Voir aussi tous les disparus de ces dernières années qui avaient illuminé les scènes de Provence
C’est encore une voix de légende qui se tait à 89 ans en ce 13 mai 2022, à Madrid sa ville de naissance. Née en 1933 dans une famille aimante, Teresa Berganza y a été sensibilisée toute jeune à toutes formes d’art, musique et littérature notamment. Mezzo-soprano, elle fera ses débuts internationaux en une année faste, en 1957 : Madrid, Paris (théâtre des Champs-Elysées), Italie, festival d’Aix-en-Provence dans le rôle de Dorabella (Cosi fan tutte de Mozart), puis aux Etats-Unis enfin dans le monde entier.
Raymond Duffaut, qui a régné sur le monde lyrique de la Provence pendant plus de quatre décennies (Chorégies d’Orange, Opéra d’Avignon, Cnipal de Marseille) et qui continue aujourd’hui (Saisons de la Voix de Gordes, Musique Baroque en Avignon), a réagi immédiatement.
« La scène lyrique continue à se vider avec la disparition de l’une des plus brillantes interprètes de l’Opéra.
On ne peut s’imaginer que de tels astres puissent disparaître, tant LA Berganza avait gardé sa vivacité, son esprit pétillant ! Ma dernière rencontre avec elle s’était faite à Toulouse, où elle présidait le jury du fameux Concours ; une présidente, certes exigeante dans ses choix, mais tellement juste, bienveillante et humaine, ce que démontraient les innombrables master class qu’elle a animées dans le monde entier !
Elle avait fait des débuts que personne n’oublie à la création d’Aix aux côtés de Teresa Stuch-Randall, une autre grande, et ce grâce au premier directeur aixois, incroyable découvreur de voix, Gabriel Dussurget (1904-1996, directeur du Festival lyrique depuis la création en 1948 jusqu’en 1972, NDLR). Comment ne pas se souvenir de ses Dorabella, Cherubino, et Zerlina, fixée sur la pellicule légendaire du Don Giovanni de Losey ! Comment ne pas se souvenir de son incandescente Rosine chantée dans le monde entier ! Comment ne pas se souvenir de sa très «élégante » Carmen, qu’elle avait triomphalement interprétée à l’Opéra-Comique avec Domingo et Raimondi – excusez du peu – ; une Carmen que j’avais invitée en octobre 85 à Avignon – Barbara Hendricks était alors Micaela -, mais une Carmen qu’elle n’aura pas chantée : en effet, arrivée avec 24h de retard pour la première répétition, elle s’était discrètement installée en fond de salle alors que le metteur en scène dont je tairai le nom expliquait sur scène aux chœurs que le comportement des divas était inexcusable !
LA Berganza, qu’il ne connaissait pas, s’est alors levée, s’est approchée dudit metteur en scène et lui a dit : « Carmen vous salue bien… » et elle a quitté l’Opéra !!! C’était son caractère, c’était sa personnalité !
Et LA Berganza était aussi et peut-être surtout une immense mélodiste ; j’avais eu le bonheur de l’accueillir dans les années 80 au temps des grands concerts de la Cour Saint-Louis d’Orange, où ses allergies avaient dû lutter contre les graminées des deux magnifiques platanes qui ornaient alors la Cour : allergies peut-être, mais quel style, quelle intelligence, quelle musicalité, quelle intelligence du texte !
Une grande parmi les plus grandes… »
G.ad. Photos Facebook, Radio-France
Laisser un commentaire