable aux instrumentistes, dans un son confortable à l’oreille et bien précis dans la définition de chaque musicien. On admire l’ensemble, ainsi que chacun pris séparément, en particulier les deux violons, les claviers tenus par Violaine Cochard, sans oublier bien évidemment le luth joué par Thomas Dunford. Comme l’introduit le luthiste au micro à l’intention de l’auditoire, la Sarabande Suite n°4 en ré mineur est certainement le morceau le plus connu du compositeur, passage popularisé par la bande-son du film Barry Lyndon réalisé en 1975 par Stanley Kubrick.
En bis, les artistes donnent, comme ils en ont l’habtiude, un morceau de leur composition, co-écrit avec Douglas Balliett, « We are the ocean, each one a drop », une atmosphère jazzy par instants où chaque musicien est présenté individuellement à tour de rôle. Pour terminer, sont reprises les parties finales des deux extraits du programme de The Triumph of Time and Truth et Semele.
I.F / F.J. © Caroline Doutre
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