Direction musicale : Roberto RIZZI BRIGNOLI
Soprani : Hélène CARPENTIER, Laurence JANOT ; mezzo-soprano : Sophie KOCH ; ténor : Florian LACONI ; baryton : Florian SEMPEY ; basses : Jean TEITGEN, François LIS
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille
Charles Gounod, Faust et La Reine de Saba. Hector Berlioz, La Damnation de Faust
Les contraintes sanitaires dues à la pandémie de Covid-19 ont conduit l’Opéra de Marseille à reporter le grand opéra L’Africaine de Giacomo Meyerbeer à une future saison. La série de représentations était programmée initialement au mois de juin, et les solistes prévus ont été mobilisés sur deux concerts d’opéra français, les 11 et 13 juin. Nous avons assisté à la première soirée, articulée principalement autour de la figure de Faust.
La représentation démarre avec plusieurs pages instrumentales, extraites du Faust de Charles Gounod. Il s’agit des ballets de la Nuit de Walpurgis du dernier acte, coupés pour la plupart d’entre eux lorsque l’opéra est donné à la scène. Sous la direction musicale de Roberto Rizzi-Brignoli, l’Orchestre de l’Opéra de Marseille fait preuve de cohésion, concentration et expressivité dans ses interventions.
C’est encore Gounod qui enchaîne, mais dans un autre de ses opéras, La Reine de Saba et l’un des plus beaux airs pour basse du répertoire français « Sous les pieds d’une femme », chanté par François Lis, voix agréablement timbrée dans le grave. On se souvient des représentations de concert, à l’Opéra de Marseille en octobre 2019, et de l’impressionnant Nicolas Courjal dans ce même rôle de Soliman.
Hector Berlioz fait une courte apparition au cours de cette soirée consacrée à Charles Gounod, avec l’air « D’amour l’ardente flamme » extrait de La Damnation de Faust. La mezzo Sophie Koch a déjà fréquenté le rôle de Marguerite (on se souvient des représentations à l’Opéra Bastille en décembre 2015, avec Jonas Kaufmann et Bryn Terfel… excusez du peu !), les sonorités sont riches dans le grave, l’élocution est soignée, mais le vibrato est parfois envahissant. La chanteuse est en tout cas capable d’un fort volume, sachant rivaliser avec l’orchestre dans les moments les plus dramatiques.
On passe ensuite au Faust, qui occupe au bilan la majorité de la soirée, dans une continuité qui donne l’impression à l’auditeur d’avoir assisté à une substantielle partie de l’opéra, l’acte II et une bonne part de l’acte IV étant donnés suivant une agréable continuité. Les chœurs sont placés au balcon, et pendant la kermesse aux airs de valse qui tourne, le chef a bien du mérite à coordonner les musiciens sur scène et les différents pupitres du chœur situés derrière lui… une direction musicale à 360° !
Le Valentin du baryton Florian Sempey est un régal ; son air « Avant de quitter ces lieux » est conduit à la fois avec goût et force, n’hésitant pas à alléger quelques attaques ou phrases en mezza voce. La basse Jean Teitgen en Méphistophélès impressionne pareillement : creux abyssal dans le grave, grain noir véritablement diabolique et une dynamique vocale jamais prise en défaut. Ces deux chanteurs tiennent assurément leur rang parmi les stars actuelles du chant français.
Les interventions du ténor Florian Laconi sont très épisodiques, n’ayant pas à chanter son morceau de choix du 3ème acte « Salut, demeure chaste et pure », et il en est un peu de même pour Laurence Janot qui tient le rôle de Siebel dans les ensembles. Même allégée de sa ballade « Il était un roi de Thulé » et de son fameux « air des bijoux » du III, la soprano Hélène Carpentier doit tout de même défendre la difficile page de la scène de l’église. Elle le fait avec de beaux moyens, une voix sonore à l’aigu facile et dégageant de l’émotion, dans une diction de qualité mais qui paraît sans doute encore perfectible. Elle incarne aussi son personnage, faisant mine de s’agenouiller avant que l’inquiétant diable ne l’en empêche (« Non ! Tu ne prieras pas ! »).
Le concert se termine avec le chœur énergique et martial « Gloire immortelle de nos aïeux », que le public salue avec un franc enthousiasme, comme libéré après ces trop nombreux mois d’absence au théâtre. Le bis est court mais dense, en reprenant les dernières mesures du chœur, cette fois avec les solistes alignés à la rampe et donnant un petit air de 14 juillet à cette conclusion !
F.J. Photos Christian Dresse
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